Un premier album solo pour un artiste lyrique, c’est un peu comme une carte de visite. C’est l’estampille qui vient introduire ses qualités vocales, son répertoire et même, dans certains cas, sa démarche artistique. Alors que certains optent pour une originalité désarmante (on passe entre autres au récent album d’Emily D’Angelo), d’autres préfèrent rester dans un répertoire « traditionnel » auquel ils apportent leur propre signature vocale.
Natif de l’archipel de Samoa, le ténor Pene Pati se classe dans cette dernière catégorie, sur son album au titre homonyme. Celui-ci est traversé de pages tirées d’opéras romantiques italiens et français à la fois connus et un peu plus obscurs, allant de Verdi à Gounod en passant par Rossini et Godard. Remarqué en 2017 pour sa performance dans Rigoletto avec l’Opéra de San Francisco, Pati revêt de nouveau les habits du Duc de Mantoue en ouverture de l’album. Avec l’indémodable La donna è mobile, c’est surtout l’air Possente amor qui capte notre attention dans ces premières plages. L’énergie et la fougue que Pati déploie avec grande aisance culminent, dans la cadence finale, par un contre-ré surprenant et étincelant. Après cette salve énergétique, le ténor samoan passe dans un registre plus introspectif et sentimental. En témoigne l’autre classique qu’est Una furtiva lagrima, tiré de L’elisir d’amore de Donizetti. Ou encore Ah! Lève-toi soleil de Roméo et Juliette de Gounod, où il fait ressortir son médium chaleureux et des aigus sensibles. Pati conclut son album dans la même sensibilité avec la fameuse berceuse tirée de l’opéra Jocelyn de Benjamin Godard, à l’esthétique mystique.
Sans être révolutionnaire dans son approche, Pene Pati, accompagné par les musiciens de l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine sous la direction d’Emmanuel Villaume, livre un hommage senti et cohérent au répertoire lyrique français et italien dans lequel il excelle et trouve son plaisir. Assurément une voix à surveiller.