Les 9 | Le pouvoir des violoncelles

Entrevue réalisée par Alain Brunet
Genres et styles : classique

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« Berlin a son Ensemble Les 12, Amsterdam Les 8, deux formations de violoncellistes concertistes qui font le tour du monde. C’est maintenant à Montréal d’avoir SON Ensemble. »  Le samedi 25 octobre, la Maison symphonique sera pleine pour accueillir Les 9, soit 8 violoncelles et une contrebasse sous la gouverne de Vincent Bélanger. Le lendemain à Québec, il en sera de même au Palais Montcalm. 

Le projet du violoncelliste québécois a germé il y a 5 ans au Festival de Lanaudière, l’ensemble dont il est ici question fut fondé l’année suivante, l’impact n’a cessé de croître depuis lors. Trois albums en témoignent dont le tout frais Nocturne, sorti sous étiquette GFN Productions et dont la matière sera la part congrue du programme ce week-end.

En toute courtoisie, Vincent Bélanger a répondu aux questions de PAN M 360 à la veille des concerts donnés à Montréal et Québec. On connaît peu d’ensembles nationaux ou internationaux fondés quasi exclusivement sur le violoncelle, bien que ceux mentionnés dans le préambule du texte officiel aient à l’évidence un impact important chez les mélomanes. Notre interviewé nous éclaire d’abord à ce titre.

Vincent Bélanger: L’ensemble de violoncelles est souvent utilisé dans un cadre académique. Il est coutume que tous les élèves d’un même professeur se réunissent pour jouer des œuvres de compositeur-violoncelliste du 19e siècle (comme David Popper, Julius Klengel) et des arrangements des grands classiques.

Les 12 de Berlin est, si on peut dire, l’un des premiers ensembles professionnels. Dans le cadre de mes études à Montpellier, avec mes collègues de l’époque, nous avions formé un ensemble de violoncelles. Cette idée m’est toujours restée. 

Gregory Charles, alors directeur du festival de Lanaudière, a eu vent de cette expérience et lorsqu’il à travaillé sur le programme Dode Cello, ensemble de douze violoncellistes qui fut présenté à l’été 2018 à L’Amphithéâtre Fernand-Lindsay, il m’a contacté et nous avons bâti le programme ensemble. En 2019, j’ai décidé de créer une formation réduite avec 8 violoncelles et l’addition d’une contrebasse. Traditionnellement,  le nom d’un orchestre de violoncelle contient un chiffre, ce fut donc Les 9 de Montréal.

PAN M 360 : « La formation réunit 8 violoncellistes et un contrebassiste, une union de jeunes virtuoses canadiens. »  Comment-avez vous sélectionné vos collègues? 

Vincent Bélanger: La plupart d’entre nous avons travaillé ensemble sur Dode Cello en 2018. Mon premier critère repose sur les qualités humaines. Dans la situation actuelle, les conditions ne sont pas toujours maximales et il arrive quelquefois des imprévus. Nous devons donc être en mesure de nous entraider rapidement malgré les difficultés. L’écoute aussi , en musique de chambre, c’est primordial. 

Mon objectif à moyen et long terme est de réaliser de grandes tournées au Canada et à l’étranger. Il est très important que le lien de confiance soit solide entre tous les membres. On ne veut pas de chicane en plein milieu d’une tournée!

PAN M 360 : Vos collègues ont-ils/elles des fonctions spécifiques dans l’orchestre ou encore les œuvres dictent-elles les choses à faire pour chacun.e?

Vincent Bélanger: En fait, les deux.

Certaines œuvres que nous avons à notre répertoire, comme le Concerto pour deux violoncelles de Vivaldi ,  Chant d’espoirs de Christian Thomas et nouvellement Nocturne  de Chopin, exigent un ou plusieurs violoncellistes concertants. 

Dans les œuvres d’ensemble, non concertantes donc, on peut diviser en deux quatuors : le premier étant plus mélodique et le deuxième plus plus rythmique et harmonique.

J’aime aussi explorer la spécialisation de chaque musicien: certains sont des références en musique ancienne, contemporaine, et d’autres sont aussi compositeurs et improvisateurs. D’ailleurs, à tous les concerts, il y a un moment d’improvisation, ce qui confère un moment unique à l’audience. 

