Le JACK Quartet a été fondé en 2005 et il est resté fidèle à sa mission d’interpréter des œuvres des XXe et XXIe siècles parmi les plus aventureuses. Sa discographie compte une vingtaine de titres, dont trois récents albums de John Luther Adams et l’intégrale des quatuors à cordes de John Zorn.
Cet album fait entendre la musique de l’un des deux violonistes du quatuor, Austin Wulliman, dont c’est la deuxième production en tant que compositeur.
La pièce titre, en six parties enchaînées, s’inspire de la relation d’amitié qui s’est développée durant les années 1950 entre Pierre Boulez et John Cage. Une illustration forte de l’expression « les contraires s’attirent » ! La pièce et l’ensemble de l’album sont d’ailleurs inspirés d’une maxime de Cage que l’on croirait sortie de la bouche de Monsieur Spock : « L’activité impliquant la multitude dans un processus unique, les rapprochant, même si certains semblent opposés, vers l’unité, contribue à un mode de vie sain». Il y a pas mal de friction sur les cordes ici, comme il y en avait sans doute entre Cage et Boulez, mais la pièce s’appuie davantage sur un système d’une rigidité toute boulézienne (ou « chaque note a sa place distincte dans un réseau complexe d’orchestrations timbrales et de relations polyrythmiques ») plutôt que sur l’indéterminisme à la Cage. Celui-ci revient à la fin de l’album avec sa courte pièce de 1942 Totem Ancestor, composée pour piano préparé, mais arrangée ici avec brio pour le quatuor par Wulliman.
La pièce Live News, pour quatuor et électronique, est basée sur le matériel du premier album d’Austin Wulliman, The News From Utopia, paru en 2023. Le compositeur avait enregistré et mixé l’album entièrement en solo, à la maison, durant la pandémie de COVID-19. Il a composé cette nouvelle version afin de pouvoir présenter l’œuvre en concert avec le quatuor. Les traitements électroniques s’intègrent très bien au jeu des musiciens.
L’album s’ouvre sur deux pièces en parfait contraste ; la première, The Late Edition, est presque un tour de force de répétition très rapide, un ostinato rythmique frénétique de huit minutes. La deuxième, Lost One, est au contraire une pièce très calme qui évoque une espèce de fusion entre l’être et la nature.
Un beau programme, qui montre bien que la vieille formule du quatuor à cordes peut encore offrir de belles surprises !