Rose Naggar-Tremblay : trouver sa voix et tracer sa voie

Entrevue réalisée par Alexandre Villemaire
Genres et styles : classique occidental

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Depuis qu’elle a remporté l’édition 2021 du concours annuel de l’Orchestre symphonique de Montréal consacré au chant, le 27 novembre dernier, les louanges et les récompenses se succèdent pour la contralto montréalaise Rose Naggar-Tremblay. Ancienne stagiaire de l’Atelier lyrique de l’opéra de Montréal (Svadba, Twenty-Seven) qui a récemment foulé les planches de l’Opéra de Sofia dans le rôle-titre de Carmen, celle qui a été nommée « Révélation Radio-Canada 2022-2023 » en musique classique est récipiendaire du prix Georges Enesco, de la bourse « Jeune espoir lyrique canadien », du prix pour la meilleure interprétation d’une œuvre canadienne du concours de l’OSM pour le cycle Healing (composé avec Éric Champagne) et, plus récemment, du deuxième prix d’Europe 2022. Elle a également participé en mars dernier au lancement de l’album de l’opéra basé sur la vie et les textes de Jack Kerouac, La nuit est ma femme[AV1] , dans lequel elle tenait le rôle de Gabrielle. Personnalité polyvalente, originale et créative au timbre riche et agile, à la fois pédagogue, autrice-compositrice-interprète et librettiste, Rose Naggar-Tremblay s’impose parmi les nouvelles étoiles montantes du monde lyrique au Québec, en mettant de l’avant l’authenticité et l’instinct comme moteur de création.Nous l’avons rencontrée à son domicile pour parler de ses récents succès, de sa première participation au Festival de Lanaudière, de ses projets actuels et à venir, de même que sur son parcours d’artiste-musicienne en constante évolution.


PAN M 360 : La dernière année a été très riche en réalisations professionnelles pour vous. Qu’est-ce que ça fait de recevoir en si peu de temps autant de reconnaissances en début de carrière?

Rose Naggar-Tremblay : C’est sûr que c’est difficile à intégrer. Personnellement, j’ai attendu très longtemps avant de faire des concours. Avant de faire le concours George Enesco, je n’en avais fait qu’un autre; ce qu’il m’a montré, c’est que je n’étais pas prête à faire des concours. Dans mon répertoire que je présentais à l’époque, il y avait deux airs que je maîtrisais sur les cinq que je proposais. À ce moment-là, je n’avais pas fait la recherche et l’affirmation de ce qu’était mon identité vocale. Et je pense que, pour faire un concours, il fait que tout ce que tu chantes soit intimement lié à ton instrument, à ta volonté, à ce que tu essayes de construire pour ta carrière. Chaque opportunité de chanter devant de nouvelles plateformes, de nouveaux jurys, de nouveaux publics de nouveaux pays, il faut que ce soit stratégique.

Faire un concours, ce n’est pas une finalité en soi. C’est une carte que j’ai mise dans mon jeu. Donc, en recevant ces prix, j’ai la satisfaction de savoir que mes décisions ont marché et, au-delà de ça, dans les concours que j’ai faits cette année, Enesco, l’OSM et le Prix d’Europe, c’était trois concours où il y avait beaucoup de place pour de la musique de création. Je suis allé faire des concours où je savais que j’avais quelque chose de pertinent à dire et qui allaient me rapprocher de mon objectif, celui-ci étant de me faire reconnaître comme une interprète-créatrice qui est auteure de ce qu’elle chante.  

PAN M 360 : Considérez-vous que cette recherche d’affirmation vocale personnelle, c’est quelque chose de nouveau comparativement à il y a quelques années où l’on était moins dans cette dynamique de proposer quelque chose d’autre que sa voix?

