Semaine du Neuf | Torrents (Je suis en feu), le Quatuor Bozzini au service de Linda Bouchard
par Alain Brunet
Mardi au Wilder,le programme Je suis en Feu proposait « une soirée éclatée de musique en direct accompagnée de projections de films ». La musique en direct était exécutée par le Quatuor Bozzini.
En troisième partie de programme, c’était la première mondiale de Torrents (Je suis en feu), une œuvre de Linda Bouchard pour quatuor à cordes en direct, son enregistré et projection de film. La compositrice québécoise a fait fleurir cette précieuse collaboration avec le Quatuor Bozzini et le vidéaste Huei Lin, présent sur place.
« Inspiré par les signaux maritimes, Torrents intègre les idées de communication et de relations, de singularité et de multiplicité, de granularité et de fluidité. »
Les cordes deviennent alors cornes de brume, sirènes, alertes, quatre fréquences sont soutenues en spirales ascendantes pendant que des traitements sonores en soutiennent l’ascension. Puis le quatuor inscrit un moment de dialectique entre consonance et dissonance. La trame dramatique s’épaissit, les cordes frottées sont recouvertes de montages sonores incluant des enregistrements de voix humaines et autres sons préenregistrés et traités subtilement. Les choses se corsent davantage aux 4/5 e de l’œuvre , puis la conclusion s’avère calme, méditative, consonante, réconfortante.
Plus tôt, l’œuvre 60 loops du compositeur Pierre Jodlowski étudiait l’interaction entre la machine et les gestes humains dans un minimalisme, non sans rappeler Steve Reich pour ses jeux de décalage rythmique. La patte Jodlowski entrait plus clairement en jeu dans ses superpositions de courtes lignes mélodiques ou techniques étendues des cordes et d’une trame électroacoustique. On aura aussi écouté la musique du compositeur canadien Luke Nickel, qui proposait Supreme Chains, autre jeu subtil de motifs décalés.
L’interprète et compositrice Erika Angell (de Thus Owls) lançait hier soir au Ausgang Plaza à Montréal son premier album solo, The Obsession With Her Voice (dont il a abondamment été question dans l’entrevue que j’ai réalisée avec l’artiste – entrevue à écouter ici!). Bien remplie, la place a résonné aux ondes parfois planantes, parfois spirituellement incandescentes, de la musique de la Montréalaise d’origine suédoise. La voix, belle et juste, était régulièrement manipulée par un appareillage électronique. À côté d’elle, la batterie de Mili Hong (excellente) donnait parfois l’impression d’avoir une vie indépendante. Mais c’est voulu. Pour étoffer le tout : un trio à cordes favorisant les notes graves, soit deux violoncelles (Audréanne Filion et Jean-Christophe Lizotte) et un alto (Thierry Lavoie-Ladouceur). Le public nombreux a écouté avec une remarquable attention une musique somme toute exigeante, parfois même difficile. C’est que Angell ne fait pas ici de la pop aguichante. Elle explore les possibilités expressives de ses propres capacités vocales à travers des lignes longues, épurées, mais harmoniquement trempées dans un modernisme sophistiqué. Les textes, eux aussi, élèvent le niveau avec un symbolisme réfléchi. Cela dit, sur fond de pulsation en beat box de diverses tendances, de ronronnement de cordes post-romantiques et de batterie souvent arythmique, l’artiste a su gagner avec conviction le le public, qui a fait preuve d’une écoute remarquablement intéressée et respectueuse. Celui-ci était comme en transe devant la belle de scène qui s’est élevée à un niveau de qualité musicale tenu par seulement quelques autres artistes féminines, genre Björk, Joanna Newsom, Kate Bush (même si Erika est totalement différente, stylistiquement).
Semaine du Neuf | VIVIERMIX // QUASAR + NEM + FIOLÛTRÖNIQ
par Varun Swarup
Hier soir, on nous a servi trois cours de musique numérique, chacun présenté par l’un des ensembles distingués dirigés par Le Vivier. Au cœur de cet événement, deux œuvres mixtes de l’invité d’honneur Pierre Jodlowski et une pièce de Cléo Palacio-Quintin résonnaient dans un mélange éclectique de sons et de récits transdisciplinaires.
Le premier cours a débuté avec « ALÉAS », de la compositrice et interprète elle-même, Cléo Palacio-Quintin à la flûte et son collègue Bernard Falaise à la guitare électrique. Ensemble, ils ont sonorisé en temps réel une projection visuelle ostensiblement d’eau qui coule, dans une invitation à redécouvrir le monde qui nous entoure à travers un prisme déformant de son et de poésie de Thierry Dimanche. Vous pouvez lire notre entretien avec Cléo ici.
