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Pour son deuxième album, le tandem synthwave Paupière a mis les bouchés doubles et vise plus haut. Julia Daigle (chant) et Pierre-Luc Bégin (percussion et clavier) nous présentent Sade Satie, offrande synthwave rendue publique le 7 mai. Les synthés explosifs et les rythmes engageants évoquent des sons typiques des années 80. Le groupe œuvre passionnément sur ce projet depuis 2017, on bat des paupières avec excitation en attendant la réaction du public. Pour faire mousser ce travail bel et bien fini, ils s’entretiennent avec PAN M 360.
PAN M 360: À la veille de la sortie de Sade Satie, comment vous sentez-vous?
JULIA DAIGLE: On est un peu fatigués, mais c’est vraiment une semaine de promo excitante. Un nouvel album, c’est toujours un saut dans le vide. On est fiers; on sort les yeux fermés, vraiment confiants de ce qu’on a fait et où on s’est rendus. On assume, et on a vraiment hâte que les gens puissent écouter notre travail.
PIERRE-LUC BÉGIN: En plus, avec la pandémie, on dirait qu’il ne se passe absolument rien et aujourd’hui, d’un coup, on enchaîne les entrevues! Mais pour moi, c’est déjà des vieilles chansons. J’ai envie de les lancer aux gens pour les laisser s’approprier le contenu. On les a ficelés méticuleusement.
PAN M 360: Depuis le son plus mélodieux de votre premier album, À Jamais Privé de Réponse, et le rythme plus dance-pop de votre EP Jettatura, quelle sont les nouveautés à observer sur Sade Satie ?
PIERRE-LUC BÉGIN: Dans l’album, il n’y a que des vraies batteries. Dans nos autres disques, c’était principalement du drum machine avec quelques insertions de vraie batterie. Là, le fondement est beaucoup plus dynamique. Souvent, avec une batterie automatique, même si on change un ou deux réglages, c’est un son qu’on a déjà entendu. Le jeu de chaque batterie physique est unique au moment où elle est utilisée. Les peaux seront tendues de telle façon, ton jeu va varier. Ça donnait beaucoup de souffle à l’album! Donc, c’est un beau mélange entre la machine et l’humain.
JULIA DAIGLE: Je dirais aussi que c’est un mélange de morceaux beaucoup plus vieux et d’autres finalisés bien plus récemment. Ça donne une spontanéité. Coeur Monarque, notre premier single, a été créé en 24 heures. L’exercice de composer à distance a aussi été unique pour nous. De plus, on garde une touche impersonnelle dans les paroles; depuis le début de Paupière, on s’est dit qu’on voulait éviter les textes au je et de vraiment présenter des histoires. Pourtant, les personnages de nos chansons finissent toujours un peu comme une représentation de nous. À travers ces personnages, on perd cette gêne de parler de nous-mêmes.
PIERRE-LUC BÉGIN: C’est toujours un peu ennuyeux de parler de soi à la première personne. C’est amusant si chaque auditeur peut trouver un sens qui lui est propre.
PAN M 360: Paupière utilise le synthé comme instrument principal, pourquoi?
PIERRE-LUC BÉGIN: Sur un synthé, tu peux ne pas savoir jouer un seul instrument et mettre ton doigt sur une note pour créer une musique d’ensemble. C’est un outil incroyable! N’importe qui avec une vision peut faire une symphonie avec un synthétiseur. Avec le Korg Polysix, par exemple, ça a été un coup de foudre. On s’inspire de Gary Numan, Depeche Mode un peu.
JULIA DAIGLE: Et Brian Eno.
PIERRE-LUC BÉGIN: Des artistes qui nous font oublier que ce sont des synthés et qui en exploitent les timbres pleinement. Avoir l’intuition du son, ça ne s’achète pas!
JULIA DAIGLE: Je trouve que les claviers ont un petit côté égalitaire; on n’a plus besoin de se payer un studio comme dans les années 70.
PIERRE-LUC BÉGIN: Un petit côté démocratique.
JULIA DAIGLE: Oui vraiment! Au début de Paupière, c’est juste ça qu’on avait avec la voix.
PAN M 360: Allez-vous continuer de chanter en français?
ENSEMBLE: OUI!
PIERRE-LUC BÉGIN: Je ne parle pas assez bien anglais!
JULIA DAIGLE: C’est un beau défi, la langue française. On l’a testée dans plusieurs pays qui ne parlent pas français et on a vu que le message passait assez bien. Ce qu’on veut dire est quand même là et le public le ressent bien.
PIERRE-LUC BÉGIN: C’est aussi amusant de jouer avec tous les codes de la langue française et de la phonétique pour faire comprendre notre musique.
PAN M 360: Vous venez tous deux de milieux artistiques différents. Quel est l’impact dans votre processus créatif ?
PIERRE-LUC BÉGIN: La musique, clairement, fait partie de mon processus. À la base je suis batteur, j’ai bifurqué vers le piano qui est une percussion théoriquement – constitué de marteaux qui frappent sur les cordes. J’ai appris en y apposant mes doigts sur les notes. Un ami m’a passé un synthé et avec ça, mes comptines sont devenues des hymnes. Je me considère rockeur avant tout, il y en a qui sont plus sérieux en studio, mais moi je veux sentir la musique.
JULIA DAIGLE: J’ai fait des études en art visuel, je crois que ça développe un certain instinct. Ça me permet de bâtir tout un univers qui va avec la musique. La musique est la plus grande surprise de ma vie et c’est Pierre-Luc qui m’y a initiée. Il m’a demandé si je voulais écrire un texte et le chanter. De la, ça a déboulé assez vite. J’ai aimé toutes les étapes; la composition, le studio, choisir les collaborateurs. J’ai envie de faire des œuvres cohérentes avec tout ça.
PIERRE-LUC BÉGIN: Que tu fasses une toile ou une chanson, c’est toujours une question d’équilibre. Les notes et les sons, c’est l’équivalent des couleurs. Chaque forme d’art est similaire à la base.
JULIA DAIGLE: Peut-être qu’un arrière-plan en art visuel,ça offre une approche un peu plus libre et personnelle.
PAN M 360: Il y a quand même quelques chansons agressives dans cet album soi disant pop, par exemple Visite en territoire hostile. Anachronique ?
PIERRE-LUC BÉGIN: Eh bien, c’était un peu pour donner un aperçu de notre processus créatif. C’est le genre de chanson qu’on n’a pas souvent l’occasion d’entendre, je trouvais que ça créait un pont entre deux morceaux. Ça empêche les gens de s’endormir !
JULIA DAIGLE: Aussi, c’est pour permettre une chorégraphie en direct. Quelque chose d’un peu plus cinématographique qui nous garde alertes. C’est dommage qu’avec les spectacles pendant la pandémie, les gens ne peuvent ni danser ni se lever, donc on perd un peu l’effet.
PAN M 360: Quand on pense à Paupière, on imagine un son glamour et lumineux, comptez vous garder ce style?
PIERRE-LUC BÉGIN: Oui, il y aura peut-être des différences. On ne peut pas faire de la musique triste et monochrome comme d’autres le font.
JULIA DAIGLE: On aime explorer et on veut continuer.
PIERRE-LUC BÉGIN: Idéalement, les meilleures chansons te font voyager un peu partout et c’est ça qu’on essaie de faire !