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Né en Côte d’Ivoire et originaire du « pays des hommes intègres », le Burkina Faso, Dramane Konaté maîtrise le djembé comme un cœur qui bat au rythme du monde. Avec son opus Touman (Disques Nuits d’Afrique), qui sortira le 3 novembre 2023, le voyageur né invite à l’immersion ouest-africaine pour une pause mélodique ancrée au moment parfait de l’écoute. Son programme : douze chansons riches en émotions et rythmiques pour ce maître incontesté du Faso.
Lisez la critique de Touman réalisée par Frédéric Cardin sur Pan M 360
PAN M 360 : Tout d’abord, félicitations pour ton album, Dramane!
Dramane : Merci, merci.
PAN M 360 : Je l’ai écouté ce matin et ça m’a mis de très bonne humeur. Qu’est-ce que ça fait d’être sur le point de publier cet album dans le monde?
Dramane : J’ai la chair de poule. Parce que pour moi, c’est un album très important. Et ça parle aussi de ma vie personnelle. Et je pense également que cet album peut résonner auprès du public et lui permettre d’apprendre et de découvrir de nouvelles choses.
PAN M 360 : Est-ce que c’est votre premier disque ?
Dramane : Oui, c’est mon premier album et j’ai beaucoup travaillé dessus. J’ai du redoubler d’efforts car cette période était un moment vraiment très compliqué dans ma vie. J’étais perdu et je ne savais pas par où commencer. Je n’avais pas vraiment d’espoir dans la musique mais elle a finalement été salvatrice : elle m’a beaucoup aidé à exprimer toutes mes douleurs, toutes les choses que je gardais en moi, afin de me libérer. Faire cet album s’est finalement révélé être bénéfique et m’a permis de mieux me connaitre.
PAN M 360 : C’est intéressant de t’entendre dire ça. Quand j’ai écouté ton album, j’ai ressenti un véritable sentiment de catharsis à la fin. Je peux imaginer que ça fait longtemps que vous préparez cet album ?
Dramane : Cela a mis du temps à se faire. Je l’ai fait seul avec tout ce que j’ai gagné. Personne ne m’a aidé. Je l’ai fait seul et c’est moi qui cherchais des artistes. C’est moi qui ai tout arrangé. J’ai payé les studios, j’ai payé les artistes. Je l’ai fait seul parce que je sais qu’en Afrique, chez nous, les artistes ne vivent pas de ça. Donc vous ne pouvez pas dire à un artiste de venir faire votre album ou vous faites des répétitions et ensuite vous ne lui donnez rien. Ils ont besoin de manger, c’est comme leur métier. Donc pour moi, avant de faire ça, j’ai essayé de me préparer un peu pour le concert que je faisais. J’ai pris un peu d’argent, j’ai mis de côté et quand j’étais prêt, j’ai appelé les musiciens, on a fait des répétitions, j’ai appelé les studios, c’est tout, puis c’est tout.
PAN M 360 : Et comment s’est déroulé le processus de composition ? En tant que joueur de djembé, le rythme était la base de toutes les chansons?
Dramane : Oui, mais il y a des morceaux qui ne sont pas mes propres compositions. Il y a des mélodies, très anciennes, que mes grands-parents auraient connues, et j’y ai ajouté des couches de rythme. J’ai essayé de vraiment les arranger en fonction de la façon dont je réagis à ces mélodies, et de vraiment comprendre comment je ressens cette musique.
PAN M 360 : Peux-tu nous raconter un peu ton histoire avec le djembé?
Dramane : J’ai commencé à jouer quand j’étais très très petit, à l’âge de sept ans, en 1983. Ma mère chante, elle aime beaucoup la musique et elle a une très belle voix. Mais dans le village où j’ai habité en Côte d’Ivoire, il n’y avait pas musiciens. Donc les musiciens, tu les vois quand il y a un mariage et qu’il y a un baptême ou des fêtes annuelles, c’était ma première introduction à la musique et au son du djembé.
Comme je suis le seul musicien de ma famille, j’ai rencontré beaucoup de résistance. De la part de mon père surtout. Il ne voulait pas que son fils fasse de la musique. Parce qu’à l’époque, quand tu annonçais vouloir être musicien, tu n’avais pas d’avenir. Aucun parent n’acceptait que son fils devienne musicien. Il m’a engueulé, il m’a frappé, il m’a mal parlé devant du monde pour me décourager de continuer la musique et moi je savais ce que je ressentais grâce à la musique car mon père est un tailleur.
