Rakhi Sing est une compositrice britannique, également violoniste et fondatrice de l’excellent Manchester Collective, un orchestre de chambre jeune et audacieux qui redéfinit l’expérience live de la musique classique et contemporaine. À Montréal, l’ensemble Collectif9 fait office de cousin spirituel.
Bref, Sing vient de sortir Purnima, un album très personnel où elle est tour à tour interprète et compositrice, dans un programme de huit pièces d’ami.e.s compositeur.trices (Alex Groves, Emily Hall, Michael Gordon et Julia Wolfe). Si le violon est central à la démarche des œuvres du programme, l’électro y est également bien présente, soit en tant qu’atmosphère panoramique ou de façon plus évidente grâce à une pulsation inspirée de la synth-pop. On nage dans un minimalisme contemporain bienveillant, infusé d’ambient, d’électro réverbérante et, comme mentionné plus haut, d’art pop. Trace I d’Alex Grove, Sabkha de Sing elle-même et Outshifts d’Emily Hall procèdent des premières alors que les beats ludiques, assortis de basse stylée et de glitchs élégants de Tinge de Michael Gordon sont de l’ordre de la dernière. Une autre pièce de Gordon, Light is Calling, sorte de voyage onirique digitalo-acoustique, fait penser à un Arvo Pärt remixé par Thriftworks.
Mais la pièce maîtresse de l’album, c’est LAD de Julia Wolfe. C’est l’œuvre la plus exigeante (la plus longue aussi, à 17 minutes) de l’album. Des glissandos ascendants, en multipistes, se superposent et s’additionnent jusqu’à se rejoindre dans un unison majeur. Celui-ci sert de tremplin pour des motifs mélodiques appogiaturés qui résonnent comme de multiples cornemuses en procession solennelle, se métamorphosant éventuellement en digne gigue écossaise, mais plutôt fantômatique, embrassée qu’elle est dans un voile de vibrations ondoyantes et enveloppantes héritées, de l’accord en unison précédent. Tout cela n’est pas un hasard : LAD est avant tout une pièce écrite pour neuf cornemuses! L’arrangement réalisé ici pour un seul violon qui réalise toutes les voix est monumental et très impressionnant. Je soupçonne Hans Zimmer de s’en être inspiré dans sa trame sonore de Dune, où l’arrivée solennelle des Atréides sur Arrakis (Dune) est accompagnée par un chœur de cornemuses aux sonorités contemporaines. Le pièces se termine abruptement, sur des envolées de plus en plus dissonantes du violon, faisant tanguer la solidité tonale de l’accord tenu et maintenu en toile de fond. Wow!
Voici une musique contemporaine ancrée dans notre époque ainsi que dans le retour d’une tonalité fièrement affichée et, surtout, renouvelée.