renseignements supplémentaires
Événements à venir
Crédit photo : John Londono
Catherine Major, son conjoint Jean-François Moran et leurs quatre enfants vivent en Estrie depuis environ deux ans. À l’ère des désillusions et des grandes inquiétudes planétaires, ils font le pari de la vie : famille nombreuse, chansons multiples, indépendance professionnelle, cadre bucolique, parfum d’autarcie.
« On en a eu marre de vivre dans un troisième étage à Outremont, raconte Catherine, jointe chez elle. J’ai eu notre troisième enfant en ville, on s’est dit alors qu’il faudrait bouger de là. On avait besoin de terre, de campagne pour notre famille, c’est le meilleur move qu’on a fait. Et puis je suis tombée enceinte par surprise, j’ai eu mon quatrième enfant à la campagne. J’allaite encore Carmen ! C’est ben le fun, mais c’est ben de la job. »
Malgré la pandémie et ses impacts dramatiques sur l’économie de la culture, la vie continue et le couple Major-Moran entend bien la célébrer.
« Ça va plutôt bien professionnellement, enfin moins depuis la COVID-19. J’ai beaucoup de projets, je suis sollicitée sur plein d’affaires. Par exemple, j’ai fait Les sept péchés capitaux de Kurt Weill, aux côtés de l’Orchestre symphonique de Montréal dirigé par Kent Nagano. En plus d’écrire et de créer ses chansons, Jeff fait de la direction artistique à temps partiel chez Ad Litteram, une maison de disques et d’édition. »
Catherine et son conjoint sont très au fait de la conjoncture actuelle, ils ne se laissent pas abattre et gardent le cap.
« On essaie de ne pas être trop insécures. On a une grosse maison, il faut payer les factures et Jeff fait tous les travaux, rénove tout… On vient de passer huit semaines avec nos quatre enfants, 10 ans, 6 ans, 3 ans, et 9 mois. Moi je suis exigeante, je veux tout faire et ne rien laisser à moitié. Notre relation a beaucoup évolué, elle est meilleure qu’elle n’a jamais été. On a nos bibittes comme tout le monde, mais on avance vite, on avance bien. On n’est pas parfaits, on doit faire des compromis, on peut frapper des murs… des fois, on est à bout de souffle. On est pris pour être ensemble, aussi bien travailler ensemble ! »
Carte mère décrit bien la situation : Catherine Major est la mère incontestée de son projet discographique.
« J’ai commencé par m’ouvrir à l’idée de travailler seule, relate-t-elle. J’ai acheté un ordi, j’ai appris à maîtriser des logiciels de production, je me suis mise à gosser là-dedans, à jouer dans ces affaires-là. Auparavant, j’étais toujours à la merci des autres qui manipulaient les technologies pour moi; j’avais mon piano, mon crayon, mon papier, mes consignes, j’arrivais devant les musiciens avec une toune et je leur disais ce dont j’avais envie. Et puis je me suis tannée; il me fallait commencer quelque part pour être maître de mes productions. »
Pour la première fois, donc, Catherine Major a réalisé un album portant ses chansons.
« Je voulais partir de ça, et là finalement, c’était trop machines à mon goût, sauf la batterie de Martin Lavallée sur certaines chansons, avec claviers mais sans piano… Il me fallait revenir à un aspect organique. Est alors venue l’idée d’un orchestre symphonique, idée on ne peut plus organique, comme une ponctuation à l’environnement électronique.
« Ainsi, Antoine Gratton et moi avons écrit des orchestrations pendant plusieurs semaines. On a enregistré ça le 15 décembre dernier via Skype avec l’Orchestre symphonique de Bratislava. Ce fut le bonbon! Les arrangements originels (sans orchestre) dictaient déjà des lignes à respecter, l’album était déjà construit, l’ordre était déterminé pour que les choses s’emboîtent, pour que les chansons se fondent l’une dans l’autre. Claude Champagne a mixé le tout en respectant mes volontés. »
Catherine Major a composé les musiques, créé les arrangements et les orchestrations. Sauf exception, elle a confié le mandat des textes à son conjoint, parolier de haute volée.
« Jeff écrit super bien et il sait ce que je vis. Il est capable d’écrire des choses comme si c’est moi qui les ai vécues. Ça a été ça depuis le début du processus. Avec une grande précision, il a tout écrit sur des mélodies qui étaient déjà rythmées, il a respecté les onomatopées en les remplaçant par les mots et s’est arrangé pour que ça sonne, pour que les textes groovent. Jeff est mon chum, il est tellement proche de moi!
« Il est capable de mettre le doigt sur les affaires qui me concernent profondément. On a pris notre erre d’aller. J’ai pensé que ce serait le fun que ce soit lui tout le long à l’écriture des textes, sauf une chanson qui est un cri du cœur pour une amie morte du cancer – Tableau glacé. J’écris moins que je compose, je me sens plus aguerrie en musique qu’en littérature, mais en même temps, je suis contente de ce que je lis quand j’écris. »
Les textes de Carte mère s’inspirent du quotidien, des enjeux sociétaux de notre époque, des réflexions que suscite l’existence.
« La maternité est au centre de ma vie et c’est pourquoi l’album démarre avec la surprise de Carmen, ma petite dernière qui est arrivée en plein milieu de tout ça; l’émoi et la peur d’une nouvelle grossesse, le ventre, le centre, l’amour. Le reste de l’album est un voyage à travers des thèmes autour de la famille, l’amour, la fraternité, l’amitié, nos dépendances, la tolérance des signes religieux, les agressions faites aux femmes et aux hommes, la bêtise humaine en général, l’amour de ma petite sœur, la mort d’une amie. Ces thèmes sont à la fois très personnels et universels, ils trouvent une résonance chez les gens. On est tous pareils après tout ! »
Lorsque les concerts redeviendront socialement acceptables, Catherine Major compte bien sûr interpréter son nouveau répertoire. En mode symphonique?
« L’album s’y prête bien, répond-elle, d’autant plus que j’ai fait des projets symphoniques. En mai 2019, l’Orchestre symphonique de Québec sous la direction de Fabien Gabel m’a accompagnée. Nous avions fait quelques-unes des nouvelles et plusieurs de mon répertoire connu. Alors l’expérience symphonique pourrait être reprise, c’est dans les plans. D’ici là, il faut commencer par un lancement virtuel, en direct de chez moi. Pour y accéder, on paie 10 $ et on obtient l’album du coup. Oui, c’est payant, sans être cher. Il faut arrêter de penser que la culture est gratuite. Si on peut s’acheter une bouteille de vin, on peut certainement s’acheter un album. »