Le piano dit néoclassique divise les mélomanes. Les connaisseurs de musique classique ou de jazz y déplorent un appauvrissement du langage pianistique, un retour aux formules faciles et aux mélodies parfumées à l’excès, pour ne citer que ces remarques récurrentes. Chez les fans de piano néoclassique, assurément majoritaires, ces considérations importent peu ou pas du tout. Pour eux, Ludovico Einaudi, Alexandra Stréliski, Nils Frahm, Jean-Michel Blais et autres Chilly Gonzalez sont d’authentiques déclencheurs de mélomanie. À ce titre, personne ne pourra les contredire.
Musiciens de leur temps, les pianistes néoclassiques sont enclins aux tendances pop, hip-hop, électro ou minimalistes du moment bien qu’ils soient de formation classique dont ils maîtrisent le langage. Leur niveau d’exécution est bien assez élevé pour que leurs fans n’y voient que du feu et même, dans un excès d’enthousiasme, les situent parmi les grands solistes internationaux. Autre avantage concurrentiel pour les pianistes néoclassiques de l’heure, ils ne s’imposent pas dans un contexte institutionnel mais bien dans un contexte pop. Leurs publics ne proviennent ni de la musique classique ni du jazz mais plutôt de l’indie pop, de l’indie rock, du hip-hop, de l’électro ou carrément de la pop. Personne n’a ici l’impression d’avoir à franchir quelque barrière élitiste lorsqu’il se découvre une passion pour les vedettes du néoclassicisme.
Considérons d’entrée de jeu que Sofiane Pamart est issu de cette famille élargie. Le communiqué promotionnel accompagnant la sortie de Planet Gold insiste sur une « diagonale » entre Frédéric Chopin et Keith Jarrett ou Bill Evans. Le sens rythmique du musicien français, en fait, est beaucoup plus classique occidental que jazz moderne. L’articulation de sa main droite est fluide mais aussi très… droite ! La main gauche l’est tout autant. Au-delà du contexte actuel de leur présentation, les figures choisies s’inscrivent dans l’esthétique romantique du XIXe siècle et dans celle de l’impressionnisme français à l’aube de la modernité – que tous les jazzmen modernes ont intégré, Bill Evans en est un exemple frappant.
On ne s’étonnera pas que Sofiane Pamart ait bossé avec moult artistes européens, essentiellement de la zone hip-hop – Koba LaD, Maes, Vald, Laylow, Dinos, Madd, Isha, Youv Dee, Rémy, 7 Jaws, Hugo TSR, Lord Esperanza, L’Or du Commun, Lonepsi, Scylla, Médine ou Aloïse Sauvage, Anaïde Rozam, Leo Walk, The Magician et Marina Kaye. À l’évidence, ce musicien de 28 ans a une solide expérience de scène. Très sollicité par le rap français, le « pianiste de référence » est forcément connu des fans de ces artistes. Il peut compter sur une importante fan base pour recruter de jeunes mélomanes attirés par de nouvelles expériences musicales. Force est de déduire que Sofiane Pamart est un déclencheur. Les titres de Planet Gold témoignent d’ailleurs de voyages internationaux effectués dans une onzaine de capitales, c’est dire l’activité professionnelle du principal intéressé, dont on peut aisément prédire beaucoup de succès pour toutes les raisons énoncées ci-dessus.