On aime bien les interprétations « renouvelées » et les œuvres « revisitées », voire « réécrites » (ou « recomposées » comme, justement, Les quatre saisons de Max Richter ou le Canon de Pachelbel passé dans le tordeur par Brian Eno). Parce que chaque nouvelle lecture révèle quelque chose de l’originale. Et comme pour Le Sacre du printemps (dont The Bad Plus a fait en trio une version magnifique) ou la Neuvième (dont vous connaissez peut-être l’interprétation de l’ensemble Camerata Cassovia accompagné à la batterie par Massimo Aiello), il existe plus de 1000 enregistrements des Quatre saisons de Vivaldi. De plus, il s’agit d’une œuvre de l’époque baroque, alors de nombreux détails sont laissés au goût de l’interprète; ornementations, dynamiques et même tempi sont susceptibles d’être personnalisés par le ou la soliste du jour, et c’est ce qui fait le bonheur, ou le malheur, de telle ou telle version.
Camille et Julie Berthollet sont des stars de la musique classique en France et Paris-Match les qualifie volontiers de « sœurs prodiges ». Pour se démarquer en jouant cette œuvre archiconnue, il fallait faire dans l’excessif, et c’est ce qu’on nous donne ici : une version de course dans laquelle la virtuosité devient quelque peu tape-à-l’œil et dont certains mouvements ne déplairont pas aux amateurs de Cello Rock à la Apocalyptica. Les quatre premiers concertos du recueil La confrontation de l’harmonie et de l’invention sont ici taillés à la hache, certains mouvements étant vraiment rugueux, tandis que d’autres, comme l’Adagio molto de « L’Automne », témoignent d’une retenue d’un goût exquis. Bref, une version en montagnes russes qui est peut-être, après tout, plus fidèle à l’idée que l’on se fait de ce que devrait être une année, avec des saisons bien découpées, plutôt qu’une longue grisaille suivie de trois jours d’été…
Les sœurs multi-instrumentistes (Julie est violoniste, altiste et pianiste, Camille est violoniste et violoncelliste) sont aussi chanteuses, et elles offrent en sus quatre chansons très librement inspirées des concertos du « prêtre roux ». C’est mièvre à l’excès et, franchement, on se demande un peu ce que ça fait à côté de Vivaldi, avec qui ça ne partage strictement rien. Un choix vraiment très étrange, d’autant plus qu’après ces chansons pop, on revient à Vivaldi et aux cordes de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse pour trois mouvements extraits de concertos de L’estro armonico. Le tout se termine avec un remix dans lequel Laurent Marimbert ajoute de la boîte à rythme derrière le thème du largo du « Printemps ». Si au moins ça le faisait arriver plus vite…