André Leroux, l’un des saxophonistes du prestigieux quatuor Quasar, a été à l’honneur lors de la deuxième représentation, dans son interprétation de « Le dernier songe de Samuel Beckett ». Leroux a fait preuve d’une maîtrise considérable dans cette performance qui impliquait des lignes atonales araignées et de nombreuses techniques étendues. Avec son pied, il contrôlait une pédale qui déclencherait une piste d’accompagnement, des paysages sonores banals et effrayants dans cet hommage au dramaturge estimé.
Pour moi, le point culminant de la soirée a été la représentation de l’œuvre de Jodlowski, « Respire », interprétée par le Nouvel Ensemble Moderne. Il s’agit d’une œuvre qui semble explorer le mécanisme même par lequel nous nous maintenons en vie, notre respiration. Des corps humains sans visage se contorsionnent et bougent en synchronisation avec les sons hypnotiques de l’orchestre, parfois fous, mais parfois beaux dans cette danse entre son et silence. On peut certainement entendre l’influence du minimalisme à la Steve Reich, prononcée par les accords sublimes occasionnels du clavier. Un ouvrage vraiment envoûtant et qui fait réfléchir.
Semaine du Neuf | Ghostland, au bureau hanté… et plus encore
par Alain Brunet
L’existence humaine en ce siècle trouble, l’aliénation au travail, la quête d’un espace rituel pour évacuer les , l’évocation de la symbolique des fantômes, ombres de nous-mêmes ou esprit des morts. Avec Ghostland, une œuvre immersive née en 2016, le compositeur français Pierre Jodlowski a voulu produire un choc, un fracas, divers états fantomatiques reliés à nos existences, mais aussi des sourires et de la sensualité.
Éminemment immersive, l’œuvre est conçue pour percussions, trame sonore, écran chinois, projections sophistiquées, manipulation d’objets en direct. Les interprètes y sont à la fois virtuoses de la percussion et acteurs/figurants de cette performance interdisciplinaire.
L’œuvre se déploie sur trois tableaux dont le principal, Büro, se veut un espace virtuel illustrant un lieu de travail dépersonnalisé, vaste salle garnie d’ordinateurs. Voilà le terreau idéal pour le burn-out, la dépression, voire le suicide comme ce fut le cas chez Orange, un service de téléphonie en France qui avait défrayé la manchette pour une vague de suicides et qui fut une source d’inspiration pour cette pièce. Précédemment, des croquis de meubles fluorescents servent aux percussionnistes afin de se déplacer devant et derrière l’écran. Il y a un récit au programme. Il y a des phrases dites en allemand, il y a 4 percussionnistes se consacrant à différentes fonctions.
Aurez-vous déduit que nous ne sommes plus exactement dans la percussion contemporaine au sens où les Percussions de Strasbourg, se sont fait connaître, on pense ici à l’arsenal des timbales, marimbas, cymbales et autres gong utilisés couramment dans les ensembles de percussion.
Après six décennies d’activités, l’institution française s’est renouvelée, ses interprètes tendent à maîtriser tous les vocabulaires percussifs, de l’électro au rock au jazz contemporain en passant par diverses traditions non occidentales. Par exemple, le jeu simultané de quatre batteries sur fond électroacoustique incluant un déferlement de noise, de darkwave ou même d’échantillons traités de riffs de guitares harcdcore/métal, s’avère plus que concluant pour rafraîchir toute proposition associée au corpus contemporain.
Chez Jodlowski, nous ne sommes plus dans un seul sillon, mais bien dans l’assemblage et l’intégration de référents multiples au service d’une seule esthétique, fort heureusement d’ailleurs.
Par rapport à Ghostland, mes seules réserves résident essentiellement dans la pertinence du troisième tableau (Pulse) par rapport aux deux précédents (Holon-S et Büro) dont la jonction reste cohérente dans la trame dramatique. Les percussionnistes se mettent alors au service d’une chorégraphie et d’une interaction avec la manipulatrice d’objets qui est un personnage en soi. La proposition musicale se fait alors plus mince au profit de la gestuelle ce qui produit une agaçante impression de longueurs… on aurait donc préféré rester au bureau et y suivre la trajectoire des morts-vivants qui y bossent à contrecœur. Mais bon, d’autres vous diront possiblement le contraire…
La Semaine de Neuf de cette année, présentée sous le cadre du Le Vivier, promet d’explorer les liens entre les arts numériques et la musique de création, donnant jusqu’à présent des résultats prometteurs. La représentation de ce soir, une double programmation, a été une autre soirée réussie pour le programme de cette année, qui comprend des performances à caractère multimédia et interdisciplinaire.
