Les secrets les mieux gardés de Montréal sont les « rodas de samba » ou cercles de samba, un rassemblement d’improvisation de chants et de danse. En effet, d’habitude ces soirées mythiques se passent depuis plusieurs années au Sans-Taverne, une brasserie au cœur du Bâtiment 7, à Pointe-Saint-Charles mais, cette fois-ci, c’était aux Brasseurs Avant-Garde, à Hochelaga.
Le concept est simple : plusieurs musiciens et chanteurs se mettent autour d’une table, et ensemble ils créent de la magie autour de la samba et autres rythmes brésiliens, pendant que le public chante en chœur et danse autour de la table. Ce concept est une initiative de Roda de Samba Sem Fim, un collectif brésilien qui est mené de main de maitre par Yussef Kahwage, lui-même musicien et chanteur. Il est épaulé par la grande chanteuse et guitariste Lissiene Neiva ainsi que Bianca Huguenin, toutes les deux faisant partie du noyau dur de la roda, aux côtés de Daniela Bertolucci, Bruno Lima, Gabriel Vacc, Márcio Rocha et Luís Santo.
C’est d’ailleurs souvent Yussef qui commence avec son instrument, avant que les autres musiciens n’embarquent, avec différentes sortes de percussions et autres instruments traditionnels brésiliens tels que des cavaquinhos. Sinon, c’était Tobias et sa guitare à sept cordes qui débutait, pour lancer la musique.
À peine arrivée, je remarque la présence de la grande chanteuse brésilienne Bïa en train de danser autour des musiciens, qui a chanté quelques morceaux de samba avant de se faire chanter « Bonne fête » par toute la salle. Une autre personne était venue fêter son anniversaire ce soir-là : Daiana Santos, des Bouchées Brésil.
Quelques minutes après, Thaynara Perí débarque un peu à la course avant d’aller s’installer autour de la table, une des chanteuses ce soir-là. Cette artiste est une boule d’énergie, elle est tout doucement en train de devenir une incontournable à Montréal, avec toutes ses implications comme artiste solo, mais également dans le collectif Tamboréal Samba Bloco, ou encore comme artiste invitée lors des rodas de samba. Dès qu’elle se met derrière le micro, l’ambiance monte d’un cran dans la salle, chantant plusieurs classiques anciens ou plus récents tels que Banho de Folhas de Luedji Luna, ou encore Figa de Guiné d’Alcione.
Pendant ce temps, les bières et la cachaça coulent à flot, pour garder cette roda festive et interactive et tout autour de la table, le cercle formé par le public devient de plus en plus grand.
Ces événements sont souvent à guichets fermés et c’était le cas ce soir-là, plusieurs personnes se voyant refoulées lorsqu’elles n’avaient pas acheté leur billet en avance.
Parmi les classiques mentionnés, nous avions entre autres Mal Acostumado, Não Deixa o Samba Morrer ou encore Serà que é amor, d’Arlindo Cruz, que j’affectionne particulièrement. Plus la soirée avançait, plus le public chantait de plus en plus fort, se laissant aller complètement.
Un DJ jamaïcain qui découvrait les rodas pour la première fois m’a confié qu’il ressentait beaucoup le côté spirituel de ce cercle. Il trouvait intéressant que tout ne tourne pas autour d’un seul artiste, mais que tout le monde crée ensemble.
Après une pause de quelques minutes durant laquelle la fameuse DJ Tati Garrafa a mis le feu dans ce lieu spacieux, la roda s’est poursuivie avec encore plus d’intensité durant la deuxième portion de la soirée. Thaynara est revenue avec d’autres morceaux, tout comme Yussef ainsi que d’autres chanteurs autour de la table. L’ambiance était tellement bonne que je me suis lancé le défi de chanter à ma première roda de samba. Défi relevé !
Lorsque j’ai quitté la soirée vers minuit, la piste était toujours aussi pleine. L’événement porte bien son nom: la roda de samba qui n’a pas de fin, ou alors qui a une fin trèèèèèès tardive.