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Mulchulation II, sorte de supergroupe indie québécois unifiant Population II et Mulch, connaît un franc succès avec l’EP Mulchulation II, paru l’automne dernier et dont les protagonistes se sont récemment produits à guichets fermés au Taverne Tour.
La rage rencontre le voyage dans un mélange entre le psychédélique et le hardcore !
Frôlant l’expérimental, empruntant des chemins à la fois libres et improvisés, le premier EP de Mulchulation II a été conçu pour être joué à haut volume et révèle le talent instrumental fusionné des deux groupes. De sa voix crue, l’inépuisable Rose Cormier y franchit un épais mur de son, elle crie à corps perdu ce qu’on peut imaginer comme étant un manifeste.
C’est cathartique et impressionnant, ça savonne les oreilles, ça navigue sur des guitares virtuoses et des mélodies macabres aux textures noise.
Pour mieux comprendre la créature mutante qu’est Mulchulation II, il faut rappeler ce que représentent ces deux groupes sur la scène montréalaise:
Mulch, un groupe récemment constitué, secoue la scène punk, amène au style hardcore des paroles honnêtes et une présence incomparable sur scène. Population II, devenu au fil des dernières années un groupe incontournable de la scène locale, résulte des entrechoquements musclés entre ses trois électrons libres dans des salles pleines. Voilà un mélange dangereusement excitant, on comprendra pourquoi le premier concert du groupe hybride fut donné à guichets fermés dans cadre de la tournée Taverne Tour, il y a quelques jours à l’Esco..
Je me suis assis avec Mulchulation II afin de mieux comprendre comment ce mutant s’est si vite emparé de la scène montréalaise.
PAN M 360: Avec un show qui affiche complet, c’est assez évident que le retour soit positif. On se demande tous quand sera le prochain, mais surtout, comptez-vous continuer à travailler ensemble ?
Sébaste (Basse, Population II) : On ne sait pas quand on va retravailler ensemble. Quand le mutant va vouloir ressortir, il va être présent. C’est vraiment unique comme projet et son idiosyncrasie demande d’être traité avec respect. Mulchulation II existe pour l’amitié et l’amour de jouer cette musique.
Rose (Vocals, Mulch) : Comme mentionné par Sébaste, nous n’avons pas pour l’instant, dans les plans de refaire un autre show comme celui de vendredi passé. Par contre nous avons tous encore certainement le désir de retravailler ensemble dans le futur, quand ce sera le temps. Sûrement sur un album encore plus collaboratif que celui-ci!
PAN M 360: Y a-t-il eu un moment où vous avez su que vous deviez faire ce projet ensemble ?
Rose : L’histoire veux que moi et les gars de Population II nous sommes ramassés au restaurant Fameux après leur show au Francos à l’été 2024 et que l’idée nous est venue autour d’un pizzaghetti.
J’étais certaine que c’était juste une idée lancée dans l’air comme ça, comme elles le sont souvent, mais 8 mois plus tard, on voit bien que non!
Au début on s’est dit qu’on essaierait de monter une toune avec moi au chant, toune fondée sur une ligne de basse que Sébaste avait dissimulée dans ses messages vocaux de cellulaire. Cette toune-là est devenue Laisse-Faire.
Ensuite c’était pas mal évident autant pour Mulch que pour Population II qu’un split, c’était quelque chose qui nous tentait vraiment, pour vrai de vrai! C’est quand même impressionnant que nous ayons réussi à écrire, enregistrer et sortir le split en à peu près 4 mois!!
PAN M 360: Les approches de Population II et Mulch se rencontrent à plusieurs niveaux, mais il y a aussi quelque chose de nouveau qui apparaît dans cette mutation. Y a-t-il des choses auxquelles vous ne vous attendiez pas et qui se sont produites ?
Timothy (guitare, Mulch) : C’était cool d’écrire du matériel qui fittait bien avec Population II sans changer notre son trop dramatiquement. Nous nous sommes donné le loisir d’explorer des territoires sonores que nous nous sentons peut-être moins à l’aise d’explorer d’habitude, et c’était pas mal le fun comme exercice! C’était aussi vraiment cool d’entendre Population II écrire des tounes plus heavy que d’habitude!
