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Au terme d’un cycle plus discret de sa vie publique, l’auteur-compositeur-interprète, Paul Kunigis revient avec Yallah, son nouvel album. Mosaïque d’influences et de cultures dans lesquelles le chanteur a baigné et bellement exprimé depuis l’époque de la formation Jeszcze Raz dont il était la figure de proue, ce projet se penche sur le temps et l’amour. Teintées d’une certaine mélancolie, les chansons de l’artiste montréalais véhiculent un message d’espoir à travers des thèmes sensibles et profondément humains.
Paul Kunigis se distingue par la variété des langues via lesquelles il interprète ses chansons, mais l’empathie et la générosité portées par sa musique sont universelles. Huit longues années après la sortie de son dernier album, 1 Moment, durant lesquelles il a endossé les rôles d’écrivain, d’acteur et même de cuisinier, il se rassoit derrière son piano pour offrir à son public un album à son image : hétéroclite dans ses inspirations, mais cohérent dans ses intentions.
Le chanteur s’entoure d’une joyeuse équipe sur ce projet, avec notamment François Lalonde (entre autres à la batterie et la coréalisation), Yves Desrosiers (guitares, banjo…), Simon Dolan (contrebasse et basse), Caroline Meunier (accordéon), Marie-Soleil Bélanger (violon), Gabriel Paquin-Buki (clarinette), Blaise Margail (trombone), Jacques Kuba Séguin (trompette), Christine Tassan (guitare), Nathalie Cora (kora) et Julie Rousseau (voix). Complice de Paul Kunigis, la journaliste Agnès Gruda (La Presse) a quant à elle écrit les textes de quatre titres de l’album.
PAN M 360 : On est ici pour parler de votre dernier album, qui s’intitule Yallah, qui veut dire en arabe « Allons de l’avant ». Comment ce mot-là incarne-t-il l’essence de votre album ?
PAUL KUNIGIS : Ah ! Il est venu de lui-même. C’est un titre que je ne planifiais pas du tout. Quoiqu’une chanson s’appelait Yallah, écrite et enregistrée en Israël, soit dans un studio dans le nord du pays.
En Israël, on utilise énormément de mots dans le lexique arabe. On aime beaucoup la couleur des mots arabes, pour dire en un mot ce que quelqu’un d’Israélien ou d’Occidental dirait peut-être en 2 ou 3 phrases. C’est comme ça avec le mot Yallah. Ça signifie d’abord « allons de l’avant », mais ça veut dire aussi d’autres choses. Il y a tellement de nuances dans ce mot-là !
L’album a aussi beaucoup de nuances, et je me suis rendu compte vers la fin que le fil conducteur, c’est qu’on ne peut pas être immobile. Il faut toujours aller de l’avant. Oui, on vit une crise ? OK, on trouve une solution : on va de l’avant. On a une peine d’amour ? OK, on continue, on va de l’avant.
Donc pour moi, c’est un mot qui, tout d’un coup, a signé tout ce qu’il y a dans cet album. Ce n’est même pas moi qui l’ai choisi. Pour l’anecdote, c’est l’ingénieur du son qui m’a appelé en disant qu’il n’y avait pas de titre, alors il a mis Yallah. Et j’ai dit oui, ce sera ça le titre.
PAN M 360 : Vous chantez aussi bien en hébreu qu’en polonais, anglais ou français. Pourquoi ce choix de varier les langues ?
PAUL KUNIGIS : Je suis né en Pologne, d’une mère polonaise et d’un père polonais et russe avec de la famille en Lituanie. Donc déjà, au départ, mon existence a été un petit peu compliquée. Je suis arrivé très jeune en Israël, à 3 ans, donc j’ai évidemment parlé hébreu. J’étais inscrit dans une école française parce qu’il n’y avait qu’une école catholique en Israël. Il s’est avéré que c’était une école française à Jaffa, qui est une ville arabe.
Donc j’ai appris le français. J’ai appris l’arabe, forcément, parce que presque tout le monde parle un petit peu d’arabe. Après ça j’ai fait des études universitaires à Toronto où j’ai vraiment appris. C’est tout cela qui fait que je suis ce que je suis. Je n’arrive pas à décider quelle chanson sera en quelle langue. Elles viennent comme ça.
Cela fait en sorte que j’ai des influences musicales de toutes sortes. J’ai été enfant de chœur à l’Église comme beaucoup de gens de ma génération. J’ai appris à chanter des chansons liturgiques, mais j’ai aussi entendu énormément de chansons yiddish de la part de la famille de mon père. Et puis, j’ai aussi été influencé par mon temps donc j’ai été élevé par les Rolling Stones, Led Zeppelin, les Beatles, Janis Joplin, et tout ce monde-là. Mais quelque chose est arrivé plus tard dans ma vie où j’ai décidé de mettre tout ça ensemble, et ça donne ça.
