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À quelques jours du concert-lancement de son album Dogue dans le cadre des Francos, nous avons pu nous entretenir avec Ariane Roy. Avant la soirée du mercredi 18 au Club Soda, on y parle notamment de la pression d’être une artiste solo, d’une tournée en France et du plaisir à composer tout en faisant du yogourt.
PAN M 360 : Dogue, c’est un album un peu plus sombre, synthétique, différent de medium plaisir. Était-ce une rupture consciente avec l’image un peu plus douce et chaleureuse que projette ton album précédent ?
Ariane Roy : C’est une bonne question. Est-ce conscient ou pas? Je pense que oui, c’est conscient, j’avais envie d’aller ailleurs. Mais ce n’est pas parce que je renie le passé ou que je veux que les gens me perçoivent autrement. Je pense que quelque chose d’autre m’appelait et j’avais envie qu’on ne me colle pas nécessairement une étiquette dès mon premier album, qu’on ne m’associe pas exclusivement à quelque chose.
PAN M 360 : Dans les paroles de Dogue, on sent aussi une prise de position féministe, comme dans la chanson Tous mes hommages. Dénoncer certains comportements, ça rend plus vulnérable ou est-ce plus libérateur ?
Ariane Roy : C’est vraiment plus libérateur pour moi. Ça laissait une place à la colère, à l’affirmation puis en même temps ça me permettait d’utiliser un ton moqueur, sarcastique. Je pense que ça fait un peu partie de moi: j’ai un humour noir, je suis quand même dans l’ironie, puis j’ai envie que ça se transpose dans ma musique. C’est comme si pour moi, la façon simple d’aborder des sujets plus crus, c’est utiliser l’autodérision ou la moquerie et m’amuser avec ça. Je sais pas à quel point je me suis posée la question « ok, j’ai envie que ce soit féministe », ça venait naturellement avec la femme que je suis en général je pense. Je me positionne comme très féministe dans la vie.
PAN M 360 : As-tu une chanson coup de cœur sur ton dernier album ?
Ariane Roy : Tous mes hommages a été une de mes préférées pendant longtemps. J’aime beaucoup cette chanson-là parce que c’est une chanson que j’aurais vraiment aimé écouter comme public. Je trouve que c’est le fun quand tu arrives à ça, tu te dis « moi si ça sortait, je serais vraiment contente de l’écouter ». Ça correspond vraiment à ce que j’aime, il y a les ruptures de ton, j’aime la ligne de basse. Je trouve que ça vient chercher dans le ventre et je trouve ça entraînant, puis en même temps, je trouve ça tendu comme chanson. Je l’ai composée très rapidement cette toune-là, on dirait qu’elle m’est venue naturellement, alors que d’autres chansons ont été plus difficiles à écrire. Je trouvais aussi qu’elle était très différente de tout ce que j’avais fait avant. Je suis contente d’avoir sorti ça.
PAN M 360 : Est-ce que t’as un processus de création bien établi ?
Ariane Roy : Ben je te dirais que c ‘est sûr que des fois c’est plus facile, on le sent, faut comme que t’arrêtes tout. Mettons que t’es en train de faire la vaisselle, c’est quelque chose qui se passe, tu t’en vas pis t’écris. Je pense que quand t’es en création, faut être à l’écoute de ces
moments-là, sauf que c’est important pour moi de show up to work chaque jour. C’est-à-dire que chaque jour, je m’assois à mon bureau, je teste des trucs, je vais sur Logic Pro. Il faut tout le temps que j’aie comme une phase exploratoire, même si j’ai pas nécessairement envie d’écrire ou de composer. Il y a une discipline que je dois m’imposer. J’ai besoin d’avoir l’impression qu’ il y a une structure dans mon travail pour sentir que ça sert à quelque chose, sinon j’ai beaucoup trop d’angoisse. Moi je suis facilement distraite, donc il faut que je mette les chances de mon bord. Je suis une bonne élève.
PAN M 360 : Généralement la musique vient-elle avant les paroles ou plutôt le contraire ?
Ariane Roy : Pour cet album-là, ça a vraiment été la musique qui est venue avant, tandis que medium plaisir, c’était pas mal l’inverse. Moi je fais du yogourt quand je compose des chansons, je chante mes mélodies avec des mots semi-anglophones inventés juste pour me donner une piste, pis ça fait en sorte que ça me mène ailleurs. Après, quand j’écris des textes en français, j’essaie de trouver des phonèmes qui ressemblent à ça ou qui ont un peu le même groove sur la musique, ce qui n’est vraiment pas facile. Des fois ça m’a pris 6 mois à écrire un texte. Je ne regrette pas d’avoir fonctionné comme ça parce que je pense que je n’aurais pas composé cet album si j’avais fonctionné autrement. Mais c’est vrai que ça a été une tâche difficile par moment, mais je pense que c’est instinctif pour moi de fonctionner comme ça.
PAN M 360 : En parlant du côté musicalité, tu as travaillé avec Félix Petit pour cet album. C’était comment de joindre vos deux univers musicaux?
Ariane Roy : Ça a vraiment été le fun parce que j’ai pris le temps de composer chez nous, essayer des trucs, trouver mon son, puis on dirait que quand la vision était un peu plus claire pour moi et que je savais où je m’en allais, ça s’est comme imposé. La personne avec qui je devais travailler, c’est Félix. Je suis très admirative de son travail et de ce qu’il a fait avec des artistes avant, puis je pense que Félix, c’est un gars brillant mais qui a aussi une sensibilité d’arrangeur. On s’était déjà rencontrés, mais on ne s’était quasiment jamais parlé avant, puis on a tout de suite commencé à faire de la musique. Je suis arrivée avec mes trucs, pis il m’a vraiment donné confiance en ma vision. Il m’a appris à avoir confiance en mes capacités. Ce que j’ai apprécié aussi, c’est qu’il a pas essayé de me dénaturer. Il a un instinct vraiment impressionnant, Félix. Avec lui, c’est des premiers jets, des premières idées qui sont vraiment hot et audacieuses et artistiquement ça a vraiment, vraiment cliqué.
