Une volonté semble exister chez les créateurs de musique indonésienne moderne : constamment mettre à jour et élargir les possibilités du gamelan, la musique orchestrale avant tout percussive de l’archipel, tout en respectant ses aspects formels traditionnels. Dewa Alit de Bali, un facteur d’instruments novateur et un compositeur plus audacieux encore, figure parmi les plus grands noms à cet égard, ayant notamment travaillé avec Bang on a Can et été artiste en résidence au MIT. Avec des disques comme Genetic et Land is Talking, Alit et son ensemble Salukat, qui compte deux douzaines d’instrumentistes, ont produit des œuvres imaginatives, évocatrices et imprévisibles.
Siklus, leur dernier-né, est le fruit d’une commande pour la Triennale d’architecture de Sharjah, aux Émirats arabes unis, en 2019, visant à accompagner une présentation des systèmes d’irrigation de Bali et de son calendrier traditionnel pawukon, fondé sur la culture du riz. Le titre, qui signifie « cycles », reflète l’interprétation de ce calendrier par Alit et les changements récurrents de la nature qu’il reproduit.
Étant donné la thématique nettement naturelle, il est un peu étrange, bien qu’agréable, qu’une grande partie du deuxième mouvement (après les sonorités profondes et lointaines du premier) évoque un bruit informatique vintage. Ce n’est qu’avec le remarquable troisième mouvement que l’ensemble se met à ressembler à celui du gamelan traditionnel, en prenant d’ailleurs une tournure mélodique très originale. Une autre création intrigante d’un orchestre brillant, dirigé par un compositeur à surveiller.