Rose Naggar-Tremblay : Je ne veux pas diminuer le travail d’interprète, parce que c’est immense. Il y a tellement de place à la créativité en tant qu’interprète, c’est juste que moi dans la création, je retrouve beaucoup de joie. Personnellement, je considère que le geste créatif c’est un acte de résilience qui, pour moi, passe notamment par l’écriture de chansons. C’est pour ça que je mets ça de l’avant. En lien avec ma voix, quand j’étais encore aux études, je pense que je n’ai pas su trouver, où je n’ai pas eu accès aux ressources nécessaires pour vraiment comprendre l’unicité de celle-ci. Et, je parle de ma voix dans tous les sens du terme, cette voix qui voulait déjà tellement vivre dans le registre de contralto, cette voix que je n’arrivais pas à accepter et avec laquelle j’ai tenté de négocier durant mes études, pour finalement faire un 360 degrés où le répertoire c’est imposé de lui-même. Aujourd’hui, j’ai un « branding » de créatrice, mais j’ai aussi un « branding » de contralto colorature, parce que j’ai affirmé mon registre, alors qu’il n’était pas du tout aussi égal et long quand j’essayais de me battre pour être une mezzo lyrique.

PAN M 360 : Qu’est-ce que ça fait de se produire dans le cadre du Festival de Lanaudière?

Rose Naggar-Tremblay : C’est vraiment une fleur. C’est aussi un beau défi parce que l’organisation du Festival a eu l’instinct de me jumeler avec le Quatuor Andara, parce qu’ils pensaient ce serait intéressant de nous faire travailler ensemble. Les collaborations, surtout à l’extérieur de son cercle immédiat c’est toujours fertile. Ça force à se questionner et à se positionner en tant qu’artiste.

PAN M 360 : Justement sur cette collaboration, pouvez-vous nous en dire plus sur ce qui a contribué à déterminer le programme du concert et à réunir dans ce dernier des compositeurs aux personnalités aussi différentes que Mahler, Respighi et De Falla?Rose Naggar-Tremblay : Ç’a été complexe de faire le choix du répertoire parce que, justement, on cherchait un répertoire qui représentait le quatuor comme entité et moi comme interprète. De plus, eux aussi sont des créateurs, ils font beaucoup de musique originale. C’est également beaucoup de négociations pour faire correspondre nos goûts. Finalement, on s’est trouvés dans le romantisme, dans l’expressivité de la partition, il y avait aussi une question de ce qui est adéquat au quatuor à cordes; pour Mahler la partition d’orchestre se transposait bien, le Respighi est directement composé pour quatuor à cordes et mezzo-soprano. C’est l’fun parce qu’on a créé un programme qui est à notre image, qui colle à ma voix et qui correspond à nos intérêts. Il va aussi y avoir de la musique de création, avec un cycle qui est une œuvre originale du quatuor et aussi quelques surprises.


PAN M 360 : Qu’est-ce qui vous attend dans les prochains mois?

Rose Naggar-Tremblay : C’est beau ce qui s’en vient, ou du moins ça augure bien. Cette année, je fais énormément de musique d’orchestre, qui est une de mes grandes passions. Je vais travailler avec des orchestres du Québec avec qui je n’ai pas encore travaillé, notamment l’Orchestre de Trois-Rivières, l’Orchestre de Drummondville, l’Orchestre de l’Estuaire. Je participe également à la Virée classique, Clavecin en concert, le Festival Mode & Design et Ahuntsic en fugue. Je suis principalement au Québec cette année, mais à partir du printemps 2023, ça va y aller par là! Je vais être en France et en Allemagne, avec des contrats qui sont signés jusqu’en 2025. Dans mes projets personnels, mon album de chansons Je me souviens à toi est prévu pour janvier 2023. C’est parti pour une belle aventure.

 [AV1]https://panm360.com/records/mathilde-cote-et-ivy-la-nuit-est-ma-femme-un-opera-dapres-jack-kerouac/

Rose Naggar-Tremblay et le Quatuor Andara se produiront au Festival de Lanaudière le jeudi 21 juillet. Détails et billets ici!

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