On aime, chez Pan M, l’étiquette Lotophagus (de l’italien « lotto », qui signifie « sort », et du grec « phagos » qui signifie « manger »). Voici donc que ces mangeurs de sorts nous soumettent Dusk at Shadow Castle, titre mystico-gothique à souhait du créateur électroacoustique et éclectico-cryptique Drone Baron. Quand même, ce « Baron des bourdons » n’entend pas du tout à rire, pas plus que « Sa Majesté des mouches » de William Golding naguère. Dans ce parallèle entomologique boiteux, il ne faut pas interpréter l’acception « bourdon » comme l’insecte jaune et noir lui-même, mais comme le son continu qu’il produit (le « drone », en anglais). Notre Drone Baron nous en balance toute une trâlée, de ces notes graves tenues longtemps. Elles sont vibrantes, crépitantes et métalliques. Elles émanent de guitares, des percussions intemporelles les soulignent. Et elles sont inquiétantes. On ne s’en étonne pas, quand on lit que le concept qui sous-tend les six pièces de Dusk At Shadow Castle est le Moyen-Âge, plus précisément sa noirceur et sa violence. Dans Entering Jerusalem, on imagine aisément le sang que répandent les épées et qu’absorbe le sable. Dans Knights Of Pestilence, on se dit que les épidémies n’ont rien de jojo, mais qu’elles devaient tout de même être plus pénibles à vivre au 14e siècle. Dans Constantinople on arpente les passages mal famés de cette cité (qui, seule consolation, n’était pas sous le joug du père Erdogan à l’époque). The Betrayal et A Place Left in Ruins se passent d’explications. Seuls le titre Monastry et son air onirique évoquent quelque chose de relativement paisible. On remercie le Baron pour cette palpitante brunante au Château des Ombres.
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