Sans Tony Allen qui vient de décéder (de causes indéterminées pour l’instant), l’afrobeat nigerian n’aurait jamais existé tel qu’on l’a connu des années 60 à aujourd’hui. Cet extraordinaire batteur fut plus qu’un sideman pour Fela Anikulapo Kuti (de 1968 à 1979), on lui doit la conception rythmique de l’afrobeat dont Fela a récolté le crédit… tout en admettant la contribution cruciale de son fameux batteur et directeur musical au sein du fameux groupe Africa 70, ce qui avait d’ailleurs causé un profond différend entre les deux musiciens. Tony Allen avait réclamé en vain une part de cette paternité, pour ensuite quitter le groupe et s’exiler en France où il a vécu jusqu’à sa mort.
L’afrobeat s’inspirait du funk afro-américain et du jazz, conférant à ces styles une touche africaine absolument distincte. La formidable impulsion rythmique donnée au groupe de Fela était une conception de Tony Allen (jeu singulier sur la caisse claire et au hi-hat tout en maintenant un très puissant back beat), conception reprise par les batteurs subséquents de Féla et tous les groupes d’allégeance afrobeat. De son côté, Tony Allen a progressivement migré vers des hybrides afro-jazz et des collaborations multiples avec des musiciens de plusieurs styles.
Tout récemment, il a collaboré avec le pionnier techno Jeff Mills pour un concert spécial donné à la Philharmonie de Paris – un nouvel album, Tomorrow Comes The Harvest, accompagne ce projet présenté sur scène. En 2016 et 2017, il rendait hommage au répertoire des Jazz Messengers et leur batteur Art Blakey, en témoignent ses propos succincts pour ne pas dire très brefs dans une interview accordée à La Presse.
Tony Allen fut actif sa vie durant, on a pu apprécier ses enregistrements, notamment sous étiquette Comet Records. Il a aussi travaillé auprès de Damon Albarn , soit au sein du supergroupe The Good, The Bad and the Queen, il a aussi bossé avec Albarn et le bassiste Flea pour le projet Rocket Juice and The Moon. En 2017, sa participation à l’album Yere Faga de la chanteuse malienne Oumou Sangaré fut remarquable. Sa collaboration avec feu le trompettiste sud-africain Hugh Masekela n’est pas non plus piquée des vers.