Rose : Des deux bords je crois que nous avons pris l’opportunité du split pour explorer un peu les genres musicaux de l’autre, et sortir de nos habitudes, comme dit Timothy. Le plus surprenant pour moi, c’est certainement notre toune Sans Sortie, une pièce de plus de huit minutes qui est non seulement la plus longue toune que Mulch ait jamais écrite, mais aussi celle qui sort le plus de notre genre habituel. C’est une pièce que j’affectionne beaucoup et je pense que nous allons vraiment essayer d’écrire d’autres choses dans ce genre!
PAN M 360: Ce n’est pas souvent qu’on entend parler de deux groupes qui travaillent ensemble. Comment avez-vous partagé les rôles dans le processus créatif, ou plus généralement, comment ça s’est passé ?
Timothy : Les albums collaboratifs sont pas mal communs dans l’univers du hardcore ou encore du noise et de la musique experiementale! Nous sommes tous pas mal familiers avec ces types de projets et nous voulions réaliser quelque chose dans ce genre de tradition. Ce qui faisait le plus de sens pour nous, avec le temps limité dont nous disposions, c’était d’écrire les chansons chacun de notre bord et d’essayer de collaborer là où ça semblait naturel. Nous n’avons malheureusement pas eu le temps de travailler sur des chansons les 2 bands ensemble donc beaucoup des bouts collaboratif était limités à ce qui était déjà en place, soit les chansons de Population II avec Rose dessus, et ce qui nous est venu comme idées lors de l’enregistrement, comme les twins guitars et les back vocals de Sébaste sur Déclin Soudain.
PAN M 360: En écoutant, on ressent un profond sentiment de désobéissance, mais aussi un laissez-faire. Dans vos mots, quels sont les thèmes souhaités dans ce projet ?
Rose : Les thèmes sont un peu éparpillés!
Cent Piasses, dont les paroles sont écrites par Pierre-Luc (Population II), c’est essentiellement une toune sur les snowbirds, ou les Québécois qui passent leurs hivers en Floride, alors que les 3 autres pièces avec les paroles écrites par moi sont assez lourdes et existentielles. C’est habituel dans les paroles de Mulch, je devais amener ça dans ce projet aussi. Crier fort c’est certainement un merveilleux exutoire pour mes pensées, ça libère le cerveau aussi!
Laisse-Faire, c’est en effet pas mal sur le thème du laissez-faire mais non pas dans la nonchalance à laquelle on pourrait penser. C’est plus sur le concept de laissez-faire des situations, ou des relations qui n’en valent pas la peine parce que toi ou l’autre, ou les deux, vous êtes perdus. De là les paroles “t’est mélée, t’est perdu, comment tu vas faire?” qui s’applique autant à moi qu’à d’autre monde.
Déclin Soudain suit un peu le même genre de trame narrative, mais de façon plus pessimiste en disant qu’il est trop tard pour remédier à quoi que ce soit, pis qu’on va être pris pour toujours dans nos cercles vicieux! Fun stuff!
Sans Sortie, c’est un vraiment long monologue existentiel que je n’avais pas écrit à l’avance! Je savais seulement que je voulais un mur de voix à la fin, sorte de point culminant de la chanson. Nous avons enregistré cette toune-là live off the floor (comme le split complet) en une seule prise de son, incluant les voix. Ce qui en est sorti des paroles est incroyablement brut.
PAN M 360: D’un point de vue stylistique, les termes “noise rock” et “hardcore” sont entre autres utilisés pour décrire votre son. Quelle est votre propre définition ?
Rose : Je crois que les 2 termes sont pas mal justes! Ni Mulch ni Population II sont des bands qui aiment se caser dans des genres, clairement, et nous sommes heureux comme ça!
Pour Mulch, le terme noise rock revient souvent, je crois que c’est un terme assez générique mais qui englobe bien tout ce que nous faisons! Le terme hardcore revenait plus souvent lorsque nous avons commencé, et lorsque nous avons sorti notre premier EP Nothing Grows Out Of Dried Flowers, mais il est vite tombé puisque nous avons vite inclus plusieurs autres influences dans notre musique! On continue de crier, par contre.
PAN M 360: En dehors de ce projet, comment décririez-vous la scène rock en ce moment au Québec ? Quels sont les groupes qui vous inspirent ?
