Dans le cas qui nous occupe, la grande pianiste Hélène Grimaud n’y va pas par quatre chemins. La netteté, la fougue et la puissance de l’articulation de ses exécutions désamorcent ici toute impression d’élégance virtuose propre à Mozart qui peut aussi être perçue comme un excès de dentelle, agacement parmi les plus récurrents chez les détracteurs du prodigieux compositeur viennois. Cela étant dit, le discours à la fois très clair et très appuyé de la musicienne jette un éclairage intéressant sur les œuvres pour piano seul au programme. La même attitude est adoptée par la musicienne dans le Concerto n° 20 exécuté aux côtés de l’impeccable orchestre de chambre autrichien Camerata Salzburg. Autre particularité au programme, la Fantaisie en ré mineur sert de prélude au Concerto pour piano en ré mineur, Grimaud en omet la coda et attaque directement l’oeuvre suivante. On n’ira pas jusqu’à conclure à une transgression dans l’interprétation, peut-être les esprits les plus conformistes le feront-ils car Mozart se révèle ici sous un autre jour à travers le prisme d’Hélène Grimaud. Dénature-t-elle un tantinet la personnalité immanente de Wolfgang Amadeus ou encore en révèle-t-elle un trait de caractère insoupçonné ? À vous de choisir ! Le second volet de cet enregistrement est consacré à un compositeur vivant, l’Ukrainien Valentin Silvestrov : Two Dialogues With Postscript (en trois parties), avec orchestre de chambre, et The Messenger pour piano seul. Les références classiques et romantiques de ces œuvres calmes et introspectives cohabitent ici avec le minimalisme post-moderne de la facture d’ensemble. À savoir si les deux univers au menu appartiennent à la même galaxie, les avis risquent aussi d’être partagés sans qu’on puisse y voir quelque faute de goût.
