Longtemps, le rap afro-britannique a difficilement traversé l’Atlantique, les choses ont commencé à changer lorsque que Skepta, à qui on doit la résurrection du grime, a remporté le Mercury Prize en 2016. Cinq ans plus tard ? En deux semaines de février, deux albums WOW ne sont-ils pas d’allégeance grime sur PAN M 360 ? Après Tyron de Slowthai, voilà ce captivant Conflict of Interest signé Ghetts, 36 ans, Justin Clarke de son vrai nom. Les connaisseurs de grime connaissent l’expérimenté MC depuis 2010, époque où la scène de East London le consacrait parmi les siens. Aujourd’hui, tout cityen de la nation rap doit s’incliner par ce raffinement du style grime, à l’origine fondé sur les styles électroniques anglais d’ascendance afro-caribéenne (dub, jungle, drum&bass, dubstep) et désormais mâtinés de soul/R&B, jazz , musique de chambre de tradition classique occidentale, chant choral et autres bandes originales à la John Barry. Wow ! Les voix superbes des diva black Emeli Sandé, Aida Lee, Moonchild Sanelly , Miraa May et Hamzaa , sans compter celle de la superstar Ed Sheeran, contribuent à élever la proposition de Ghetts côté chant soul. Côté boys club, on a droit à cet aréopage de grands MC britanniques tels Skepta, Stormzy, Giggs, Jaykae, Dave, Wretch32. Le beatmaking exceptionnel de cet album, surtout celui de Ten Billion Dreams et de BLK VYNL, sert des récits hyper-réalistes et consonants, réminiscence d’une existence difficile d’immigrés où il faut composer avec ses carences psychologiques, avec ses difficultés économiques, avec la délinquance et la criminalité. Justin Clarke ne s’en est probablement pas sorti indemne… mais assurément grandi en devenant Ghetts, maître du grime à n’en point douter.
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