4. Quand la Musique, l’Histoire et la Politique sont intrinsèquement liées
La population arabe constitue 20,6% des minorités visibles de l’agglomération montréalaise, occupant ainsi la 2e position après la population noire, elle, avoisinant les 30%. Visible, dit-on? Peut-être pas tant que cela. Fort est de constater leur faible représentativité dans plusieurs domaines de la société y compris dans le milieu de la musique électronique.
Pourtant, les artistes électro swana ont le vent en poupe dans toutes les grandes métropoles du monde! Montréal, néanmoins, n’échappe pas à la mouvance, elle regorge de petits trésors, mais plus souvent encensés à l’étranger ou en dehors de la Province que sur l’île. Leur visibilité dans les médias ou sur les grandes scènes ou dans des événements d’envergure sont encore plutôt minimes, ici.
Pour PAN M 360, notre collaboratrice Salima Bouaraour met ici en lumière ce vivier foisonnant d’artistes impliqués dans le développement de la vie culturelle et nocturne montréalaise ainsi que la promotion et la défense des valeurs d’égalité, de justice, de créativité, d’inclusivité et de célébration de la beauté arabe.
L’immigration arabe au Canada est ancienne. On recense le premier arrivant venu du Liban en 1882! À Montréal, la communauté algérienne est au deuxième rang après celle d’Haïti puis on pourra citer l’Italie, la France et le Maroc. (Source : Québec interculturel)
Néanmoins, si on ose évoquer le terme de communauté arabe, il faudrait bien redéfinir ce que le terme « ARABE » englobe à lui seul: Afrique du Nord? Proche Orient? Moyen Orient? Toutes confessions confondues? Mosaïque linguistique? Diversité culturelle? À cela s’ajoute dans la réflexion, le terme plus usité et on ne peut plus pertinent de “Swana » qui est plus en adéquation avec la réalité post-coloniale.
En définitive, si nous voulons rester concentré sur notre sujet, on se limitera, cette fois-ci, à leur implication dans le milieu de la musique électronique à Montréal et leur point d’ancrage sur la scène extra muros.
Néanmoins, « l’insertion dans le milieu culturel d’artistes issu-e-s de l’immigration (longue ou récente) et d’artistes racisée-s né-e-s au Québec peut assurément participer à la cohésion sociale et contribuer à un imaginaire collectif inclusif, c’est-à-dire à un vivre ensemble incarné. Or, Il est regrettable de constater que les artistes dits de la diversité ne sont que trop peu mentionnés lorsqu’il s’agit de pratique professionnelle, et que les citoyen-ne-s dits de la diversité sont trop souvent perçus comme ayant besoin de médiation. Une pleine reconnaissance des artistes dits de la diversité, ainsi qu’une représentation diversifiée juste et adéquate à tous les paliers institutionnels, décisionnels, administratifs et créatifs. » (Source : Ville de Montréal)
Voilà qui est plus que nécessaire, sinon urgente à mettre en œuvre concrètement. C’est ainsi qu’en 2017 se détermine la politique de développement culturel de la ville de Montréal suite à la publication d’un mémoire sur la diversité artistique. Il est donc bien question ici du vivre et du travailler ensemble de manière égale.
En outre, cette notion spécifique du « besoin de médiation » laisse sous-entendre que les individus issus des groupes ethniques auraient besoin d’être en quelque sorte aiguillé et de bénéficier de la bienveillance, souvent teintée d’un paternalisme néo-colonial si il est maladroitement mené par des individus issus de la population dite « Blanche ». Ce rapport préconise de même réviser la sémantique qui porte, en effet, un réel préjudice aux actions positives car elle induit une sécession invisible mais définitivement palpable entre le « Eux et le Nous », le « Eux et les Autres ».
Par conséquent, « Une présence ainsi marquée et assumée de notre diversité montréalaise, permettant réellement à tout un chacun de se reconnaître et de s’identifier autant dans les structures que dans les récits créés, servirait sans aucun doute à la création d’un vivre ensemble réel » (Source : Ville de Montréal)
Le débat sur cette problématique est ainsi bel et bien un enjeu large et massif nous ramenant à notre sujet: la représentation des artistes arabes de la scène électro à Montréal. Il est impératif de renégocier, collectivement, et dans l’espace public, au sens large, l’image que l’on se fait d’eux ainsi que la manière dont la société les perçoit et les conçoit, sans compter leur implication à toutes les échelles. La musique et l’art, dans leur essence même, sont des vecteurs forts de l’intégration au cœur de la société.
De par son ancienneté sur le territoire canadien et son poids démographique représentatif à Montréal, les artistes arabes de la scène électro sont de ce fait dans la légitimité de se reconnaître dans toutes les facettes de la société ainsi que de bénéficier des mêmes opportunités que ce soit en termes de programmation, d’opportunités professionnelles, de positions décisionnelles ou en termes d’influence dans l’espace public.
Par conséquent, les projecteurs doivent être davantage multidirectionnels afin de rectifier le tir et de déclencher des actions concrètes positives pour que le « EUXet les AUTRES» deviennent un NOUS substantiel.