Le groupe, existant depuis 2006, s’est récemment restructuré autour de la présence vibrante de Lynette Cerezo. Resurrectedinblack constitue le premier album qu’elle ait entièrement façonné. Il fait suite au EP sorti en novembre dernier sous l’étiquette cocréée par Cerezo et Alison Lewis (Zanias/Linea Aspera). Si la formation, provenant du post-punk, a toujours flirté avec l’expérimental et des sons plus industriels, la reprise par Cerezo a accéléré ces tendances, pour notre plus grand plaisir. L’album navigue entre des pièces sombres très entraînantes, explosant en scènes dignes de raves gothiques, atmosphères sonores glauques au possible, et surprises très prometteuses.
La recherche incessante d’incarnations esthétiques renouvelées, sonores et visuelles, est palpable. Cette volonté d’incarner le son se laisse voir et entendre : la voix même de Cerezo, tonnante, exagérée et dramatique, y contribue totalement. Ses performances vocales sont autant de sommations, lovées sur des rythmes entraînants ou des ambiances tribales et martiales.
Entre des pièces très fortes et dynamiques, telle Dry as Dust, au son rock gothique, et Industrial Waste, tout en désolation et en dignité, Cerezo nous surprend d’autant plus avec (A) Siren Calls, petit bijou de lamentation gothique. Sa voix hoquetante, faussement enfantine, se déploie sur une musique beaucoup plus calme, appuyée par des cordes cérémoniales, pour un résultat aussi singulier qu’envoûtant.
On dirait une sorcière officiant à quelque rituel dont la teneur nous échapperait : gestes codifiés, hermétiques, ésotériques. Or, sur In Ruins, dont le clip est une superposition d’images tirées des récentes manifestations américaines du mouvement Black Lives Matter, on comprend que la prêtresse ne conforte ni ne sublime la réalité, mais la confronte de toutes les manières possibles, créant de véritables chants de guerre et de libération. Excellent opus, d’une force de frappe esthétique et émotive indéniable.