Ravis par Coltrane, subjugués par Holanda

par Frédéric Cardin

Un concert envoûtant, divisé en deux temps aussi contrastés que complémentaires, mais unifiés par un même sens de la transcendance musicale. Voilà ce à quoi nous ont conviés d’abord Hamilton de Holanda, véritable Paganini/McLaughlin du bandolim, petite mandoline pas plus grosse qu’un banjo, mais dont les possibilités coloristes et dynamiques semblent infinies dans les mains de cet artiste brésilien d’exception. Poète de cet instrument, aussi bien que pilote effréné, Holanda nous a proposé une cinquantaine de minutes de bonheur et de montagnes russes musicales avec son seul outil, en plein milieu de la scène chaleureusement éclairée de la Maison symphonique.

Ce chef-d’œuvre acoustique était l’écrin parfait pour rendre intelligibles toutes les notes, même 50 à la seconde, déversées par ce virtuose surnaturel. Virtuosité improbable, certes, mais entièrement dédiée à une expressivité concentrée, directe et accueillie insatiablement par un public conquis. À l’image du grand Villa-Lobos, Holanda a fait du genre traditionnel du Brésil, le choro, son véhicule préféré. En y mélangeant, tout comme Villa-Lobos aussi, des éléments de musique savante (Bach, ainsi qu’un de ses propres 24 Caprices, inspirés de Paganini), de musique populaire et de jazz très personnel, il en a fait un langage unique de notre époque. 

Ravis par Ravi

Beau contraste qui nous a préparé à l’arrivée du quintette attendu de la soirée, celui de Ravi Coltrane, avec ses compagnons David Gilmore à la guitare, Gadi Lehavi au piano et à l’orgue, Dezron Douglas à la contrebasse et Élé Howell la batterie. Le principe était celui d’un hommage à la musique ‘’cosmique, mystique, spirituelle’’ de ses parents John et Alice. On est d’abord un peu surpris de la pudeur de ce que l’on voit sur la scène, compte tenu des extravagances instrumentales utilisées par maman Alice. Il faut dire que l’hommage a été majoritairement offert à John. Déjà, dès la première pièce, le ton est donné : nous sommes dans un espace sonore qui emplit la salle, qui la cajole et s’y love comme en symbiose. On était presque dans Debussy symphonique. 

Le voyage astral prend de l’ampleur et s’épanouit, doucement, inexorablement, jusqu’à saturation des textures, mais sans jamais perdre un sentiment de plénitude bienveillante. On imagine une immense nébuleuse, somptueusement teintée de couleurs chaudes, s’étendre devant l’œil captif du télescope Hubble. Nous sommes aux premières loges. On est quelque part entre Ballads et Interstellar, deux absolus (et très différents) chefs-d’œuvre du grand John. Encore une fois, la Maison symphonique s’avère un vaisseau parfait pour cette richissime expressivité sonore. Cela dit, le résultat final est un hommage assez poli en fin de compte. Ce n’est que lors de la dernière escapade qu’on a retrouvé la ferveur pleine de fulgurance qu’on pouvait associer, également, à la musique ‘’cosmique- spirituelle’’ de Coltrane père et mère. Poli, l’hommage? Peut-être. Mais on a été totalement ravis quand même.

Tout le contenu 360

Akousma | Musicfriend, mémoire différée, rémanence…

Akousma | Musicfriend, mémoire différée, rémanence…

Akousma | Zones de combat, plongée sous-marine, extrapolations aviaires…

Akousma | Zones de combat, plongée sous-marine, extrapolations aviaires…

Akousma | Ludwig Berger : la musique des arbres qui chantent et des époques lointaines

Akousma | Ludwig Berger : la musique des arbres qui chantent et des époques lointaines

Akousma | Monique Jean cherche toujours

Akousma | Monique Jean cherche toujours

AKOUSMA | Estelle Schorpp et la recherche-création

AKOUSMA | Estelle Schorpp et la recherche-création

Poirier – Quiet Revolution

Poirier – Quiet Revolution

Akousma | Vivian Li et les propriétés thérapeutiques du son

Akousma | Vivian Li et les propriétés thérapeutiques du son

Tire le coyote – Dynastie

Tire le coyote – Dynastie

1Q84 de Sahara von Hattenberger : pensée positive et mondes parallèles

1Q84 de Sahara von Hattenberger : pensée positive et mondes parallèles

Sahara von Hattenberger – 1Q84

Sahara von Hattenberger – 1Q84

Intégrale Scelsi du Quatuor Molinari : la goutte qui fait déborder la musique

Intégrale Scelsi du Quatuor Molinari : la goutte qui fait déborder la musique

Quatuor Molinari – Scelsi : Intégrale des quatuors/Trio à cordes

Quatuor Molinari – Scelsi : Intégrale des quatuors/Trio à cordes

Akousma | Olivier Alary, de Björk à l’IA

Akousma | Olivier Alary, de Björk à l’IA

Céu vient présenter Novela au public montréalais

Céu vient présenter Novela au public montréalais

Centre PHI | FYEAR, explosion poétique dans un octuor de puissance

Centre PHI | FYEAR, explosion poétique dans un octuor de puissance

Arion Orchestre Baroque et SMAM | Et la royauté fut comblée !

Arion Orchestre Baroque et SMAM | Et la royauté fut comblée !

Akousma | 23e édition présentée par son directeur artistique

Akousma | 23e édition présentée par son directeur artistique

Les Violons du Roy | Émotions et plaisir avec une voix tranchante pour Bach

Les Violons du Roy | Émotions et plaisir avec une voix tranchante pour Bach

Ensemble Caprice | JSB, humour, pertinence, vrai et faux intrus…

Ensemble Caprice | JSB, humour, pertinence, vrai et faux intrus…

Eldritch Priest – Dormitive Virtue

Eldritch Priest – Dormitive Virtue

Francis Grégoire – Prologue

Francis Grégoire – Prologue

Ivan Mazuze – Penuka

Ivan Mazuze – Penuka

Amir Amiri Ensemble – Ajdad Ancestors : Echoes of Persia

Amir Amiri Ensemble – Ajdad Ancestors : Echoes of Persia

Julien Fillion – ego

Julien Fillion – ego

Inscrivez-vous à l'infolettre