Pays : Royaume-Uni Label : XL Recordings Genres et styles : Électro / expérimental / contemporain / jazz / rock Année : 2024

The Smile – Wall Of Eyes

· par Alain Brunet

Les murs ont des oreilles? Ils ont des yeux, suggère plutôt cet enregistrement audio en ce début de 2024. Voyons voir… à l’écoute! The Smile a épinglé sur ce Wall Of Eyes 8 chansons de format plutôt long, soit de 4 minutes et 35 secondes à 8 minutes et 3 secondes. En tout, près d’une quarantaine de minutes de musique enregistrée en studio, une réalisation de Sam Petts-Davies.  

Pour bien comprendre où loge aujourd’hui le binôme Thom Yorke- Jonny Greenwood, il faut remonter en 1997.

Après la sortie de l’album OK Computer, l’album qui les a consacrés cette année-là, les leaders esthétiques de Radiohead ont connu une évolution propre tout en consolidant leur vaisseau amiral, encore aujourd’hui le plus innovant de cette taille. Les grands coups de transcendance furent assénés avec les albums Kid A et Amnesiac, la suite a toujours été excitante, fait rarissime dans l’univers de la musique de masse. 

Notons cependant que  l’évolution conceptuelle de ses membres les plus doués fut plus tangible dans leurs démarches individuelles.

Depuis la bande originale du film There Will Be Blood (2007), Jonny Greenwood a acquis  progressivement la maîtrise de l’écriture et la direction orchestrale. Il s’est aussi illustré dans  la composition électronique, d’abord au service de trames sonores pour le cinéma et aussi de chansons complexes. Une esthétique traversée par le jazz actuel, le math rock, le prog rock, le space rock, la guitare classique moderne, les musiques classiques occidentale et orientale, l’électroacoustique et autres IDM. Éduqué aux formes contemporaines de la musique de chambre (ou symphonique), redoutable beatmaker côté électro, le guitariste Jonny Greenwood est devenu un musicien complet. De surcroît, un cerveau de Radiohead.

Figure emblématique des années 90, Thom Yorke a le mieux balisé la piste électronique  dans le massif rock de Radiohead, un rock existentiel chargé de mélodies épidermiques, des refrains bien construits, de halos autistiques, des thèmes et réflexions d’un quotidien doux amer, parfaitement représentatifs de ce que ressentait la génération X dans les années 90. The Eraser (2006) fut pour lui l’amorce de chansons construites avec  beaucoup plus de matériaux électroniques. On conserve un souvenir lumineux d’un magistral concert électro à la suite de son opus Anima (2019).

Semble-t-il qu’au terme du plus récent cycle de Radiohead (A Moon Shaped Pool, sorti en 2016 et la tournée qui s’ensuivit), Jonny Greenwood aurait exprimé une certaine lassitude à créer tout ce cirque Radiohead avec effets spéciaux, destiné aux arénas et stades.  

Jusque-là, les deux têtes principales n’avaient pas l’habitude de travailler ensemble dans  le contexte de leurs projets parallèles, d’où l’intérêt de The Smile qui les a réunis  et liés à l’excellent batteur Tom Skinner des Sons of Kemet. Sorti au printemps 2022, l’album A Light For Attracting Attention avait effectivement capté notre attention. Depuis plus ou moins une paire d’années, The Smile serait le principal vecteur de création de Thom Yorke (chant, guitare, basse, clavier),et Jonny Greenwood (guitare, basse, claviers), auxquels s’est joint Tom Skinner, l’excellent batteur du groupe jazz Sons of Kemet.

A Light for Attracting Attention, le premier album était une excellente nouvelle car il regroupait les deux artiste-clés du fameux quintette d’Oxford. Un power trio de ce niveau pouvait faire oublier, momentanément du moins, trois autres têtes de radio au ressources techniques inférieures. Quoique… ce n’est pas exactement le même son, l’exécution est certes plus virtuose mais les concepts musicaux auraient fort bien pu être explorées par le fameux quintette. 

La plupart des fans avaient ensuite apprécié un concert beaucoup plus rock, plus musclé, néanmoins dénué des éléments les plus raffinés de  A Light For Attracting Attention.  Ces éléments n’en constituaient-ils pas  les principales avancées ? Mais bon, on se sent de nouveau  jeune et fringuant lorsque ça rocke, lorsque ça décoiffe.

Pourquoi bouder son plaisir? Enfin… certains en ont boudé les conditions d’écoute ingrates.

Au deuxième chapitre de l’expérience, Wall Of Eyes s’inscrit dans le même souffle que le premier : chansons calmes et aériennes, prog rock ou space rock au confluent du jazz, musiques de chambre (London Contemporary Orchestra, notamment dans Friend Of A Friend et I Quit), psych-folk syncopé autour d’une guitare acoustique, bref une facture généralement subtile, élevée, dont on espère une exécution live proche de cet enregistrement délicieux car peu pièces de cet album sont rock dans leur conception – Under Our Pillows, construite sur des mesures composées, ou Bending Hektic, qui évoque une relation malencontreuse avec l’auto.  

Chercher le tube ou la chanson rock idéale dans le cas qui nous occupe, n’est pas à propos. Wall of Eyes n’est pas un album de grandes accroches mais plutôt un album où la forme chanson est un prétexte au prolongement compositionnel. Ses créateurs et interprètes y adoptent plutôt une posture de création profonde via laquelle émerge une forêt de subtilité. Authentique grower, en somme.

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