La première moitié du programme, Lascaux, a été interprétée et composée par deux artistes électroacoustiques italiens, Giulio Colangelo et Vittorio Montalti, qui cherchent à explorer le moment où l’étincelle créatrice est née dans ces célèbres grottes avec cette pièce. Il est difficile de dire si cet objectif ambitieux a été atteint ou non, mais considéré uniquement comme une expérience sensorielle et audiovisuelle, ce fut certainement un plaisir à vivre. Les deux artistes ont joué avec des sons et des bruits incroyablement tactiles et viscéraux grâce à la magnifique installation son et lumière de la salle du Conservatoire de Musique. Cependant, je n’ai pas été très convaincu par la narration de cette pièce ni ému par son arc, car il révèle beaucoup de choses dans les mêmes textures, mais c’était quand même très agréable.
Le point culminant de la soirée a été cette interprétation éclectique de Mad Max du compositeur français de musique mixte Pierre Jodlowsky, dont l’œuvre est à l’honneur cette année. Sa vision de ce héros hollywoodien est en fin de compte un examen brutal des défauts et des vices souvent associés à de tels personnages : violence, machisme, brutalité. Charles Rambaldo a livré une performance captivante en tant que personnage principal, se frayant un chemin non seulement à travers une post-apocalypse mais aussi une partition musicale incroyablement détaillée qui impliquait beaucoup de coordination de sa part. La composition commence avec l’interprète mimant la conduite d’une moto avec des détails convaincants, avant d’interagir avec une grosse caisse sur laquelle est projetée une bouche. La pièce monte en crescendo dans sa partie du troisième acte avec l’interprète se mettant enfin au vibraphone, menant au moment le plus « musical » de la partition invoquant les sons du gamelan. Certainement une performance très amusante et réfléchie, et qui rendait justice au matériel source explosif.
Semaine du Neuf | Ice : glace, création et immersion
par Elena Mandolini
Samedi soir, au Centre PHI se tenait un concert immersif et contemplatif présenté par l’ensemble Paramirabo. Le programme s’est consacré à trois œuvres du compositeur québécois Jimmie Leblanc, lesquelles se sont enchaînées pour créer une ambiance intime. Un concert dans l’ensemble très réussi, où l’aspect visuel autant que sonore étaient au rendez-vous.
Dès l’entrée en salle, nous pouvons ressentir ce souci d’immerger le public dans l’œuvre dont parlait Jimmie Leblanc en entrevue avec PAN M 360 plus tôt cette semaine. La petite salle installée pour l’occasion au Centre PHI est certes exigüe, on est très proche de nos voisin.e.s, mais cela contribue à nous sentir connecté.e.s entre membres du public, mais également avec les artistes. En étant très littéralement assis.e.s à l’intérieur de l’installation artistique, nous avons vraiment le sentiment de participer à la performance.
La première pièce, …and the flesh was made word. a quelque chose de très joyeux, une énergie dynamique très intéressante. On y ressent une certaine anticipation, comme si quelque chose se préparait, comme si on assistait à la création de quelque chose de nouveau. Cette œuvre est rythmique, guidée par une même note répétée avec une régularité implacable au piano. À cette unique note s’ajoutent des accords plus ou moins dissonants par-dessus. La pièce suivante, Clamors of Being, s’enchaîne presque imperceptiblement : un changement d’éclairage et un changement de la note répétée au piano sont les seuls moyens de comprendre que nous sommes dans la deuxième partie du concert.
On comprend la parenté entre les deux œuvres, où la deuxième vient compléter la première. Ici, les lignes mélodiques sont plus dynamiques, avec des arpèges rapides qui se partagent entre le piano et les instruments à vent. Il y a une grande légèreté, une belle délicatesse à cette œuvre. On se sent flotter, et on est guidé par les mélodies en volutes. Ces deux premières œuvres ont comme trait commun cette note répétée sans relâche, qui agit comme point d’ancrage et de repère, sur laquelle toute la partition peut se construire.
