Deux décennies de pratique musicale ont conduit Patrick Watson à mobiliser et nourrir les âmes d’un auditoire fidèle. Ce rendez-vous hivernal fixé par le Montréalais a permis la poursuite de cette relation fervente. Une fois de plus constaté au MTELUS, en ce premier week-end de février.
Ainsi, le musicien nous a invité à poursuivre sa route à ses côtés, sans toutefois présenter un lot important de matière récente. Parlons plutôt d’un programme impliquant plusieurs classiques. Spectacle comfort food, donc, sans surprises majeures sauf les improvisations et jeux d’appels et réponses avec l’auditoire imaginés sur place.
Nous avons passé une paire d’heures fort nourrissantes devant cette exécution décontractée, émaillée d’humour, d’arrangements renouvelés et de collaborations spéciales.
On a pu effectivement entendre les chanteuses Lisa LeBlanc (en première partie folkie et pendant le concert), Ariel Engle (La Force) et Ourielle Auvé (Ouri) qui a troqué à cette occasion le beatmaking électro pour la voix et le violoncelle. Le personnel du chanteur et claviériste était constitué du batteur Olivier Fairfield (Fet.Nat, Timber Timbre, Andy Shauf, Leif Vollebekk ), du bassiste Mishka Stein (Teke::Teke, entre autres) et un quatuor à cordes (Yubin Kim et Robert Margaryan, violons, Jérémie Cloutier, violoncelle, Lana Tomlin, alto).
Les rideaux étaient fermés lorsque le piano impressionniste et la voix de tête de l’interprète ont imposé le silence dans la salle. Quelques dizaines de secondes se sont écoulées, le rideau de scène s’est ouvert, les musiciens sont apparus, on pouvait contempler de grandes toiles de tulle derrière eux.
Sur un rythme moderato, on enchaîne avec Dream For Dreamin, assorti d’un pont de vocalises bien senties et de cordes trop peu intelligibles dans le crescendo final. Toujours un contrat exigeant pour un sonorisateur que de faire sonner les cordes acoustiques avec basse, batterie et claviers amplifiés… Mais bon, les choses se sont améliorées au fil de la prestation.
Wave , chanson titre de l’avant dernier album, arrive au programme, précédée de quelques états d’âme watsoniens et de rires transylvaniens. La ballade orchestrale est teinte des couleurs d’un piano préparé. On reste dans la douceur vocale, cette fois ponctuée de cordes pizzicatos avec une autre chanson titre, celle de l’album Wooden Arms.
Assorti d’un fort beau complément vocal du contre-ténor, cette valse est une des nombreuses occasions de saisir les influences harmoniques, clairement impressionnistes (Ravel, Debussy, Satie), de Pat Watson. C’est d’autant plus patent avec la ballade Ode to Vivian, inspirée de la photographe américaine Vivian Maier. On se dit alors que PW pourrait explorer d’autres harmonies mais… on sait que les compositeurs de chansons dérogent rarement à la collection d’accords ayant défini leur style.
Le chanteur poursuit avec To Build a Home, qu’il avait créé avec la formation Cinematic Orchestra. Nous voilà replongés dans la grande époque indie d’où sont issus la majorité des fans présents – 35-40 ans et plus.
Puis c’est au tour de la ballade Melody Noir de séduire, inspirée cette fois du Vénézuélien Simon Diaz, et interprétée de concert avec La Force. Cette dernière occupe encore plus d’espace sur scène avec le fondu enchaîné qui suit, soit Love Song For Robots et Height Of A Feeling, créée et enregistrée en tandem. L’occasion est belle pour l’interprétation de How Do You Love A Man, une chanson indie folk signée La Force.Dans le même esprit, il est de bon ton de choisir l’interprétation de Lost With You en version musique de chambre. Le public se met à taper des mains, comme s’il réclamait poliment un peu plus de muscle, un rythme binaire se déploie alors, une mélodie vagabonde le survole : Drifters.
Ouri et son violoncelle sont convoqués aux devants de la scène. Connue pour ses productions électroniques, Ouri a visiblement reçu une formation classique avant de se mettre à l’électro, mais c’est une rare fois où l’on peut en prendre la pleine mesure, soit avec la pièce In Circles, assortie de vocalises et coups d’archets. Simple et beau.
Un peu plus loin, PW chantera un de ses rares titres français, Je te laisserai des mots, effort sympa du chanteur ayant grandi dans un hameau bilingue (Hudson) et qui a toujours été proche et admiratif de la portion francophone de notre scène indie.
On se dirige vers la conclusion avec un jeu de répliques improvisées, mené par le chanteur, la section de cordes et le public. Ça marche à tout coup! La chanson Big Bird in a Small Cage, qui porte très bien son titre et qui requiert la participation des chanteuses invitées. Jusqu’à la fin, notre hôte et ses collègues auront servi aux mélomanes un exemple probant d’indie folk nord-américain magnifié par les harmonies vocales et les sons aviaires issus de la scène et aussi de la salle.
Aux rappels, on a reconnu les titres Is Anything Wrong (Lhasa de Sela), Slip Into Your Skin, Lighthouse, Sit Down Beside Me. Une spectatrice sera invitée sur les planches, et pas la moindre : Klô Pelgag débarque avec casquette et sac à dos avec toutou, on oserve que sa voix a acquis une maturité et une assurance supplémentaires.. Chanteuses et chanteur ont coiffé le tout d’un bivouac chaleureux… Au fait, on ne savait pas trop si le concert était terminé, soudain Pat Watson est revenu seul sur le parquet, ceinturé de spots et d’une amplification portative. Il traversera le MTELUS en chantonnant, question de mettre un terme à cette charmante soirée.
PATRICK WATSON SE PRODUIT AU MTELUS LES 2, 4 ET 5 FÉVRIER , 20H. INFOS ICI