« À une époque où la rigueur n’est qu’un concept économique, nous affirmons notre volonté, sans concession, avec persistance, selon les termes de Coil, et obstination. » Le Little Manifesto de ce groupe n’y va pas de main morte. Se réclamer de Coil, groupe légendaire s’il en est, n’est pas une mince affaire. On sent bien cette attraction pour la « musique lunaire » de Coil caractérisant l’ultime période du groupe. La magie, pilier de la doctrine ésotérique élaborée par Aleister Crowley, est également une référence commune. Celle-ci fusionne occultisme, expression du désir et discipline. Black Egg, guidé par une soif d’absolu et de perfection, perpétue des traditions intempestives.
Le projet solo créé en 2012 par le Français USHERsan est devenu un regroupement collaboratif aux multiples têtes, certaines changeantes et d’autres persistantes. Le groupe façonne une esthétique exploratoire et transformatrice, souhaitant transfigurer la vie plutôt que la mettre en scène. Ainsi, il se réapproprie la notion de rigueur. Celle de la performance esthétique, par un formalisme et une ritualisation imparables. Érotique, par l’évocation de jeux sexuels. Musicale, par une recherche de perfection allant jusqu’à produire 73 versions de la pièce-fleuve The Charge of the Dark Goddess qui conclut l’album.
Les vocalises, le chant solaire et le récitatif de la vamp Ymaltzin subordonnent les effusions, râles, cris voilés ou désabusés des voix masculines. Le collectif musical apporte une richesse impressionnante. Glitches, drones, échantillonnages, guitare, basse, batterie, percussions et voix exécutent un délire orgiaque maîtrisé et libre. À noter : Friedemann Kootz est au matriçage. Il est reconnu pour sa collaboration avec le duo gothique derrière les remarquables projets Haus Arafna et November Növelet.
Par ses pièces répétitives et hypnotiques comme autant d’incantations mystiques, Black Egg nous invite à une célébration cosmique et charnelle.