Le Concerto pour piano de l’Anglais Michael Tippett est l’un des grands titres du genre dans le répertoire du 20e siècle. On ne le connaît pas assez, mais cette éclatante captation de l’Orchestre philharmonique de Londres avec l’infatigable Steven Osborne comme soliste devrait vous convaincre. La partition pour piano est complètement dingue : ça n’arrête jamais! Julius Katchen, pas le dernier venu, l’avait qualifié ‘d’injouable’’ avant de claquer la porte juste avant la création en 1956. Le soliste (ici Osborne, spectaculaire et manifestement à la hauteur de la tâche) est sollicité de la première à la dernière minute par une écriture nerveuse et virtuose. Cela dit, très peu de grands gestes épanchés sont voulus par le compositeur. Plutôt un fourmillement incessant de notes qui se dévoilent souvent en cascades scintillantes. Osborne réussit le tour de force d’en faire une promenade fascinante, souvent abrupte, qui ne semble jamais ardue ou forcée. Tout à fait exceptionnel.
L’écriture orchestrale est du même genre, ce qui donne à l’œuvre dans son ensemble un aspect pointilliste et une luminosité vibrante. Le London Phil est superbe, sous une direction chirurgicale d’Edward Gardner.
La Symphonie no 2 navigue dans les mêmes eaux expressives, mais avec une dose supplémentaire d’onirisme (envoûtant Adagio molto e tranquillo) ou de féérie sarcastique (délicieuse dernière minute du Presto veloce). Les mouvements extérieurs sont énergisants et finement dessinés, comme des apparitions stravinskiennes, dans un format chambriste à plus grande échelle.
Certains considèrent cette sympĥonie comme une oeuvre de transition entre deux périodes distinctes de Tippett : la période initiale, lyrique (avec la Corelli Fantasia, par exemple) et la période suivante, plus austère (représentée par l’opéra King Priam). Pour ma part, je trouve réducteur de la qualifier ainsi. Cette symphonie est chronologiquement située à la jonction de deux parties importantes du développement artistique du compositeur, certes, mais elle demeure une pièce entière et d’une très belle cohérence. Le colorisme impressionniste et la beauté des lignes mélodiques se métamorphosent bellement en passages anguleux qui conservent néanmoins toute leur expressivité narrative.
Une très chaleureuse recommandation.