PAN M 360 : Quel est la fonction de la contrebasse dans votre ensemble? On a vu une telle configuration avec Forestare, ensemble de guitares classiques avec contrebasse. Y a-t-il un lien à faire dans ce choix similaire?

Vincent Bélanger : La contrebasse donne de la stabilité et ajoute à la force de l’ensemble. C’est l’instrument qui passe partout. Et notre contrebassiste, Étienne Lafrance, est un véritable virtuose! Dans tous les styles en plus. Et il improvise comme un dieu! Au-delà du musicien, la personnalité d’Étienne nous inspire beaucoup. Musicalement, la contrebasse ajoute aussi une dimension orchestrale. C’est-à-dire qu’ à certains passages, on peut avoir l’impression d’être beaucoup plus que 9! 

PAN M 360 : Comment le son d’ensemble, soit la cohésion et le travail collectif, ont-ils progressé depuis les débuts des 9?

Vincent Bélanger : Depuis 2019, la cohésion et le son sont de plus en plus forts. Les membres sont stables, l’esprit de famille est plus fort. Et le public le ressent. Comme je l’ai souligné précédemment, c’est important pour moi. Si  nous n’avons aucuns plaisir sur scène, comment pouvons-nous espérer, avec un ensemble comme Les 9, en susciter chez  l’audience?

Demain, 25 novembre à La Maison symphonique de Montréal, nous serons à guichets fermés. En 3 ans, l’audience a doublé année après année. Nicholas Choinière de GFN Productions nous a bien compris et a grandement contribué à ce succès. En tant que fondateur et directeur musical, je suis très fier de ce grand travail d’équipe.

PAN M 360 : « La création des 9  pour but d’explorer l’univers musical original, unique et universel que le violoncelle embrasse. Les découvertes sont très présentes : grands classiques revisités et ou adaptés, musique ludique musique latine, compositions originales, parmi lesquelles  Adaptation, ou « le mouvement perpétuel de l’être en devenir » de Christian Thomas, bien connu du milieu théâtral montréalais pour ses nombreuses musiques de scène. »

Les compositeurs québécois Christian Thomas et Brigitte Bard se trouvent au même programme que Rameau, Saint-Saëns, Rachmaninov, Ravel, Chopin, Debussy, Fauré sont au programme de votre album Nocturne et, il va sans dire, de votre concert ce week-end. 

PAN M 360: Quel est le fil conducteur de votre éclectisme?

Vincent Bélanger: Le violoncelle. Et le goût de surprendre l’audience par ses capacités techniques et expressives!

PAN M 360: Présentez-vous exclusivement les pièces de votre album?

Non. Le programme contient 8 œuvres canadiennes sur un total de 14. 

Participer à l’ajout d’œuvres originales au répertoire d’ensemble de violoncelle fait partie de ma mission comme directeur musical. Christian Thomas est notre compositeur en résidence depuis 2019, nous créons 6 de ses œuvres. Brigitte Bard, compositrice du Kamouraska, nous a dédié Les Vagues. J’ai arrangé Exil de François Dompierre – cette œuvre fut créée par Angèle Dubeau et La Pietà, un ensemble qui m’a beaucoup inspiré.

PAN M 360: Pouvez-vous nous résumer l’aventure de l’enregistrement? Les séances? Le mix? 

Vincent Bélanger: C’était la 2e fois que Les 9 enregistrait à Mirabelle. Nous étions en terrain connu. Afin de solidifier l’esprit d’équipe, c’est devenu pour moi une tradition de cuisiner pour la gang. Je trouve que c’est plus intéressant  la nourriture maison que la restauration rapide. Ça donne toujours lieu à des moments de détente et de rire. L’enregistrement s’est très bien déroulé. Francis Choinière, qui a signé les somptueux arrangements, a aussi fait la réalisation. Son sens musical est très impressionnant. 

Philippe Bouvrette,  le preneur de son, avait une attitude très positive. Nous avons eu des moments magiques tout au long des sessions d’enregistrement. L’un des moments est lors de l’enregistrement de  Pavane pour une infante défunte  de Maurice Ravel. Il y avait beaucoup d’émotion. Dominique Beauséjour-Ostiguy et moi nous sommes regardés et il m’a lancé : « il me semble que je la jouerais encore et encore … »  

Je crois que ces moments s’entendent sur l’enregistrement.

Les 9 à la Maison symphonique, samedi, 19h30;

Les 9 au Palais Montcalm, dimanche, 19h30

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