All Life Long réunit une série de 12 œuvres pour orgue à tuyaux, chœur et quintette de cuivres composées par Kali Malone, Américaine transplantée à Stockholm depuis 2012. Les premières mesures de cet album rétro-nuovo, idéal pour tout recueillement, rappellent les musiques liturgiques composées durant les périodes fondatrices de la polyphonie, soit la fin du Moyen-Âge et la Renaissance. Des effets de basso continuo sont ponctués de subtiles variations, les accords sont simples et souscrivent à une optique microtonale, les notes s’allongent dans le temps, s’installent dans l’espace. Aux orgues à tuyaux que l’artiste ré-accorde selon ses besoins, se juxtaposent des chants féminins, doux et célestes. Les cuivres sont joués dans ce même esprit de recueillement. Notons au demeurant que les œuvres pour orgue sont interprétées par Kali Malone avec l’accompagnement de Stephen O’Malley (Sunn O))), etc.), féru de musique d’église comme on le sait. On remarquera aussi que l’œuvre titre de l’album apparaît deux fois, d’abord sous la forme d’un canon, puis avec un arrangement densifié pour la voix. Cela étant posé, la compositrice ne se contente pas d’une courtepointe cousue de référents anciens remis aux goûts du jour. Minutieusement, elle exploite les mécanismes de ces vieux instruments et en extirpe des sonorités quasi inédites. Force est d’observer qu’elle aborde différemment cette lutherie et ces chants apparemment sacrés, qu’elle en modernise les harmonies (et les assortit parfois de dissonances). Bref, elle fait beaucoup plus que désacraliser cette vieille musique d’église tout en y évoquant un infini plus flou, plus agnostique. « Il ne s’agit pas d’une musique de louange ou de révélation spirituelle, mais d’un acte artistique qui traduit l’indescriptible », souligne-t-on sur sa page Bandcamp. Rien à rajouter… sauf réitérer les affinités étonnantes des musiques contemporaines avec les musiques anciennes.