La transition avec la pièce-titre, Ice, n’est malheureusement pas sans embûches. On croit comprendre un problème technique, où les techniciens se déplacent rapidement dans la salle et sur scène. Malgré cela, on tente de garder le public dans cette atmosphère contemplative et immersive qui avait si bien été installée. La pianiste Palema Reimer et la percussionniste Krystina Marcoux continuent de créer une légère ambiance sonore, pour éviter de créer une césure dans l’enchaînement du programme et tout de même animer ce moment de transition, de flottement.
Le programme reprend sous la direction de Cristian Gort pour la pièce Ice, née d’une collaboration entre Jimmie Leblanc, l’artiste Fareena Chanda et le physicien Stephen Morris. Le public est assis à l’intérieur de trois rideaux de tissus métallique, sur lesquels sont projetés le travail de Fareena Chanda, pendant que l’ensemble Paramirabo évoque musicalement la formation de la glace. Dans cette œuvre également, le piano est mis de l’avant avec une magnifique partition, très mélodique. La pièce est ponctuée ici et là d’accords remplis de frictions et de dissonances. L’ambiance est paisible, contemplative, et réellement immersive. Comme tout au long de la soirée, le jeu des interprètes est précis et exact, en parfaite cohésion. Le pari de l’immersion a été remporté.
Il sera possible de faire l’expérience de l’installation le dimanche 10 mars au Centre PHI entre 12h30 et 17h30, et cela gratuitement.
Pour connaître toute la programmation de la Semaine du neuf au Vivier, c’est ICI!
L’OSM et Payare au cœur de la Seconde Guerre… vue et entendue par Chostakovitch
par Alain Brunet
Fin février, Rafael Payare n’aurait certainement pas gagné un prix de direction d’orchestre avec la molle exécution de la Symphonie no 4 de Bruckner. Très moyenne seconde partie de programme, avons-nous conclu au sortir de la Maison Symphonique, avant d’y retourner en ce premier mercredi de mars, soit pour un programme sans soliste invité avec deux symphonies au programme : la 1ère de Beethoven et la 8ème de Chostakovitch.
Le plat de résistance portait justement sur la : la 8e des 15 symphonies du compositeur russe, un chef d’œuvre absolu. En 1943, Dmitri Chostakovitch avait complété l’écriture de cette fabuleuse symphonie dans un esprit de profonde tristesse et de souffrance humaine dans une Union Soviétique éprouvée par les armées nazies ayant à peine remporté contre toute attente la bataille de Stalingrad et pas encore sortie du siège de Leningrad (Saint Pétersbourg). Jugée trop grave, trop sombre, pas assez optimiste et triomphante selon les critiques patentés du régime stalinien, cette symphonie fut mise à l’index pendant de nombreuses années pour être réhabilitée en 1956, soit 3 ans après la mort du dictateur.
Toutes les caractéristiques de cette œuvre magistrale ont été exprimées avec rigueur et passion par l’OSM et son maestro Rafael Payare. La gravité des cordes de son fameux premier mouvement et ses oppositions dans le registre aigu ont dressé la nappe de cette évocation tragique.
Depuis un moment, Chostakovitch avait alors acquis sa pleine maturité compositionnelle, son génie s’exprimait très clairement dans cette symphonie où la modernité de l’harmonisation orchestrale trouvait un équilibre idéal avec le langage romantique l’ayant précédé. De plus, le choix d’un solo de cor anglais, presque frêle, durant ce premier mouvement est intéressant car il exprime le deuil et la souffrance plutôt que la flamboyance et la résilience du peuple russe. Contrairement aux usages compositionnels de l’époque, la violence tangible de cette 8e symphonie (percussions tonitruantes, cordes frénétiques, cuivres martiaux, etc.) se déploie en un relatif décrescendo au 5e mouvement (allegretto, avec soubresauts!) qui se conclut dans le calme, la méditation, le recueillement. Sans pouvoir l’affirmer à l’époque où il devait marcher sur des œufs afin de poursuivre son œuvre et éviter l’élimination par le régime autoritaire.
En première partie de programme, l’OSM aura exécuté rondement une 1re Symphonie de Beethoven, dont le 3e mouvement est annonciateur de sa révolution orchestrale au tournant du 19e siècle. Superbement exécuté, ce mouvement tranche très clairement avec les autres qui tiennent davantage de la synthèse historique et laissent présager le génie orchestral de Ludwig van à venir dans ses 8 autres symphonies.
