Parmi les éléments de privation que le confinement a amenés, c’est la joie de pouvoir de partager des moments musicaux et l’activité de création qui a eu un fort impact sur les membres du Attacca Quartet Amy Schroeder et Domenic Salerni (violons), Nathan Schram (alto) et Andrew Yee (violoncelle). C’est pouvoir se retrouver et redonner un sens à ce sentiment de création qui anime ce nouvel opus.
Ensemble notamment reconnu pour ses interprétations du répertoire d’avant-garde, primé aux GRAMMY Awards en 2019 pour sa performance sur l’album Orange de Caroline Shaw (Pulitzer de musique ; 2013), l’Atttaca Quartet expérimenté avec la musique électronique sur l’album Real Life, début 2021. Il présente ici un album plus conventionnel, mais unique dans l’assemblage de son répertoire, aux antipodes du point de vue historique, en rassemblant des œuvres des compositeurs minimalistes Philip Glass et Arvo Pärt ainsi que des œuvres de la Renaissance de Dowland, Allegri, Bennet, Clemens non Papa, Gibbons et Marenzio. L’unité thématique que les interprètes font ressortir avec beaucoup de dextérité et une grande musicalité réside dans l’esthétique sonore sereine et quasi spirituelle de ces deux univers. On pourrait imaginer que de passer de Summa de Pärt au sensible Flow my Tears de Dowland détonnerait, mais il n’en est rien. Les lignes épurées des œuvres minimalistes se conjuguent et se fondent dans la richesse harmonique des compositeurs des XVIe et XVIIe siècles. Au cœur de l’œuvre on retrouve le Quatuor à cordes no 3 « Mishima » de Philip Glass avec sa rythmique circulaire, composée pour le film Mishima : A Life in Four Chapters (1985) de Paul Schrader, autour de la vie de l’écrivain japonais Yukio Mishima. Méditatif et à la fois plein de vitalité l’Attacca Quartet signe une autre belle réalisation sonore et cimente son approche, soit une redéfinition du quatuor à cordes et de son répertoire.