Tjinder Singh et Ben Ayres du groupe Cornershop ne sont peut-être pas les musiciens les plus prolifiques – le dernier album original du groupe remonte à plus de dix ans – mais ils sont conséquents. La flore de leur jardin est familière, un mélange lumineux et généreux de spécimens indigènes (glam rock et Mersey beat, doux psychédélisme et folk-pop pastoral pour les balades du dimanche) et naturalisés (folk pendjabi et autres éléments desi, élégamment intégrés). Tout jardin a cependant ses mauvaises herbes, ses parasites et ses problèmes de prolifération. Le jardin anglais, comme bien d’autres, est en piteux état, contaminé par le nationalisme réactionnaire que l’ère Brexit n’a fait qu’aggraver. Cornershop conteste tout ça depuis des décennies – la photo de Morrissey brûlée par Singh en 1992 n’était pas un acte malveillant mais plutôt visionnaire. Leurs saillies sont toujours aussi acérées, comme dans Everywhere That Wog Army Roam, une réflexion sur le délit que constitue le fait d’être basané; le ton faussement détaché et amical de Singh ne fait qu’ajouter du mordant à son esprit cinglant et à ses jeux de mots. On retrouve bien sûr des moments fort réjouissants, d’autant que si certains s’évertuent à rabaisser leur voisin juste parce qu’il ne lui ressemble pas, ce n’est pas eux qui auront le dernier mot.
![](https://panm360.com/wp-content/uploads/2020/03/cornershop-england-is-a-garden.jpg)