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Deux grands pianistes de concert, Alessio Bax et Lucille Chung, font de leur amour mutuel une merveilleuse occasion de s’épanouir sur le plan artistique. Leur mariage, manifestement réussi, les a conduits à former l’un des duos de pianistes les plus importants de leur génération.
Comme on peut le lire dans sa biographie, le pianiste Alessio Bax a remporté le premier prix des concours internationaux de piano de Leeds et de Hamamatsu et a bénéficié d’une bourse de carrière Avery Fisher en 2009. Le virtuose italien a joué en tant que soliste avec plus de 100 orchestres, dont les Orchestres philharmoniques de Londres et Royal, Dallas, Houston, l’orchestre symphonique NHK au Japon, l’orchestre philharmonique de Saint-Pétersbourg et l’orchestre symphonique de la ville de Birmingham.
Née à Montréal, la très talentueuse pianiste Lucille Chung a fait ses débuts à l’âge de 10 ans avec l’Orchestre symphonique de Montréal, alors dirigé par Charles Dutoit. Plus tard, elle a remporté le premier prix du très important Concours international de piano Stravinsky. Elle s’est produite en tant que soliste avec plus d’une soixantaine d’orchestres, dont l’Orchestre de Philadelphie, les Virtuoses de Moscou, l’Orchestre national du Pays de Galles de la BBC, l’Orchestre de la Radio flamande, l’Orchestre philharmonique de Séoul, l’Orchestre de chambre d’Israël, ainsi que tous les grands orchestres canadiens, pour ne citer que ceux-là.
En 2013, Bax & Chung enregistrait un premier album chez Signum Classics. Le répertoire au menu comprend la version originale à quatre mains du ballet Petrouchka de Stravinsky, avec des valses et des tangos de Brahms et de Piazzolla. En 2016, Bax & Chung ont rendu public Poulenc : œuvres pour piano solo et duo. Ils ont également enregistré l’intégrale des œuvres de György Ligeti pour piano à quatre mains et deux pianos sur Dynamic.
Ils viennent à Montréal pour jouer des œuvres arrangées pour quatre mains sur un clavier ou deux claviers distincts : Poulenc, Debussy, Ravel et Piazzolla figurent au programme dominical de la salle Pierre-Mercure.
PAN M 360 : Parlons un peu de ce programme, de la façon dont vous l’avez construit, et de ce que vous voulez en faire. Et où situez-vous cela dans l’évolution de ce duo ?
BAX : Il y a tellement de magnifique répertoire pour quatre mains et pour deux pianos. Vous savez aussi que nous avons des carrières séparées… Donc, petit à petit, au fil des années, nous explorons différentes parties du répertoire, en commençant par la musique germanique, puis la musique russe avec les suites de Rachmaninov et ensuite, petit à petit, la musique française, dont nous découvrons tant d’aspects différents, comme Ravel arrangé pour 2 pianos ou des miniatures qui mettent vraiment en valeur l’intimité des 4 mains sur un clavier.
PAN M 360: Ainsi, la musique française domine ce programme.
BAX : Oui, on a pensé à faire un programme en général, de musique française, mais le plus varié possible. On aime toujours avoir des programmes variés, un peu comme un repas ! C’est ainsi que ce programme a vu le jour et nous l’avons enregistré l’été dernier, à Londres. de Poulenc on joue une sonate pour piano à quatre mains, très courte, très compacte et très énergique, qui produit l’effet d’un feu d’artifice. Et puis Debussy, le cœur de sa musique pour moi dans ce programme, c’est le Prélude à l’après-midi d’un faune. C’est très spécial, parce que c’est Debussy arrangé par Ravel. En cours de route, d’ailleurs, Ravel a changé certaines choses. Et c’est très intéressant d’entendre les deux compositeurs dans ce même contexte.
PAN M 360 : Pouvons-nous être un peu plus précis sur les pièces ?
