November Ultra au cœur de la chambre forte

par Luc Marchessault

Une fois franchies les colonnes de l’ancienne succursale de la Banque de Montréal, on se retrouve dans ce qui fut sans doute sa chambre forte : le Ministère, pièce cubique et propice à la claustrophobie. Il y a sans doute là plus de gens au mètre carré que n’importe où ailleurs à Montréal, en cette soirée du 11 septembre 2022. Trois cents spectateurs, selon nos sources. Cet auditoire compacté et ponctuel accueille à bras ouverts l’auteure-compositrice-interprète montréalaise Alicia Clara, qui réchauffe habilement la salle à coups d’airs vaporeux.

Entracte, puis November Ultra se pointe, vêtue d’une robe de mariée et seule avec sa guitare. Le public semble gagné d’avance, réagissant fraternellement aux propos de la jeune musicienne française, reprenant en chœur ses refrains. Après Miel, une ballade de rupture qu’une amie voulait ironiquement qu’elle interprète au mariage de sa sœur, November Ultra enchaîne avec Thelma & Louise, chanson qui « finit mieux que le film ». November Ultra chante surtout dans la langue de Taylor Swift. À l’occasion, elle intègre des couplets en espagnol à ses pièces, comme dans Monomania et Soft & Tender. Et deux mots en français – « Ça ira » – dans Open Arms. Elle reprend également Maria de la O’, une chanson traditionnelle espagnole que lui a enseignée son papi Ramón, mentor musical qui a 90 ans et s’amuse sur TikTok.

Douée d’une voix d’or, c’est-à-dire juste, émouvante, puissante et nuancée, November Ultra œuvre au confluent du blues, de la pop-folk, de la blue-eyed soul et de la copla espagnole, sur les traces chansonnières de Bessie Smith, June Tabor, Dusty Springfield et Lola Flores. On sait qu’elle a fait dix ans de conservatoire, onze ans de piano classique, qu’elle a appris la guitare à l’oreille et qu’elle fait « des accords n’importe quoi », comme elle l’avait expliqué à notre collaboratrice Anne-Sophie Rasolo dans cette entrevue. « L’émotion prime sur la technicité », avait-elle aussi précisé.

Les interludes sont meublés de propos hilarants; c’est qu’elle parle, November Ultra. Ça va de Harry Styles aux « DM » (direct messages) sur Instagram, en passant par sa mère de 60 ans, par l’artiste conceptuel Robert Montgomery (qui a écrit « Les gens qu’on aime deviennent des fantômes à l’intérieur de nous ») et une foule d’autres sujets généralement personnels. Les gens aiment avec raison, car sa vivacité d’esprit est remarquable : « Vous allez voir, cette chanson est vraiment basée sur des faits réels, car les premières paroles sont “I talk too much” »…

La soirée s’est bellement terminée sur Soft & Tender (« Ça veut dire doux et tendre, et c’est aussi très joli en français »). La prochaine fois que cette jeune artiste extrêmement douée, sereine, drôle, attachante et en phase avec la pop mondiale haut de gamme se produira à Montréal, ce sera dans une salle beaucoup plus grande. Et les musicophiles qui ont bravé hier l’exiguïté et la chaleur étouffante du Ministère pourront dire que la première fois que November Ultra s’est pointée à Montréal, ils y étaient.

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