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Crédit photo : Christian Zidouemba
« On est un peu pénalisés. C’est sûr [que les radios] vont prioriser les stars, les Drake et compagnie, à la place des artistes locaux. C’est ça, la différence, quand tu es un artiste anglophone québécois. » Koffee K est catégorique : le chemin vers le succès est plus âpre pour les rappeurs s’exprimant dans la langue de Shakespeare au Québec.
De son vrai nom Christian Zidouemba, il est d’avis que les artistes anglophones sont quelque peu écartés du regard du public québécois, « à moins de vraiment percer » à l’extérieur de la province. Il n’a pas tort, la marche est haute entre les histoires à succès à la Kaytranada ou Arcade Fire et les artistes D.I.Y. émergents.
Pour y remédier, Koffee K a lancé un premier monoplage en français en 2019, Diva.
« C’était pour me donner de la visibilité au Québec, et ça a quand même très bien fonctionné. » Il s’était alors taillé une place dans la sphère médiatique avec des entrevues dans plusieurs grands médias. « Je vais sûrement sortir une autre chanson en français en collaboration avec un artiste québécois (…), ça pourrait faire une corde de plus à mon arc. »
D’ailleurs, s’il devait retenir un terme pour se décrire, musicalement, il choisirait celui de polyvalence. « Ma musique, je dirais qu’elle peut correspondre à plusieurs vibes, avance-t-il. En grandissant, j’écoutais plein de styles de musique : électronique, rap, R&B, rock, métal, reggae, dancehall… Ça se reflète un peu dans ma polyvalence en tant qu’artiste. J’aimerais même un jour faire un album rock. Je voudrais explorer le plus de genres que je peux. »
Sa nouvelle chanson, Human Drug, se distingue d’ailleurs de sa discographie et de ses titres les plus écoutés, qui s’apparentent souvent à du trap plus léger. Dans cette sérénade R&B, Koffee K dépeint sa dépendance affective à l’égard de sa copine. « Quand on est en amour avec quelqu’un, on développe une habitude. Et quand on est coupé de cette personne, on peut être en sevrage », résume-t-il.
Il a récemment commencé à peaufiner son style pour écrire des chansons aux textes plus complexes, dans l’optique de pouvoir connecter encore plus avec son public. « Avec le temps, j’ai commencé à faire des chansons plus deep, quand je raconte des histoires où je parle de mes sentiments. Quelqu’un m’a déjà écrit un jour pour me dire qu’il avait des pensées suicidaires et qu’une de mes chansons l’avait aidé avec ça. Je suis content de pouvoir faire du bien et en même temps de faire ce qui me passionne », philosophe-t-il.
En consultant son profil Spotify, où plus de 50 000 personnes différentes l’écoutent chaque mois, on peut noter l’omniprésence de références à la drogue dans son œuvre, avec des titres comme Xans, Backwoods et Lotta Dope. Il n’a toutefois jamais eu l’intention de faire l’apologie ou la promotion de la consommation. « Au moment où j’ai publié Xans, je ne faisais plus de drogue. Ça va faire huit mois que j’ai arrêté de fumer. Toutes les chansons où j’en parle, ça fait partie de mon parcours (…), mais je ne veux pas en faire la publicité », se justifie-t-il.
Bien que KK produise et vende plusieurs instrumentaux à d’autres rappeurs, c’est le beatmaker allemand ALECTO, qu’il a rencontré sur la toile, qui compose et enregistre la majorité de ses morceaux. Ce n’est qu’en 2019, lors d’un voyage à Los Angeles, qu’il a pu lui serrer la main pour la première fois. Après l’appel d’un promoteur de club qui l’invitait à faire une performance dans son établissement, il s’était rendu en Californie. Il en avait profité pour tisser des liens avec plusieurs joueurs du milieu.
« Je ne pense pas que je vais devoir sortir du Québec pour atteindre mes objectifs. Il y a des artistes de Montréal sous contrat avec des grands labels qui font ça aujourd’hui. Mais je vais devoir y aller plus souvent, me faire des contacts, mener un genre de deuxième vie là-bas. Plus j’y pense, après le virus, je risque d’aller back and forth à L.A. », prévoit-il.
La pandémie de la COVID-19 a inévitablement eu des répercussions sur la carrière de Koffee K, qui était en pleine négociation avec plusieurs labels montréalais et américains. « Tout est au ralenti », se désole-t-il. En attendant de signer un contrat avec une maison de disques, il se contentera de publier des monoplages.
D’un point de vue local, le rappeur de 21 ans se désole du manque flagrant de solidarité entre les artistes hip-hop du 514. « Je dirais que la scène rap à Montréal, ce sont des gangs assez exclusives. Les gens ne s’entraident pas assez. Tout le monde veut être le Drake de Montréal, la première personne qui perce pour vrai et qui met Montréal sur la carte », critique-t-il. En comparaison avec des villes comme Atlanta ou Toronto, où Young Thug et Drake ont bâti des empires dans leur ville respective, les grandes pointures du rap québécois préfèrent souvent faire cavalier seul.
L’objectif ultime de Koffee K est de collaborer avec les artistes qu’il admire le plus : Travis Scott, Dom Kennedy ou Snoop Dogg, pour ne nommer que ceux-là. « Quand j’ai vu des artistes comme eux en show, j’ai réalisé qu’ils étaient des humains comme toi et moi. Ça m’a fait réaliser que c’était possible de travailler avec eux un jour. »
« Le tout, en représentant Montréal », espère-t-il.