Arman Méliès, maître-chansonneur et docteur ès ambiances cybercafardeuses, nous avait proposé en 2018 Échappées Belles Vol. 1, recueil de reprises réussies des auteures-compositrices-interprètes Juliette Armanet, Fishbach, Blondino et Maissiat. Le revoici avec Roden Crater, album instrumental – outre quelques paroles sur Dans la mêlée –, premier volet d’une trilogie inspirée par la mythologie américaine qui comprendra aussi Basquiat’s Black Kingdom, un autre opus instrumental devant être lancé cet été, puis Laurel Canyon, un album de chansons prévu pour janvier 2021.
Méliès a composé ces neuf plages durant les deux dernières années, en s’inspirant de l’œuvre de James Turrell, artiste américain – également diplômé en mathématiques et en psychologie – qui explore la lumière et vit à Flagstaff en Arizona. Dans les années 1970, la Dia Art Foundation a acheté, au nom de Turrell, le fonds de terre où se trouve le cratère volcanique Roden (d’où le titre de l’album), dans le désert de l’Arizona. Turrell l’a transformé en une gigantesque installation-observatoire d’art lumineux.
Méliès a de la suite dans les idées puisqu’il s’était caché derrière l’alias Gran Volcano – le titre d’une des pièces de l’album – pour faire une prestation instrumentale, en 2012, et qu’une des pièces phares de son album Vertigone (2015) s’intitule Le volcan, même. Toutes les pièces de Roden Crater ont été exécutées aux synthés analogiques ou programmées, puis enregistrées par Arman Méliès. Seb Fouble, moitié du duo électro Remote, a mixé le tout.
Certains passages, dont la première moitié de Gran Volcano, rappellent les ambiances marmoréennes de l’album Casino (2008). De L’enfant qui marchait dans la couleur à The Sun In A Hole Part II en passant par Flagstaff, on a l’impression de suivre la trace d’un humanoïde qui erre dans un canyon; des tireurs embusqués braquent leurs pistolasers sur lui, mais on ne peut l’avertir du danger… Écouter ces sarabandes équivaut également à emprunter une haie d’honneur où, à l’infini, Terry Riley, John Carpenter, Brian Eno et Wendy Carlos font face à M83, Air, Burial et Com Truise.