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Tout amateur de trad québécois sait fort bien qu’Yves Lambert fut le chanteur emblématique de La Bottine souriante, vaisseau-phare du genre pendant des décennies avec qui le chanteur et accordéoniste a enregistré pas moins de 11 albums.
Le fameux groupe a certes survécu à sa démission il y a 20 ans et, de son côté, Yves Lambert n’a jamais cessé de créer depuis lors : 7 albums ont été confectionnés sous sa direction, un nouvel opus est d’ailleurs prévu pour le début 2024.
À 66 ans, Yves Lambert reste curieux, trippeux, rigoureux, toujours ouvert aux métissages stylistiques et culturels de la musique trad. Il nous présente cette fois le nouveau chapitre d’une trajectoire exemplaire, dont la première manifestation d’importance aura lieu ce samedi à la Fête de la Musique de Tremblant.
PAN M 360 : L’année passée, il y avait eu un gros orage au village de Mont-Tremblant, ton show avait été annulé.Tu reviens sur scène avec quel concept ?
Yves Lambert : Là, nous serons en quartette, un nouveau groupe avec des renforts. Mon quartette comprend (outre moi-même) Robin Boulianne au violon, Paul Audy aux guitares, Mathieu Royer à la contrebasse. Et pour le concert à Tremblant, quatre autres musiciennes et musiciens se joignent à nous, dont le flûtiste, saxophoniste Gabriel Schwartz qui arrange et réalise mon prochain album. Il y aura du basson, des clarinettes… Je voulais des bois plutôt que des cuivres! Les musiciens d’aujourd’hui n’ont jamais été aussi bons.Les arrangements de Gabriel sont tout simplement hallucinants. On travaille dans la qualité, mon ami.
PAN M 360 : Si je comprends bien, les arrangements fins et les métissages restent toujours au menu trad d’Yves Lambert!
Yves Lambert : J’ai besoin d’harmonie et de musicalité! Même en tant qu’autodidacte de la pire espèce, j’en ai passé des étapes ! J’en ai vu des musiciens, j’en ai travaillé des musiques différentes avec ben du monde. Et je suis un peu tanné des mêmes esthétiques. Mon travail, enfin c’est comme ça que je le vois, c’est d’essayer de trouver des nouvelles directions. Et c’est pourquoi je sortirai un nouvel album en janvier, cette fois plus doux, plus romantique.
PAN M 360 : Ton dernier enregistrement, Lâche-moi le tordeur, est sorti en novembre 2021. Il y a donc un vrai changement avec celui qui vient, et ce à quoi nous aurons droit!
Yves Lambert : Là, le processus est bien différent. Ça s’est fait sur deux ans. C’est smooth, ça se joue bien. J’y fais la chanson la plus longue de ma vie, une chanson sur la solitude et l’ennui. J’ai le goût de la profondeur. Le concept de l’album, ce sont des adaptations québécoises de l’époque de la chanson réaliste au Québec, soit il y a une centaine d’années.
PAN M 360 : Oui, comme en France à la même époque (Aristide Bruant, Fréhel, Damia, Édith Piaf, etc.) , il y avait effectivement une scène québécoise de la chanson réaliste.
Yves Lambert : Oui, exactement, dans les années 20. Alors jj’ai retracé des interprètes québécois de cette époque, comme Albert Marier. Ces artistes étaient professionnels ou semi-professionnels. Àa me sort du répertoire rural, d’une certaine façon.
PAN M 360 : C’est intéressant parce que c’est une approche moderne d’il y a 100 ans.
Yves Lambert : Exactement ! Je viens d’aller faire des photos en fin de semaine dans un aéroport en Ontario pour illustrer une chanson sur les débuts de l’aviation. Il y a plein d’affaires de même dans le nouvel album.
PAN M 360 : Le début de la modernité se fonde désormais dans la tradition, ça peut faire partie du répertoire trad.
Yves Lambert : Tout à fait. Et comme je dis, puisque j’ai le trad dans l’âme, je peux m’atteler à ce répertoire peu connu.
PAN M 360 : Vaste trad! Mais ce que tu présentes à Tremblant, ce sont plutôt les grands succès d’Yves Lambert avec des arrangements raffinés, c’est bien ça ?
Yves Lambert : Oui, je fais quand même deux tounes du prochain album et le reste des chansons originales proviennent de mon répertoire.
PAN M 360 : Il y a un côté party à cette soirée, n’est-ce pas annoncé comme La fête au village?
Yves Lambert : Ouais, mais c’est quand même un concert donné devant un public qui écoute. Ce public venu à cette Fête est quand même intéressé par la musique classique !
PAN M 360 : Alors quel sera le répertoire de la soirée ce samedi ?
Yves Lambert : Outre les deux nouvelles chansons de mon prochain album, il y aura un pot-pourri de chansons de Philippe Bruneau; tout orchestré aussi, c’est beau! Après ça, je tombe dans mon album précédent, notamment avec la chanson Au pays de Bill Wabo. Il y aura aussi Au bord du Lac Rond, la plus belle de Jean-Paul Guimond que j’avais récoltée chez lui, une chanson très symbolique sur l’amour de la terre natale. C’est tellement enraciné que c’en devient universel.
PAN M 360 : À part ça, tu as sûrement prévu des moments de fête, vu le thème officiel ce ce spectacle.
Yves Lambert : Pour une fois, on fait deux medleys de La Bottine souriante. On commence à les coller, ce serait impossible pour moi de ne pas les faire. Mick Jagger fait les mêmes chansons depuis 60 ans avec le même focus. Ça m’emballe de voir ça.
PAN M 360 : Beau mandat, tout de même!
Yves Lambert : Moi, je me sens encore privilégié! Dans le contexte actuel, si difficile pour les artistes, moi je travaille. J’ai plusieurs spectacles à venir cet automne, dont une quinzaine en décembre. J’en profite aussi, puis j’aime ça.
PAN M 360 : Pourquoi arrêter, au fait ? Pas question de s’arrêter. Sinon, quand on est vieux, le cerveau ramollit et on se met à radoter ses souvenirs et ses vieilles opinions. Ouash!
Yves Lambert : ETK, c’est dans ma musique que mon cerveau se trouve le plus en ordre. Autrement le désordre s’installe. Hahaha !