Parcours atypique que le sien. Tout comme sa musique. Guitariste, son langage consiste en masses sombres qui se heurtent et se disloquent, énergie qui gronde, rue, trépigne. On est loin des accords mesurés ou des envolées à tout rompre de ses confrères. En fait, l’instrument source est si méconnaissable qu’il faut savoir qu’il s’agit d’une guitare. Après deux disques en solo de cette matière brute pour le label Rune Grammofon et de brèves collaborations, notamment avec le groupe Jaga Jazzist sur l’album One-Armed Bandit et Nils Peter Molvaer sur Baboon Moon, il réalise deux disques d’improvisation éberluants d’invention avec sa compatriote, la chanteuse d’avant-garde Sidsel Endresen. On le retrouve ensuite en trio, le temps d’un disque, dans un contexte de rock expérimental avec le groupe Pale Horses, sur lequel on découvre sa voix, étonnante. Suit en 2016 Amputation, autre album en solo, puissant, troublant, où la plaie laissée par l’ablation est encore à vif, mais qui n’est que le prélude de celui-ci.
Jusqu’ici toutes les pochettes de ses disques ont été en noir et blanc, sombres pour la plupart, abstraites et, à une exception près, dépourvues de tout élément humain. Avec celle de Redundance, non seulement Westerhus s’y montre pour la première fois, dans toute sa vulnérabilité, mais son portrait solarisé est nimbé d’un rouge vibrant. Changement de ton. Radical. Grâce à sa voix, surprenamment expressive et polymorphe, démultipliée, sa musique, de cérébrale est devenue touchante. Bouleversante même. Et puis il y a cette façon bien à lui de construire ses chansons, l’âpre le disputant au sublime, avec des fulgurances sonores qui font chavirer. J’en suis encore tout remué. Gros coup de cœur.
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