CHUNG : Oui. La sonate à quatre mains de Poulenc est une composition originale, très compacte, très rustique et assez simpliste. Vous savez, je l’aime parce qu’elle commence par un grand coup, un peu brusque même. Et je pense qu’elle reflète également nos personnalités. Il y a un beau mélange d’élégance et de rudesse, toujours dans une bonne mesure. Debussy La plus lente est un arrangement de Léon Roques et aussi un autre de Roques, La fille aux cheveux de lin.
BAX : Un arrangement très simple. Honnêtement, c’est ce que nous avons trouvé. Il n’y a rien de rajouté dans cet arrangement. Il est juste parfois d’avoir des arrangements qui ajoutent mais il est aussi juste de revenir à l’original,sans ajouts. C’est alors très intime et très pur, un reflet direct du compositeur.
CHUNG : Et le concerto pour deux pianos de Poulenc est une transcription de Poulenc lui-même, il y ajoute toutes les parties orchestrales que nous devons remplir. C’est intéressant comme démarche.
BAX : C’est aussi stimulant quand il n’y a pas tout d’emblée, lorsque nous ajoutons autres choses. Mais la plupart des éléments originaux sont maintenus et respectés même si nous en ajoutons quelques-uns. Ce qui est parfois un peu déroutant lorsque nous jouons ces oeuvres dans différents contextes dont celui-ci ! Ainsi nous alternons et c’est très bien ainsi. Je pense que nous connaissons le “système” de cette grande pièce. Et ça marche vraiment! Jouer avec orchestre c’est magnifique avec toutes ses couleurs, mais il ne vous manque pas outre-mesure avec deux pianos, parce que le contenu de la musique est si grand.
PAN M 360 : A propos de la musique d’Astor Piazolla que vous allez jouer ?
BAX : Pour les quatre mains, il y a de belles choses, par exemple Pablo Ziegler en a fait de très belles. Pour le plaisir, nous avons plutôt étudié un arrangement de base pour deux mains et nous avons commencé à partager cet arrangement et y ajouter des choses. Cette version s’est développée et a changé de concert en concert. En fait, nous embellissons et improvisons un peu à chaque fois, quelques différences apparaissent.
PAN M 360 : En tant que musiciens classiques, comment faites-vous face à l’improvisation ?
BAX : Nous ne sommes pas des musiciens de jazz, nous n’avons pas été éduqués musicalement à l’impro mais je pense que c’est une compétence étonnante pour nous de le faire en public et de le considérer comme une autre étape. C’est intéressant parce que pour improviser sur le même instrument et chanter au clavier, il y a des difficultés, y compris des difficultés très évidentes – quand nous décidons tous les deux de jouer les mêmes notes, ça ne va pas marcher ! Mais d’une manière ou d’une autre, la performance devient très excitante. Et nous l’avons fait tant de fois. C’est très excitant pour nous et pour le public, j’ose croire.
PAN M 360 : Plus précisément, quel est le défi de l’approche à 4 mains et 2 pianos ?
BAX : Je pense qu’il y a tout, toutes les belles choses et tous les défis, parce que les 4 mains et les 2 pianos sont un ensemble de défis complètement différents, et les plus et les moins et les difficultés. Cela dépend aussi de la musique jouée. Je veux dire, nous jouons Petrouchka, le ballet complet à 4 mains, c’est tellement difficile ! Ce programme, je pense, montre toute l’étendue de cette approche.
CHUNG : Toute l’étendue ! Je crois que c’est un peu plus intime quand on est à 4 mains ; ensemble, nous pouvons respirer plus simplement, vous savez. Et vous pouvez mieux comprendre le jeu de pédales quand il y a une distance, la distance physique entre les deux pianos. Je pense que cela aide, les œuvres sont un peu plus structurées ou plus verticales. Disons que le concerto de Poulenc est un peu plus vertical, par exemple. Mais puisque nous avons tous les deux joué la version solo, nous l’avons donc déjà assimilée avant de la jouer ensemble. Et je pense que cela nous aide beaucoup.