Pour PAN M 360, l’autrice de ces lignes s’est délectée de cette première représentation riche en couleur, en son et en lumière de la pièce: Alt-Escape. Conçue et interprétée par les créateurs hybrides et virtuoses Julien-Robert et Julien Compagne, elle offre un spectacle alliant les technologies numériques pour inventer des instruments interactifs de toutes pièces offrant une proposition esthétique innovante.
Alt-Escape est une scénographie vivante, mouvante, tactile et exploratoire sur la conception sonore multimédia, plus communément intitulée musiques nouvelles. Sur ce territoire, les artistes ont développé un concept alliant les arts de la scène, le mapping, la performance sonore, les jeux de lumière et de laser interactifs ainsi que la création alliant les cinq sens afin de transformer chaque parcelle de la scène en un immense orchestre électronique. En outre, la trame sonore était instillée par le biais d’un scénario progressif et évolutif tel une trame cinématographique.
En guise de prologue, les créateurs-virtuoses amorcèrent le jeu en étant chacun placé à l’intérieur de cylindres à la texture translucide où des mappings étaient projetés. Les musiciens se sont lancés dans un dialogue percussif de tom et de multiples caisses claires. Progressivement, la scène se transformait au gré des ajouts de pièces musicales liées à l’introduction d’un nouvel objet: écran, mur de projection, laser, tapis…chacun de ces éléments était truffé de capteurs sensoriels permettant un alliage de rythmes, de synthétiseurs, de percussions, de nappes, d’effets amenant ainsi à une délectable mise en texture.
Le corps des artistes était de même au service de la performance étant donné qu’ils se déplaçaient pour moduler les sons, lancer des boucles, créer le décor in situ et ce, pendant plus de 60 minutes explorant les notions de la gravité, de la physique et du temps.
Le spectacle est offert gratuitement sous réservation pour Montréal en Lumières. PANM360 vous le recommande vivement!
Notons au demeurant que cette oeuvre s’intègre à l’ouverture de La Semaine du Neuf 2024, présentée en collaboration avec le cluster montréalais des instituts culturels des pays membres de l’Union européenne (EUNIC) et du Conseils des arts et des lettres du Québec, du Conseil des arts de Montréal, du Conseil des arts du Canada et de la Ville de Montréal.
Il est aussi à noter que le Cluster Montréalais de l’EUNIC (European National Institutes for Culture) est porté par le Goethe-Institut, le Consulat général de France de Québec à Montréal, le Consulat général de Suisse à Montréal, la Fondation Pro Helvetia, l’Istituto Italiano di Cultura Montreal, Wallonie Bruxelles International et le Forum culturel autrichien à Ottawa.
Après le succès de la 1ère édition, en 2023, ce nouveau festival des musiques nouvelles est de retour du 1er au 18 mars 2024.
DÉTAILS:
Idéation : Julien-Robert, Julien Compagne, Oriol Tomas, Milan Gervais Direction de création : Oriol Tomas, Milan Gervais Direction artistique, conception audio-visuelle : Video Phase – Julien-Robert, Julien Compagne Performance : Video Phase – Julien-Robert, Julien Compagne Programmation : Julien-Robert Scénographie : Simon Guilbault Conception éclairage : Martin Sirois Conception vidéo (transitions) : Matthew Schoen Conception électronique : Martin Marier Programmation Unreal et conception sonore : Gabriel Ledoux Direction de production : Onil Brousseau Consultation Unreal et impression 3D : Maxime Déléris
Partenaires : Conseil des arts du Canada, Conseil des arts et lettre du Québec et Conseil des arts de Montréal
Les 7 doigts – Lab7, Quai 5160, Centre culturel Notre-Dame-de-Grâce, Stereolux, Xn Québec – JAM360, Oufsst, Salle Maurice O’Bready et Théâtre de la ville de Longueuil
Une présentation de Vidéo Phase et du Vivier dans le cadre de la Semaine du Neuf 2024 et de la Nuit Blanche à Montréal.
UdeM | La Flûte enchantée, Mozart entre tradition et modernité
par Elena Mandolini
Cette année, les étudiantes et étudiants de la Faculté de musique de l’Université de Montréal présentent La Flûte enchantée de Mozart. Les interprètes ont réussi à faire honneur à l’œuvre de Mozart, qui comporte tout de même des airs archiconnus, en démontrant une belle cohésion tout au long de la soirée, éclipsant de aisément les quelques bémols.