PAN M 360 : Les paroles que vous écrivez sont pleines de poésie, mais elles sont aussi porteuses de sens. Les thèmes que vous abordez sont très intéressants et on retrouve notamment une réflexion sur le temps qui fait écho à votre dernier album 1Moment. Qu’est-ce qui vous intéresse là-dedans ?
PAUL KUNIGIS : Oui, exactement ! Ce n’était pas voulu, mais sur le dernier album, je réfléchissais sur le temps. Je voulais le ralentir. Peut-être parce que je voyais mes enfants grandir, je me disais que j’aimerais être encore en mesure d’être présent, quand ils auront tel ou tel âge. Je les ai eus tard dans ma vie alors je faisais les calculs et je trouvais que le temps passait trop vite. Donc l’album parle du temps, mais en disant que, finalement, on n’a pas beaucoup de temps !
Donc il y a une urgence. La pandémie nous a montré qu’il y a urgence de faire certaines choses dans la vie. On pensait qu’on pouvait voyager à n’importe quel moment, mais on se rend compte maintenant que les plans peuvent être interrompus. Quand tu as de la famille éloignée géographiquement aussi, tu te rends compte de cette fragilité. Tu ne peux plus te déplacer comme tu le pensais.
PAN M 360 : Vous parlez d’amour aussi.
PAUL KUNIGIS : Oui, l’amour ne demeure pas pareil, nous autres non plus. L’amour, c’est un truc physique aussi, donc quand tu regardes dans le miroir, il y a des rides, il y a des choses qui se sont passées. Tu as perdu des cheveux, si tu es une femme tu as peut-être les seins qui pendent un petit peu. Le physique change, donc c’est normal que l’amour change avec, qu’il ait des rides aussi. Mais ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas s’aimer, encore.
PAN M 360 : Vous nous touchez avec l’histoire d’un réfugié qui traverse la Méditerranée dans Lampedusa. Vous abordez le combat contre la dictature avec Maidan Tahrir. Pour vous, la musique est-elle vectrice d’un message politique ?
PAUL KUNIGIS : Absolument, et depuis toujours. Bob Dylan, si je recule des années en arrière, sa musique était politique. Il a renversé des gouvernements, je crois. Moi, je ne fais pas de la musique pour des raisons politiques, mais je veux souligner certains faits qui existent. Les chansons dont vous parlez ont été écrites par Agnès Gruda, qui est une journaliste à La Presse dans la section internationale et qui a vécu ces expériences dans des reportages.
Et quand j’ai vu les textes, je les ai trouvés formidables. Il y a un univers qui se dessine bien. Je trouve ça très particulier qu’une journaliste convertisse un reportage en poésie. Les textes ont été écrits il y a 6 ans et je les ai mariés à ma musique.
PAN M 360 : Je voulais aussi revenir sur le titre Sans nom. Ce n’est pas commun d’écouter une chanson qui parle de mères porteuses. Pourquoi ce sujet ?
PAUL KUNIGIS : C’est également Agnès Gruda qui a écrit ce texte-là. Elle a fait un reportage en Inde. Quand j’ai lu le texte, je me suis dit « Mon Dieu ! ». Ce sont vraiment de jeunes femmes. Des filles, même, de 18, 19, 20 ans. Ça m’a énormément touché. Peut-être parce que j’ai une fille. J’ai donc décidé d’en faire une chanson, en utilisant un style manouche. Ça fait comme un vieillard qui gratte la guitare pour raconter ce qu’il a vu.
Je n’avais jamais utilisé les textes de quelqu’un d’autre, mais Agnès a réussi à écrire quatre textes que j’ai pris. (Maidan Tahrir, Lampedusa, Canal St-Martin et Sans nom)
PAN M 360 : Vous vous apprêtez à jouer Yallah sur la scène du Ministère, à Montréal, et le spectacle sera offert en webdiffusion. Comment vous sentez-vous à l’idée de remonter sur scène ?
PAUL KUNIGIS : Honnêtement, je me sens très fébrile. Ça, je ne l’ai jamais senti avant dans ma vie. D’abord, on a le contexte pandémique et je n’ai pas réfléchi énormément à ce que je faisais. En fait, je n’ai pas réfléchi du tout. En finissant l’album, un musicien m’a dit que l’album se prêterait bien à un spectacle, un jour. Mais pourquoi attendre « un jour » ? Ce serait contre la nature de l’album. Allons de l’avant !
Il y a une fébrilité pour moi et les musiciens. Pas juste parce qu’on n’est pas montés sur scène depuis longtemps, mais aussi parce que tout le monde est conscient que ça va être diffusé sur le web. Là, ce sera une occasion pour ceux qui me suivent depuis un certain temps dans plusieurs pays de nous voir. Et ça, ça me rend un petit peu nerveux. Mais c’est une bonne nervosité. Ça va être un spectacle extraordinaire, on va casser la baraque et ça sera inédit. Le plus grand défi, finalement, ce sera de transmettre notre énergie à travers l’écran.
SITE INTERNET DE PAUL KUNIGIS EN ATTENDANT SON ATTERRISSAGE SUR LES PLATEFORMES
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