Sébaste : À Montréal, la Sainte Trinité du punk : Faze, Puffer, Béton Armé/Spleen! Tout ce que Joe chez Celluloid Lunch sort, de Laughing à Retail Simps. Le songwriting d’Hélène Barbier et de Perma! Les amis de One Track Mind, Solids jusqu’au sapré bon noise rock de Pnoom.
Et les Mothland goodness : La Sécurité, Yoo Doo Right et Atsuko Chiba.
Montréal, c’est juste du bon en ce moment!
Timothy : La scène semble assez forte et durable.. Il y a eu une vague de groupes vraiment ennuyeux juste après la covid et ça semble s’être un peu éclairci donc on est dans une bien meilleure situation. Je pense que beaucoup de gens ont commencé des projets pendant le Covid et pour être honnête, beaucoup d’entre eux auraient dû rester dans leurs chambres.
Les meilleurs bands en ce moment: Pnoom, Psychic Armor, Show of Bedlam, A.T.E.R., Forensics, everything Ky Brooks does.
Rose : J’ajoute pas grand chose qui n’a pas déjà été dit mais oui, le rock se porte bien en ce moment! Il y a plus que jamais une ouverture à différents horizons musicaux! Les genres se côtoient de plus en plus, à mon plus grand plaisir. Je pense que c’est signe d’une scène en santé!
Sébaste et Timothy mentionnent déjà pas mal tous les bons groupes mais si je tiens à rajouter à leur longues listes 2 de mes groupes préférés de Montréal en ce moment : Zouz et Victime.
Et aussi sur ordre d’idée absolument pas rock, le nouvel album Nouveau Langage de N Nao, et l’album Abracadabra de Klô Pelgag sont probablement deux des plus importants albums à sortir de Montréal dans les dernières années.
Sinon des splits inspirants que vous devriez écouter : les splits de Full of Hell et The Body, le split de Full of Hell et Andrew Nolan ou le déjà très classique split de The Body et Big Brave.
PAN M 360: Que souhaitez-vous voir changer dans les prochaines années ?
Timothy : J’aimerais vraiment continuer de voir plus de shows avec des mixed bills, soit des shows avec des lineups plus éparpillés, avec des bands dont les genres ne se ressemblent pas!
Aussi, pas pour sonner comme un vieux grincheux mais j’aimerais que les jeunes comprennent plus l’étiquette des shows. Quand j’ai commencé dans la scène, il y avait un respect mutuel qui est peut-être disparu un peu depuis la covid. C’est bien sûr pas tous les jeunes qui sont comme ça, et ceux qui ne le sont pas sont ceux qui resteront dans la scène le plus longtemps.
Rose : Pour moi, non seulement j’aimerais continuer à voir plus de mixed bills comme l’a mentionné Timothy, mais j’aimerais vraiment voir plus de shows qui mélangent les scènes anglos et francos. Je côtoie de très près les deux scènes et c’est impressionnant à quel point l’une n’est pas au courant de ce qui se passe dans l’autre, alors que des trucs vraiment cool et important ce passe autant dans la scène anglo que dans la scène franco.
Y’a pleins de mes amis anglos qui n’avaient aucune idée de c’était qui Population II avant qu’on sorte le split, comme il y avait pleins de francos pas au courant de Mulch!
Tout le monde gagne à ce que nous faisions tous plus de choses ensemble.
PAN M 360: Quel est le message premier que vous aimeriez transmettre ?
Rose : Mulchulation II c’est un projet créé pour le fun, sans se soucier de profits, de maisons de disques ou de la réception du public. Je pense que c’est ça qu’il faut retenir. Faites de la musique avec vos amis parce que ça vous tente et que ça vous gratifie.
J’espère aussi que nous avons donné le goût à pleins de monde de faire des splits parce que pour vrai c’est vraiment, vraiment le fun!
PAN M 360: Dernière question, c’est quoi le pizzaghetti ?
Bon okay, c’est une question polarisante haha ! Le vrai de vrai pizzaghetti c’est une pizza avec du spaghetti dedans! Le faux pizzaghetti c’est une pizza coupée en 2 avec du spaghetti dans le milieu. Mais les vrais savent que ça c’est pas un pizzaghetti, c’est juste une pizza et un spaghetti.