La Flûte enchantée de Mozart, le dernier opéra du compositeur, est considérée par plusieurs musicologues comme une œuvre maçonnique. En effet, l’allusion y est à peine voilée, avec la récurrence du nombre trois et l’initiation qui prend place dans l’opéra. Quoi qu’il en soit, les valeurs qui sont promues sont universelles : l’amour et la fraternité. Pour cette mouture, le metteur en scène, Patrick R. Lacharité, a voulu ancrer ce récit dans notre époque, pour contrebalancer en quelques sortes un livret d’opéra qui peut parfois faire grincer des dents en 2024, avec un bon nombre de remarques du genre « la femme a besoin de l’homme », etc. Transposition réussie, entre autres par les costumes, qui allient robes et capes d’une autre époque à pantalons déchirés et sweatshirts modernes. Le contraste est visible, sans être dérangeant.
Également, la scénographie est minimaliste, et fait appel aux projections vidéo de Gabriela Hébert pour créer les ambiances et suggérer les lieux. Cette approche contribue également à jeter des ponts entre passé et présent. Les projections laissent à voir des formes abstraites, qui suggèrent plutôt que prescrivent des lieux et des ambiances, et on apprécie. Visuellement, tout concorde, et les changements subtils dans les éclairages et éléments sur scène permettent d’évoquer tantôt une forêt, tantôt un temple.
Un bémol à mentionner : la disposition de la salle ne laisse cependant pas l’occasion à tout le monde d’assister à cette représentation de la même manière. L’orchestre est assis sur des praticables qui allongent la scène, installés à la place des quelques premières rangées de sièges. Les personnes détenant des billets dans les premières rangées accessibles se trouvent alors avec une vue obstruée, en particulier sur les côtés, faisant en sorte que les interprètes sur scène sont parfois même cachés par des éléments du décor. Les personnes plus loin au parterre, ou encore mieux, au balcon, ont pu profiter pour leur part d’une très bonne vue d’ensemble.
Musicalement, les interprètes sont solides. L’orchestre est précis et dynamique sous la direction de l’excellent Jean-François Rivest. L’équilibre est très bon tout au long de la soirée et le dialogue entre l’orchestre, chanteuses et chanteurs est fluide. Vocalement, les interprètes sont également de grande qualité. Les voix sont toutes magnifiques, et chaque personne interprète son rôle de manière convaincante, avec une mention toute spéciale à Papageno (interprété ce soir-là par Justin Domenicone). Papageno est le personnage comique de l’opéra, et il nous fait beaucoup rire, un grand succès!
Crédit photo : Dominick Gravel
L’interprète de Pamina, Maud Lewden, est également très touchante dans ce rôle. Dans ses duos avec Tamino (Emmanuel Raymond) et dans ses solos, elle démontre une grande sensibilité vocale, et son jeu transmet les états d’âme du personnage. Également, la Reine de la Nuit, interprétée par Marion Germain, est impressionnante. Outre son fameux air du deuxième acte, bien réussi, sa présence sur scène inspire la crainte demandée. On apprécie également les interventions du chœur, bien balancé et puissant. Dans l’ensemble, cependant, le jeu est un peu statique, les interprètes se déplaçant peu sur scène durant les airs. Cela dit, l’ensemble des interprètes occupe l’espace et sait se l’approprier.
Crédit photo : Dominick Gravel
Cette version de La Flûte enchantée vaut certainement le détour. La mise en scène se veut un commentaire sur la pertinence des œuvres du passé dans notre monde contemporain, et remporte son pari haut la main. La mise en scène épurée et évocatrice offre plusieurs éléments de réflexion. Il s’agit également d’une occasion parfaite pour découvrir les jeunes talents et de profiter, par le fait, même d’une très agréable soirée de musique.
Une autre représentation aura lieu le samedi 2 mars à 19h30 à la Salle Claude-Champagne de la Faculté de musique de l’Université de Montréal. INFOS ET BILLETS ICI!
Pour connaître les prochains événements à la Faculté de musique de l’Université de Montréal, c’est ICI!
Planante et (trop) discrète musique de Missy Mazzoli
par Frédéric Cardin
Mercredi soir le 28 février, la salle Bourgie recevait la violoniste Jennifer Koh et la compositrice et pianiste (claviériste) Missy Mazzoli dans un type de concert encore rare à Montréal, d’où le titre de ce texte. Discrète cette musique en effet, parce qu’à Montréal elle demeure encore trop peu reconnue. Pourtant, Mazzoli est l’une des plus importantes créatrices musicales de l’heure. Ailleurs en amérique anglo-saxonne, elle est une star en ascension. J’y reviendrai.
