La légende du reggae Bunny Wailer est décédée le 2 mars au Medical Associates Hospital de Kingston, en Jamaïque, à l’âge de 73 ans. Il s’est rendu plusieurs fois à l’hôpital depuis qu’il a eu une attaque en juillet 2020. Née Neville O’Riley Livingston, Bunny est le dernier membre fondateur survivant des Wailers. Le trio s’est désintégré en 1973, Bob Marley devenant une icône mondiale avant sa mort d’un cancer en 1981, et Peter Tosh devenant un martyr après avoir été assassiné chez lui lors d’un vol en 1987. Lorsque j’ai longuement interviewé Bunny en 2010, le magazine HOUR a publié l’article en couverture en le titrant « The Forgotten Wailer » (en prévision du spectacle de Bunny au Festival international de reggae de Montréal).
Mais parfois, Bunny peut être son propre ennemi…
Pour cette page couverture, Roger Steffens, le plus grand spécialiste au monde de Marley and The Wailers, m’a dit : « Leroy Jodie Pierson et moi avons passé la décennie des années 90 à travailler sans relâche sur l’autobiographie de Bunny Wailer, Old Fire Sticks. Nous avons commencé par 64 heures d’interviews sur une période de trois semaines, enfermés dans une chambre d’hôtel de Kingston avec lui et divers collègues de différentes périodes de l’histoire des Wailers. Il y a plus de 1 800 pages de transcriptions, détaillant presque au jour le jour la vie de Bunny, depuis l’époque où il avait 8 ans, avec Bob Marley. Pratiquement toutes les questions que les fans se posent sur l’histoire des Wailers trouvent une réponse dans les mémoires souvent amères de Bunny. Il ne nous a jamais officiellement dit, à Leroy et à moi, qu’il avait abandonné le projet, apparemment sous la pression du clan Marley, et nous avons dû apprendre cette triste nouvelle de son chef d’orchestre en 2001. Je considère son incapacité à partager sa version des faits comme un crime contre l’histoire ».
André Ménard, co-fondateur du Festival International de Jazz de Montréal a également été arnaqué par Bunny qui a reçu une avance de 10 000 dollars pour un concert au festival en 1998… sans jamais se pointer. Donc, lorsque le Festival de Reggae de Montréal a programmé Bunny en 2010, André m’a dit : « Nous ne prenons aucune mesure contre Wailer parce que nous ne voulons pas lui donner une excuse pour ne pas venir une deuxième fois. Bunny Wailer s’est présenté à moi comme un homme intègre et plein de principes. Je pense toujours qu’il est un grand artiste. Mais un homme intègre ? Fuck it ! J’attends toujours son invitation personnelle pour le voir au Festival de Reggae. Ce sera le billet de concert le plus cher que j’ai jamais payé ».
Finalement, Wailer ne s’est pas non plus présenté à ce concert.
Au cours de sa légendaire mais tumultueuse carrière, Wailer a remporté trois Grammys et reçu l’Ordre du mérite de la Jamaïque en 2017. Il sera à jamais une icône du reggae. Alors que Bunny se sentait éclipsé par Bob et Peter, souhaitons que les trois amis d’enfance trouvent enfin un peu de paix.