Dans cette nouvelle incarnation post-moderne et planante, le groupe de black metal américain Yellow Eyes troque trémolo et blast beats pour des arpèges acoustiques et des plages de synthétiseurs minimalistes. On en retient un album qui défie toutes les conventions du style, sans toutefois s’arracher à la mélancolie et aux cris torturés qui en font sa signature.
Master’s Murmur est promu comme un album intérim, alter ego complémentaire d’un opus résolument black metal qui sortira en 2024. Pourtant, la musique qu’il contient fonctionne très bien de manière autonome, tant la proposition est originale. On souhaiterait presque que celle-ci devienne la formule officielle pour Yellow Eyes. Les compositions respirent et, malgré leurs courtes durées, tissent un fil conducteur cohérent passant par diverses ambiances. Le tout est toujours ficelé avec un souci du détail, instruments insolites et échantillons sonores variés se superposant aux mélodies synthétiques et aux guitares. Ces ajouts étendent la dimension contemplative de la musique grâce à des évocations de nature et de temps révolu. La présence très parcimonieuse de la batterie permet également un grand registre dynamique, qui peut aller d’une texture très épurée à quelque chose de plus dense.
Master’s Murmur dépasse à peine les 30 minutes de jeu, mais réussi à faire énormément durant cette courte période. Yellow Eyes y développe un récit, captivant du début à la fin, lequel comporte son lot de rebondissements dramatiques. La combinaison de timbres y est rafraîchissante et permet même d’ouvrir le champ des possibles du black metal, prouvant que le genre n’a pas essoufflé ses moyens expressifs.