Le programme présenté à Montréal faisait partie d’une tournée des deux musiciennes et amies célébrant quinze années de collaboration. Étaient regroupées des œuvres de Mazzoli, soit écrites pour violon solo ou en duo avec piano (ou clavier synthétiseur). D’une parfaite cohérence organique, ce programme était déployé tel un grand voile fin parcouru de mouvements ondoyants qui enflent et désenflent le tissu sonore, dans un tout stylistique assez planant et résolument post-minimaliste.
Le résultat final donne une idée imparfaite de la contribution musicale de Mazzoli à ce début de 21e siècle car sa production est vastement plus complexe et étoffée que le programme relativement monochrome d’hier. Écoutez par exemple son superbe Concerto pour contrebasse Dark With Excessive Bright, son opéra Proving Up, ou These Worlds in Us pour orchestre, et vous comprendrez mieux.
Cela dit, ce concert parcouru de très beaux moments d’intangibilité et de spiritualité contenue était important car il présentait à Montréal un encore trop rare concert de ce que je qualifie de réelle ‘’musique de notre temps’’. Une musique savante qui croise le besoin de retour à la tonalité avec les possibilités sonores héritées de l’avant-garde moderniste, les influences savantes avec les vernaculaires, les atmosphères impressionnistes et affectives avec les textures plutôt issues de l’indie pop/rock, ou de l’électro. Étant donné que Montréal est depuis longtemps l’un des pôles les plus créatifs en musique contemporaine d’avant-garde sur le continent, la connaissance, et encore plus l’appréciation, de la nouvelle musique post-moderne se fait attendre.
Ce n’est pas pour dire que cette musique est meilleure que la musique contemporaine ‘’traditionnelle’’. Que nenni. Il s’agit seulement d’un changement de paradigme. La musique contemporaine traditionnelle, avec ses univers abrasifs et abstraits, est en vérité un outil, une façon de faire hyper concentrée sur un formalisme intellectuel. Il peut en résulter des œuvres de fabuleuse beauté suprasensible. Au contraire, la nouvelle musique contemporaine vise, dans une démarche infiniment plus holistique (ou inclusive), la création de nouveaux mondes sonores et surtout émotionnels, en ne se refusant aucun outil ou technique compositionnelle.
La première carbure au savoir rigoureux, en suscitant parfois des émotions. La deuxième carbure aux émotions et à l’imagination, en se servant d’un certain savoir, suscitant parfois de la transcendance.
Bref, merci à Olivier Godin, Directeur artistique de la salle Bourgie d’avoir à cœur l’avènement d’une culture d’écoute montréalaise de cette musique que nous ne pourrons pas longtemps continuer de méconnaître.
Burna Boy remplit presque deux Centres Bell : le Nigeria à nos portes !
par Alain Brunet
Au cours des soixante dernières années, l’Afrique a popularisé en Occident certaines de ses stars les plus remarquables : Miriam Makeba, Fela Kuti, Touré Kunda, King Sunny Adé, Alpha Blondy, Youssou N’Dour, Salif Keita, Angélique Kidjo, Oumou Sangaré, Tiken Jah Fakoly et autres Yemi Alade. Le dernier frontman noir et non occidental ayant rempli un grand aréna canadien en tant que tête d’affiche fut Bob Marley… qui n’était pas natif du continent de ses aïeux, c’est dire !
Hors de l’Afrique où ils remplissent des stades en un claquement de doigts, aucun des artistes cités n’a eu eu en Amérique du Nord un tel impact que celui observé cette semaine. Il existe désormais une exception africaine, la première d’une longue série.
Burna Boy entre dans l’Histoire cette semaine, 18 mois après avoir fait sensation à Osheaga (août 2022), ce qui fut un signe précurseur de l’invasion de l’Amérique du Nord par la mouvance afrobeats, issue du Nigeria. Premier artiste africain à jouer deux fois de suite dans les centres Bell, le frontman incarne une transformation globale de la culture pop. Wow.
Environ 30 000 fans se seront rendus au Centre Bell cette semaine, deux soirs de suite, pour applaudir la plus grande star du mouvement Afrobeats, un style non occidental qui s’est mondialisé. L’influence de ce style se compare favorablement à d’autres mouvements puissants nés en dehors des États-Unis et de l’Europe occidentale, à commencer par le reggae et le reggaeton.
