L’équipe de PAN M 360 est très présente au Festival international Nuits d’Afrique (FINA), nos contributeurs.trices rapportent quotidiennement ce qu’ils.elles ont vu et entendu aux concerts présentés à Montréal jusqu’au 23 juillet.
Kaleta & Super Yamba Band : Retour vers le futur de l’afrobeat… avec pas mal de juju!
crédit photo: André Rival
Ce fut une soirée de samedi épique au Balattou, avec la première prestation montréalaise du groupe new yorkais Kaleta & Super Yamba Band.
L’ADN du septuor est imprégné d’afrobeat, de soul et de funk, mais aussi de beaucoup de juju, style créé au Nigéria dans les années 1920, puis développé par des artistes de légende tels Tunde King et Tunde Nightingale, et finalement précurseur de l’afrobeat. Des percus… percutantes et virevoltantes, la guitare volatile, la basse bondissante et les vents spectaculaires (trompette, sax baryton, flûte) ont plongé les Montréalais présents en grand nombre dans une extase authentiquement vintage digne d’un club de Lagos vers 1970.
Le leader charismatique du groupe, Kaleta, est un fils spirituel du grand King Sunny Adé, et fait monter la pression à mesure que les heures avançaient. On est d’abord désarçonné d’entendre un premier cri digne de James Brown sortir de cette personne en apparence douce et réservée. Mais plus on avance, plus on en redemande. Super Yamba Band est, oui, un groupe d’afrobeat/juju, mais, venant de Brooklyn, on remarque bien la musicalité étoffée des instruments à vent.
Walter Fancourt et Sean Smith sont des jazzmen accomplis, leur maîtrise technique et sonore n’est jamais approximative, même si les imperfections notoires des cuivres dans les bands de l’époque vintage avaient un grand charme. L’accueil du public a été à la hauteur. Kaleta, Super Yamba Band et Montréal sont faits pour s’entendre, et on devine que cette première ne sera pas la dernière.
Frédéric Cardin
Guérison, célébration, innovations gnawas chez Saïd Mesnaoui
Crédit photo: André Rival
Saïd Mesnaoui et son vaste groupe de dix musiciens ont présenté un spectacle qui témoignait du pouvoir rédempteur de la musique gnawa. Armé de son fidèle guembri à la main, le luth traditionnel à trois cordes originaire du Maroc, Mesnaoui a joué devant un groupe enthousiaste de spectateurs, jeunes et moins jeunes, venus de partout, au Théâtre Fairmount.
Il n’a pas fallu longtemps avant que l’effet hypnotique du gnawa s’empare de nous. Les triplettes de la qarqaba, castagnettes en métal, ont été fusionnées avec élégance avec les guitares électriques, claviers et percussions. Voilà autant de couches de profondeur et de textures, repoussant les limites du genre gnawa tout en en conservant l’essence fondamentale. La fusion des mélodies anciennes du gnawa avec des saveurs de jazz, de rock, de blues et même de reggae a ainsi généré une expérience merveilleusement unique, perfectionnement réussi de Saïd.
Au-delà du concert, les musiciens ont tous exprimé un sentiment de spiritualité et d’unité, valeurs profondément enracinées dans la culture gnawa. La voix émouvante du chanteur principal a a volé au-dessus de nous, avec ses messages de résilience, d’amour et de guérison. Les interactions captivantes d’appel et réponse entre les musiciens et le public ont produit une ambiance de célébration et de joie collectives.
Varun Swarup
Aux sources chaudes du sound system avec WWSS et Jah Observer
Les Montréalais Guillaume Alexandre et Pierre FX sont des fans absolus du sound system à la jamaïcaine. Ils ont construit leurs enceintes avec les ressources locales, ils ont débusqué des pièces de collection, vinyles, reggae, dub, Caraïbes, etc. rares et s’être associé à des OGs de la culture et de la communauté jamaïcaine.
Au fil des ans, les événements sous la bannière World Wild Sound System (WWSS) ont pris du coffre, à tel point d’attirer Jah Observer, 66 ans, véritable légende des sound systems au Royaume-Uni. Aussi parmi les fondateurs du Carnaval de Notting Hill à Londres, carrément le deuxième plus grand festival au monde se consacrant à la culture jamaïcaine.
Vers 22h30 c’était déjà très plein et très chaud au Ministère. On y était venu danser aux sources du roots reggae, du dub, des toasters (ancêtres du rap). L’idée de nos hôtes était de faire se déhancher le public sur le plancher de danse, tout en lui faisant savourer ces perles des années 60 et 70, exceptionnellement sorties de leurs huîtres.
Franchement très cool soirée, amorcée par près de deux heures de réchauffement avant l’arrivée en scène de Jah Observer, qui travaille toujours avec l’attirail classique du sound system : une platine et un pré-amplificateur. Donc l’art de cet animateur consiste à un jeu constant entre ce qu’il fait jouer sur la platine et ses interventions au micro en direct. Cette alternance devient de plus en plus fluide et contagieux devant nous, en temps réel. Quelques minutes ont suffi pour que nous portions tous en nous ce puissant virus du reggae originel.
Alain Brunet