Tu sais pourquoi j’ai donné ce nom à l’album ? Car chaque choix se fait en temps voulu. Mon père voulait que je devienne tailleur. C’était ça son rêve. Il a tout fait pour que je devienne tailleur. Mais un problème s’est imposé à moi car je ne me vois pas très bien. J’ai des problèmes très grave aux yeux. À l’atelier, il est devenu évident que je ne voyais pas très bien l’aiguille et le fil et mon père ne m’a pas aidé non plus. Il avait la possibilité de chercher des lunettes pour que je puisse voir ou simplement m’envoyer quelqu’un pour m’aider, mais il n’a jamais fait ça. À partir de ce moment là, il voulait que je fasse autre chose et moi aussi j’ai décidé, de faire autre chose de ma vie. Mon choix a logiquement été la musique. Parce que pour moi la musique ça me donnait l’amour. Pour moi la musique c’était l’amour, pour moi la musique c’était ma vie. Je laisse échapper toutes ces émotions sur le djembé.
PAN M 360 : Vous venez de Côte d’Ivoire, mais vous jouez la musique qui vient du Mali, est-ce que c’est correct ?
Dramane : C’est la musique Mandingue.
PAN M 360 : Est-ce votre tradition, en fait, ou vous adorez ce genre musical ?
Dramane : Oui, c’est ma tradition.
PAN M 360 : Qui ou quoi ont été certains des inspirations?
Dramane : Salifou Keïta, tu connais? Il est du Mali. Salifou Keïta, Toumani Diabaté. Il y a beaucoup d’artistes qui m’inspirent et puis il y a un grand artiste aussi, Amadou Sodia qui m’a beaucoup inspiré.
PAN M 360 : Avez-vous expérimenté d’autres musiques comme la fusion ou la pop ou est-ce vraiment la musique traditionnelle qui vous parle le plus.
Dramane : Moi je fais un peu de tout. J’accompagne des groupes, les danses contemporaines, la musique moderne, jazz, blues. Oui, le jazz m’inspire beaucoup. Le jazz c’est la musique et moi vraiment ça m’apporte beaucoup de choses.
PAN M 360 : Et est-ce qu’on a beaucoup d’improvisation dans la musique que vous jouez aussi comme le jazz?
Dramane : Quand je fais des solos, je m’inspire beaucoup de la musique jazz. Ok. Jazz afro, un peu, de tout. Bien sûr.
PAN M 360 : Vous parlez avec beaucoup de passion et j’imagine que votre spectacle sera vraiment passionnant. Pour votre concert à Montréal, allez-vous interpréter l’album en entier?
Dramane : Oui, je vais jouer tout l’album avec un groupe sympa. Je ferai de mon mieux pour le 4 novembre. J’ai vraiment hâte de voir ça. Merci vraiment d’avoir parlé avec moi.
PAN M 360 : Est-ce qu’il reste quelque chose que vous aimeriez dire?
Dramane : Je veux dire merci. Je salue beaucoup le papa Touré, Touré du Balattou, vraiment c’est un papa qui m’a donné beaucoup de conseils, souvent j’ai des conseils, je pars chez lui et il m’a toujours pris comme son fils, il m’a considéré comme son fils, il m’a donné des conseils et je l’ai toujours senti comme sur mon père et vraiment je souhaite vraiment beaucoup l’envie à lui encore. Vraiment lui c’est le baobab, c’est le baobab de tous les Africains, tous les Québécois, tous les gens qui sont ici. Vraiment, on espère que Dieu leur donne une longue vie, que les artistes, on arrive toujours à s’exprimer, de donner tout ce qu’on sent, tout ce qu’on a envie d’en venir un jour, Inch’Allah. Vraiment. Et vous aussi, je vous salue. Ça m’a fait un grand, grand plaisir de me ‘’libérer » aussi. Voilà donc vraiment merci à vous et voilà j’ai remercié aussi René Pierre. Merci.
PAN M 360 : En vous souhaitant un spectacle incroyable Dramane. Merci encore d’avoir pris le temps.