Jeudi soir, donc, un aréna bondé de diversité. Majoritairement peuplée de la génération 18-30 ans, la foule a chanté les propositions de DJ Lambo, une artiste de Lagos, l’une des premières parties d’un vaste programme ayant débuté vers 19h40 et qui s’est achevé peu avant minuit. Également du Nigeria, la chanteuse Nissi Ogulu aura fait de son mieux (avec des hauts et des bas, pour parler poliment) et le premier DJ du programme, Spaceship Billy, reviendra chauffer la salle avant que Burna Boy ne triomphe pendant deux heures. Généreux !
L’aire de jeu est un décor urbain inspiré d’un quartier populaire de Lagos. Une cabine téléphonique est installée devant plusieurs commerces de proximité, dont un barbier et une épicerie. Les 4 anches et cuivres surplombent la scène sur la droite, tandis que les 3 choristes font de même sur la gauche. La batterie et les percussions sont disposées aux extrémités, et le noyau harmonique de 4 musiciens (claviers, guitares, basse) se trouve au centre. Un trio de cordes (violon, alto, violoncelle) apparaît à quelques reprises, tandis que 6 danseurs s’expriment tout au long de ce spectacle des plus ambitieux.
Burna Boy est à la fois frontman, leader d’orchestre, crooner, groover, sex symbole au physique d’athlète, taillé au couteau il va sans dire. L’ascendant sur la gent féminine est plus qu’évident, ces dames sont clairement majoritaires à chanter avec lui ses mégatubes, particulièrement ses ballades romantiques.
Côté PAN M 360, on a préféré les groove afrobeats, épidermiques pour la plupart, mélange contagieux de dancehall, reggaeton, afro-funk, juju, konpa, soul/R&B ou même jazz, assorti d’une importante couche de culture nigeriane. Parmi la trentaine de chansons au programme, on aura remarqué l’exécution des succès suivants: I Told Them (également le titre de la tournée), Gbona, Pull Up, On The Low, On Form, Giza et plus encore.
Nous savons tous que l’humanité traverse une période critique de sa présence sur Terre, mais il n’y a pas que des mauvaises nouvelles. Le rééquilibrage des forces culturelles planétaires en est une bonne ! Burna Boy est là pour nous rappeler qu’il y a toujours de l’espoir pour les humains de bonne volonté.
« In the Half-Light » – Barbara Hannigan avec l’Orchestre symphonique de Montréal
par Varun Swarup
Sous la direction de Rafael Payare, Barbara Hannigan, accompagnée de l’OSM, a livré une interprétation envoûtante de la composition de Zahra Di Castro, In the Half-Light. Comme le titre lui-même le suggère, cette œuvre est une exploration des espaces liminaires du crépuscule et de l’aube, tissant un récit fragile qui oscille avec grâce entre les moments de tension et de résolution, entre la lumière et l’obscurité. La composition, un cycle de chansons comportant des textes de l’écrivain malaisien Tash Aw, transcende la simple musicalité pour approfondir les thèmes du déplacement humain, reflétant les aspirations et les rêves des migrants, des réfugiés et de ceux qui recherchent une lumière métaphorique ailleurs.
L’œuvre, à juste titre chargée de tension, incorpore des textures cinématographiques et impressionnistes rappelant Ravel et Lili Boulanger. Hannigan, réputée pour sa virtuosité et sa maîtrise du répertoire contemporain, a habilement donné vie au drame inhérent à la composition de Di Castro. Ses prouesses vocales, marquées par un riche vibrato qui remplissait sans effort la Maison Symphonique, révélaient non seulement une maîtrise technique mais aussi une profonde profondeur émotionnelle. Chaque note dégageait un sentiment d’authenticité, en résonance avec l’intégrité avec laquelle Hannigan a abordé la performance.
Même si l’impact global de la pièce était indéniablement puissant, toute critique potentielle pourrait être dirigée davantage vers la nature de l’œuvre elle-même que vers l’exécution de Hannigan. Comme c’est souvent le cas dans de nombreuses compositions contemporaines, In the Half-Light s’aventure au-delà des structures tonales traditionnelles, embrassant la dissonance pour transmettre des nuances thématiques plus larges. Même si cela ne correspond pas toujours aux préférences musicales conventionnelles, cela répond à un objectif narratif, soulignant les thèmes plus larges de la composition. Malgré des moments de dissonance, ces choix n’ont fait qu’amplifier l’impact des moments lumineux, où les subtilités de l’orchestration de Di Castro se confondaient harmonieusement avec la mise en scène de Payare et l’exécution délicate de Hannigan, créant des moments proches du sublime.
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