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L’artiste franco-colombienne Ëda Diaz nous a éblouis avec son premier album, Suave Bruta, qualifié d’« enivrant élixir » par Radio-France. Elle s’est confiée à nous, depuis Paris, sur ses identités musicales multiples et son parcours qui a mené à la création de Suave Bruta.
« C’est un album qui reflète mon identité multipolaire, qui voulait creuser cela musicalement, un mélange entre tradition et musique contemporaine », raconte Ëda Diaz, avec un regard lumineux. Ëda a grandi en France, née d’une maman bretonne et d’un papa colombien.
La musique a toujours été dans sa vie : « Mon père était un grand mélomane, il écoutait France-Musique le matin, puis Ella Fitzgerald ou encore Joe Arroyo (chanteur colombien très connu) en soirée. »
À partir de l’âge de huit ans, elle étudie le piano classique pendant plus d’une décennie. Mais, en parallèle, elle visite régulièrement la famille paternelle, à Medellín, ce qui la plonge dans la culture colombienne.
« Mes premières vraies émotions musicales sont venues en passant des après-midi à chanter avec ma grand-mère et mes cousines, autour d’un chocolat chaud ou d’un aguardiente », dit Ëda Diaz. C’est l’Amérique latine bien davantage que le conservatoire qui lui a donné envie de devenir musicienne.
Elle s’est aussi passionnée pour la littérature latino-américaine et espagnole. Musicalement, la contrebasse devient son principal instrument et elle découvre comment les effets électroniques peuvent en transformer le son. En 2017, elle réalise un premier EP, intitulé Ëda. « C’est là que j’ai commencé à explorer ce mélange de rythmes traditionnels avec la modernité. »
Il faudra du temps pour arriver à Suave Bruta, dont la réalisation a été ralentie par la pandémie. Mais ça valait la peine de patienter, car ce disque synthétise à merveille l’électronique, les sons naturels, et les multiples styles de musique de la Colombie : valletano, bullerengue, danzón, currulao ou bolero.
« La cumbia était le genre colombien qui était à la mode en France, mais j’en avais tellement d’autres en tête, que je voulais partager », dit Ëda. « Entre autres, toute la musique noire extraordinaire de la côte pacifique, négligée à cause du racisme structurel. Les mélanges entre autochtones, blancs et noirs sont très spéciaux. »
Ëda Diaz ajoute deux styles qui, au départ, ne viennent pas de Colombie, mais qui y occupent une place très importante : le boléro cubain et le tango argentin. Savez-vous que Medellín est la deuxième ville de tango au monde, derrière Buenos-Aires?
« Suave Bruta, c’est un dialogue entre musiques différentes, mais aussi entre moi et mon producteur Anthony Winzenrieth », affirme Ëda. « Nous sommes autant influencés par les musiques latines que par Bjork, Jeff Buckley, James Blake, Miles Davis. » Anthony Winzenrieth est un guitariste de jazz, claviériste et membre du groupe alternatif 3somesisters.
« C’est comme ça que nous sommes parvenus à faire notre version de ce qu’on pourrait appeler une French touch à la colombienne », raconte Ëda en souriant.
Suave Bruta paraît dans une période où la musique latine et espagnole sont en pleine ébullition. « Le succès international de Rosalia ouvre beaucoup de portes pour la musique alternative en espagnol », selon Ëda. « En Colombie, il y a Bomba Ésteréo, Las Anès, Lido Pimenta (qui vit à Toronto), Les Méridian Brothers. »
Ëda Diaz note également qu’en France, les mentalités changent : « Auparavant, il fallait que la musique hispanophone soit traditionnelle, les gens étaient fermés à des styles plus modernes ; je constate maintenant plus d’ouverture vers la pop et les styles contemporains. »
Suave Bruta a reçu des critiques élogieuses de nombreux médias français, mais également britanniques et canadiens.
Ëda Diaz espère venir sous nos latitudes le plus rapidement possible pour nous présenter sa musique en concert. Et nous le souhaitons également. Je serais très curieux d’entendre cette musique innovante sur scène.
Crédit photo : Misael Belt