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Crédit photo : Félix Renaud
Nourri au rap d’Alaclair Ensemble, FouKi, 21 ans, fait aujourd’hui partie de la même écurie que ses modèles, Disques 7ème Ciel. Et il n’a pas chômé ! À preuve, ses quatre albums au compteur, dont l’un avec Koriass. Sous le couvert de textes ludiques et de beats mélodiques et accrocheurs, il aborde en filigrane des thèmes délicats. Grignotines de luxe, album de douze pistes faisant suite à l’EP sorti il y a quelques semaines, fait la part belle à la voix chantée, aux cuivres, à la guitare et dévoile des structures proches de la pop et de la chanson. Une proposition décomplexée.
PAN M 360 : Tu affirmes que Grignotines de luxe est ton album le plus abouti, dis-nous en plus.
FouKi : Premièrement, du côté de la production, on a été cherché beaucoup plus d’instruments, puis aussi du côté des paroles. Il y a comme une ligne directrice dans l’album, plus qu’avec les précédents qui étaient peut-être un peu plus des ramassis de chansons. Cette fois-ci, je suis parti avec 3-4 morceaux, puis j’ai construit autour. Ça faisait longtemps que j’avais pas eu des « feels », comme on pourrait dire. Des fois, je réécoute Bijou, puis j’ai quand même des frissons.
PAN M 360 : On comprend clairement que le fil rouge, c’est la bouffe, peux-tu me parler de ça plus en détails ?
FouKi : C’est pas forcément juste un côté « faut qu’tu manges, vas-y, mange la bouffe, yeah, yeah » (rires). Je fais des sous-entendus, je ne fais pas juste parler de Crêpes sirop d’érable. J’ai remarqué que S.P.A.L.A, en show, ça marche que trop, le monde crie « Spaghetti pain à l’ail ! » Ça m’a fait penser que la bouffe, c’est un peu comme la musique : tu vas penser à un plat et ça va te ramener chez ta grand-mère quand t’étais jeune. J’ai voulu exploiter le côté imagé de la nourriture.
PAN M 360 : Concernant le morceau Crêpe sirop d’érable, c’est aussi une façon de parler de l’identité québécoise. Dans Bijou, tu l’abordes autrement, tu dis « J’suis un fucking pérégrin dans mon pays du Canada », peux-tu expliciter ton ressenti ?
FouKi : Je ne suis pas un hater du Canada, j’aime le Canada. C’est juste qu’il faut être au courant. J’ai été dans l’Ouest avec ma copine et j’ai rencontré des gens qui ne pensaient pas qu’on pouvait parler français au Québec. Ils ne savent juste pas, il y en a qui pensent qu’on parle anglais. C’est un mélange d’ignorance et de je-m’en-foutisme de la part des Canadiens qui ne sont pas des Québécois.
PAN M 360 : Est-ce que ton rap est une tribune pour mettre en valeur cette culture ?
FouKi : Tu sais, quand t’es un jeune artiste, tu cherches ton identité. Ça faisait partie de mes questionnements, « je pourrais rapper en anglais ou plus à la française ». À un moment donné, c’est pas juste mon identité personnelle, j’ai envie que ce soit québécois. Mon père vient de Baie-Comeau et ma mère du Lac-Saint-Jean, je suis né à Montréal, c’est un beau mélange. J’ai grandi dans la diversité culturelle, j’ai quand même mes racines québécoises.
PAN M 360 : Avec qui as-tu principalement travaillé sur cet album ?
FouKi : Beigne, c’est une chanson de Richard Beynon qui a fait Ciel (avec Alicia Moffet) aussi. Ce beat-là était censé être pour Kanye West et il a dormi dessus. Après ça, Marc Vincent a composé Table d’hôte en pensant à moi. À part sur Grignotines et PCU, où j’ai fait le beat à la base, c’est pas mal tout Michel (Quiet Mike) et Clément (le guitariste de Clay and Friends).
PAN M 360 : Tu as échantillonné la voix de Louis-José Houde qui avait fait un sketch très remarqué à ton sujet lors du Gala de l’ADISQ 2019, est-ce un hommage ?
FouKi : C’est à cause de lui tout ça. Le Gala 2019, tant qu’à moi, j’ai gagné pas mal plus qu’un Félix ou deux ou trois. Le sketch de Louis-José Houde, ça valait tous les Félix du monde ! Je trouvais ça drôle qu’il dise qu’un rappeur qui parle de grignotines, c’est out of this world, c’est pas cohérent. Ça m’a vraiment inspiré, j’ai voulu suivre le délire. Apparemment, il aime bien ma musique. On lui a envoyé la toune pour savoir s’il était d’accord et il était super down avec ça.
PANM : Ce n’est pas le seul échantillon de voix que tu as utilisé, dans Beigne, on entend « En vieillissant j’dis les mêmes shits que quand j’avais 16 ans / Mais maintenant en réunion j’suis pris au sérieux ». Qui est derrière et est-ce une analogie avec ton évolution dans le milieu du rap québécois ?
FouKi : C’est une histoire comique derrière ça. Je ne peux pas dire qui c’est, car j’ai essayé de lui envoyer la chanson, mais il.elle n’a pas répondu. Ça s’est passé au show de la Saint-Jean. La personne nous racontait une histoire à Émile Bilodeau et à moi et j’ai demandé pour l’enregistrer car c’était trop parfait. Elle m’a dit oui, mais m’a pas dit : « Vas-y mets ça sur ton album » (rires). C’est pour ça que j’ai high pitched sa voix de + 4 pour qu’on ne sache pas si c’est une femme ou un homme. Ça m’a tellement parlé, c’est tellement vrai ! Jeune, on n’est pas pris au sérieux, en vieillissant on gagne la reconnaissance de nos pairs et on peut réaliser des rêves d’enfance ou d’adolescence. Le show de la Saint-Jean, c’était vraiment un de mes highlights de 2020.
PAN M 360 : Un conseil culinaire pour celles et ceux qui liront cette entrevue ?
FouKi : Osez le piquant-sucré-salé !