Une prestation en ligne enregistrée avec la caméra d’un téléphone est-elle appropriée pour TOUTES les œuvres ? Bien sûr que non. Selon le directeur artistique du Nouvel Ensemble Moderne (NEM), le constat de l’impasse du concert confiné est arrivé assez tôt : « On ne peut pas jouer en ligne, c’est impossible. Les œuvres de notre répertoire sont beaucoup trop complexes pour tenter de les synchroniser en direct sur des écrans chacun chez soi. »
Selon Normand Forget, le directeur artistique du Nouvel Ensemble Moderne (NEM), institution de la musique contemporaine au Québec, la musique de concert est fondamentalement un art vivant. Il relève au passage le paradoxe suivant : « Notre musique n’est pas faite pour le passage au numérique et c’est d’une étrangeté complète parce que on est considérés modernes! »
Le directeur artistique soutient par ailleurs que « c’est une erreur d’associer numérique à captation et production vidéo : l’art numérique englobe toute une série de pratiques exigeant un savoir spécialisé que les arts vivants ne possèdent pas. »
Le NEM a donc tout d’abord fait ce que la plupart des ensembles et organismes des arts vivants ont réalisé : « nous avons rendu accessible sur le web tout un pan de notre répertoire et des moments importants de notre parcours. » Le directeur artistique dit profiter de cette pause pour mener plus loin une réflexion plus vaste, amorcée depuis un moment déjà, concernant le rôle de la musique moderne, son accessibilité et le dialogue entre créateur et interprète.
« Cette crise rend la question de l’art plus pertinente. Les compositeurs n’auront pas le choix d’écrire des œuvres pour que les musiciens et les gens dans la salle apprécient leur expérience, ce qui amènera des initiatives, des changements de codes. Cela prendra des œuvres fortes pour ramener les gens dans les salles de concert », note Normand Forget au passage.
Pour ce qui est de la saison prochaine, bien des inconnues persistent.
Comme tous les artistes de la scène, le NEM est tout d’abord soumis aux directives gouvernementales. « Aussi, nous sommes en résidence à l’Université de Montréal, ce qui amène d’autres défis. Il faut suivre l’administration et collaborer avec tout le personnel pour poursuivre notre mission là-bas dans la mesure du possible. »
La direction artistique du NEM jongle donc depuis quelques mois avec plusieurs scénarios ainsi que des reports et des annulations au calendrier, « dépendant des règles, ce qui est assez difficile à imaginer parce que cela change presque au jour le jour. Silence, un concert qui comptait 100 artistes sur la scène, devra certainement être annulé. »
Des collaborations se profilent toutefois ainsi que de nouveaux projets, non plus pensés en termes de concert, mais d’événements diffusables en ligne. Et bien sûr des concerts vivants, mais imaginés sans public dans la salle, ou très peu.