PAN M 360 : Parlant de collaboration, la semaine passée, LaF a sorti une nouvelle version de leur chanson June avec un de tes couplets. Comment cette collaboration est-elle arrivée?
Ariane Roy : En fait, ce sont eux qui m’ont écrit pour que j’ajoute un verse justement. Leur idée c’était de ressortir June, mais d’une autre façon, on savait pas trop comment encore. Ils étaient comme « explore des affaires », un peu carte blanche, donc moi je leur ai fait un verse. J’ai fait ça chez nous, de mon côté et ils ont trouvé ça nice, donc on s’est rencontrés pour enregistrer ça ensemble. C’était vraiment le fun. Pour vrai, c ‘est vraiment une belle découverte LaF. C’est un
groupe que je connaissais, mais pas tant que ça, genre je leur avais jamais vraiment parlé en vrai. Je trouve ces personnes full brillantes, pis full smattes. C’est vraiment le fun de collaborer et je l’aime beaucoup cette chanson-là, fait que je suis contente qu’ils aient pensé à moi pour ça.
PAN M 360 : Et si on parle de collaboration, ça serait quoi ta collaboration de rêve?
Ariane Roy : Ma collaboration de rêve ça serait avec Saya Gray qui est une artiste torontoise que j’ai full écoutée dans les dernières années. Elle est vraiment inspirante pour moi. Ça arrivera sans doute jamais, vu qu’elle est rendue trop big, mais on sait jamais, je le lance dans l’univers pareil.
PAN M 360 : Tu lances Dogue à Montréal cette semaine dans le cadre des Francos. Comment se sent-on à quelques jours de donner un spectacle devant un Club Soda complet ?
Ariane Roy : J’ai vraiment hâte de faire le show et je suis contente qu’on ait eu le temps de le faire plusieurs fois avant aussi. Je suis un peu stressée, mais je suis plus dans l’excitation pour l’instant, il n ‘y a pas encore trop de stress. Ça va me faire du bien je pense d’être en contact avec la foule de Montréal, ça va être le fun !
PAN M 360 : Est-ce que tu as un rituel d’avant show ?
Ariane Roy : On a un bon rituel d’avant show. C’est un peu inspiré d’un rituel qu’on faisait avant le Roy, la Rose et le Lou[p]. On se met en cercle et on fait trois respirations. Après ça, un membre de notre band fait un discours motivateur comme si on allait faire une game de hockey, c’est vraiment un discours d’athlète. Après ça on a un call et c’est « Who let the dogs out » et là, le nombre de « ouh » qu’on fait, c’est le nombre de shows qu’on a déjà fait dans la tournée. Mettons que c’est notre huitième spectacle, on fait huit « ouh ». C’est ben compliqué, mais on fait ça avant tous les shows.
PAN M 360 : Tu reviens de Paris, j’ai vu que tu as fait un spectacle à la Cigale et tu étais déjà allée faire une petite tournée en France dans le passé. C’est comment de faire des spectacles à l’étranger?
Ariane Roy : C’est vraiment le fun ! C’est tout le temps un peu intimidant, parce que tu ne connais pas tant la réception des gens là-bas. Je veux dire, moi j’arrive là en étrangère, en inconnue aussi, mais pour l’instant, la réception est vraiment bonne. Ça a vraiment bien été. Je trouve que c’est le fun d’avoir tout à prouver quand les gens ne me connaissent pas. Moi j’ai comme pas d’attente quand je vais en Europe et je pense que ça m’aide beaucoup à trouver mon plaisir et à trouver ça moins stressant, parce que ça peut être intimidant quand même. Non, j’aime vraiment ça !
PAN M 360 : Finalement, qu’est-ce que ta tournée avec Le Roy, la Rose et le Lou[p] t’a appris ? Es-tu nostalgique de partir en tournée avec une grosse gang ?
Ariane Roy : Honnêtement, je ne me sens pas tant nostalgique, parce que ma tournée en ce moment, je la fais avec l’éclairagiste de Le Roy, la Rose et le Lou[p], alors qu’avant j’avais pas d’éclairagiste, donc on est plus qu’avant. On est quand même huit à partir en tournée, c’est déjà beaucoup. Mais je te dirais que ce que ça m’a appris d’être avec Le Roy, la Rose et le Lou[p], c’est que c’était extraordinaire quand même. Partir en gang en tournée avec des amis, c’est quand même un rêve. Ça prouve que c’est important d’être bien entouré, ça fait une différence. Je te dirais que ça m’a aussi montré que j’ai besoin d’avoir du monde autour de moi quand je pars en tournée, parce que je trouve que ça peut quand même être un métier qui nous fait nous sentir seule à certains moments. Moi ça m’arrive souvent de me sentir seule, parce que c’est beaucoup de pression à porter sur mes épaules. Je pense que quand tu fais le choix d’être un artiste solo, c’est normal, ça fait ça. Veut veut pas, il y a aussi des moments où on est en entrevue et on est plus seule, donc je les apprécie vraiment les moments où je suis avec mon band et que ça devient comme une famille. On porte ça ensemble quelque part et pour moi c’est très rassurant, donc ça m’a fait du bien d’avoir ça avec Le Roy, la Rose et le Lou[p]. Se confier et vivre ça ensemble, surtout qu’on partageait un show à trois, et non seule, ça change la donne.