BAX : Il y a des choses incroyablement difficiles pour le piano à quatre mains , mai c’est le seul moment où l’on partage un instrument avec quelqu’un, vous savez, il n’y a rien d’autre de comparable dans la musique. Nous connaissons le jeu de l’autre, nous nous connaissons si bien que ça en devient une seconde nature. Néanmoins cela reste toujours très délicat pour les plus grands pianistes que d’arriver à cette symbiose. Par exemple, si Lucille joue le second rôle, elle pédale pour moi et elle ne sait pas quand je vais intervenir et ça se produit parfaitement ! De petites choses comme celle-là signifient que vous devez avoir une confiance totale dans ce qui va se passer. Vous devez vous sentir libre de suivre le courant et cela devient alors une expérience incroyable. Parfois même, j’ai l’impression de devenir un chanteur en interaction avec une pianiste incroyable !
PAN M 360 : Lorsque vous jouez en duo, préférez-vous l’approche à quatre mains ou à deux claviers ?
CHUNG : Nous aimons les deux.
BAX : C’est totalement différent. Vous savez, lorsqu’il s’agit de deux pianos, vous ne partagez pas les mêmes instruments. Et c’est ce qui nous passionne ! Je pense donc que ce programme montre plus ou moins toute la gamme des possibilités.
PAN M 360 : Comment voyez-vous vos propres personnalités pianistiques se retrouver ensemble ?
CHUNG : Tout d’abord, quand je joue, cela dépend de la musique, bien sûr, de la mélodie et de l’environnement. Mais en général, j’ai l’impression d’être un peu plus communicatif. Et lui est plus harmonieux. Et il laisse libre cours à la rencontre. Je pense que c’est un avantage. Et cela joue aussi dans nos vies personnelles.
BAX : Je ne pense pas que nous soyons très qualifiés pour expliquer cela. Mais je dirais que lorsqu’il s’agit de personnalité, on ne peut pas éviter ce que l’on est.
PAN M 360 : Bien sûr, et il est également intéressant de connaître la perception que l’artiste a de lui-même.
BAX : En fait, en pensant à votre question, pour un autre exemple, nous devons savoir parce que lorsque nous décidons de jouer un nouveau morceau, nous savons exactement qui va jouer à distance ou sans. Et puis on ne sait pas pourquoi on dit ok, ça va être quelque chose qu’on ne change jamais, on prend toujours une décision au début. Et il n’y a jamais de moment où l’on se demande pourquoi on n’essaierait pas l’autre solution pour savoir d’une manière ou d’une autre ce qu’il en est. Cela ne peut pas vraiment expliquer comment ou pourquoi nous arrivons à cette décision. Et nous le faisons simplement à l’unanimité.
PAN M 360 : Nous supposons que l’objectif principal est votre carrière individuelle, mais en même temps, vous êtes mariés, vous êtes un couple. D’une certaine manière, c’est une grande opportunité d’avoir une partie de votre vie professionnelle ensemble.
CHUNG : Vous l’avez bien dit, voilà ce que c’est. Nous voyageons, surtout en été, pour tous les festivals, c’est pour nous un moyen de communication très important, ainsi que pour l’enregistrement, à cause du répertoire. Et je pense que cela nous permet de rester ensemble et de garder le contact, parce qu’il y a beaucoup de temps où nous ne sommes pas ensemble. Cela permet à notre mariage de rester en bonne santé et à notre vie musicale de rester intéressante.
PROGRAMME
FRANCIS POULENC | Sonate pour piano quatre mains, FP 8 |
CLAUDE DEBUSSY | La plus lente, L.121 – Arrangement Léon Roques |
La fille aux cheveux de lin, L.117 – Arrangement Léon Roques | |
FRANCIS POULENC | Concerto en ré mineur pour deux pianos, FP 61 |
CLAUDE DEBUSSY | Prélude à l’après-midi d’un faune, L.86 – Arrangement Maurice Ravel |
Clair de lune, L.75 – Arrangement Henri Dutilleux | |
MAURICE RAVEL | La Valse, M.72 – Arrangement pour deux pianos du compositeur |
ASTOR PIAZZOLA – BAX & CHUNG | Trois Tangos : – Lo que vendrà – Milonga del Angel – Libertango |
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