chant lyrique / classique occidental / opéra / opérette

Festival d’art vocal de Montréal 2024 | Une Chauve-Souris de haut vol pour l’ICAV

par Alexis Desrosiers-Michaud

Ce dernier week-end avait lieu, au Salon Richmond, le concert final de l’édition 2024 du Festival d’art vocal de Montréal de l’Institut d’art vocal du Canada (ICAV). Pour l’occasion, les jeunes chanteurs et chanteuses stagiaires de l’institut proposaient la version française de La Chauve-Souris de Johann Strauss II, intercalée par The Four-Note Opera de Tom Johnson. Nous y reviendrons.

La mise en scène signée Lorraine Pintal était très ingénieuse. Le Salon Richmond étant une ancienne église convertie en salle de concert, il n’y a évidemment pas de fosse et donc, l’Orchestre classique de Montréal, dirigé par Simon Rivard, était placé en fond de scène. Le terrain de jeu pour les chanteurs étant assez restreint, il n’y a pas de place non plus pour des décors. L’enceinte de l’église, avec ses hauts plafonds desquels pendent trois lustres imposants, contribuait cependant à plonger le spectateur dans l’atmosphère des salles de bal viennoises du XIXe siècle.

Il s’agissait là d’une belle utilisation de l’environnement et de l’espace pour pallier l’absence de décors. Lorraine Pintal a également eu la judicieuse idée d’ajouter un personnage de narrateur afin de donner du relief à l’environnement scénique imaginaire qui se développe devant le public. Toujours sur scène, ce personnage (excellent Ludovic Jean) à l’allure oscillant entre l’esthétique des films de Tim Burton et du Joker ne se contente pas de simplement nous situer dans l’espace, mais vit intensément chaque scène et la commente à sa manière. Même lorsqu’il n’était pas au premier plan, c’était amusant de le voir prendre un très malin plaisir à savourer les multiples malaises de cette histoire. 

Vocalement, c’est une distribution de très haute qualité à laquelle nous avons eu droit. Malgré le fait que le public était très près des chanteurs, nous n’avons aucune raison de douter que toute cette distribution se serait bien fait entendre dans une plus grande salle tant la projection et le coffre étaient au rendez-vous. La soprano Meghan Henry (Rosalinde) gagne des points en y allant avec finesse et retenue dans son air de la Czardas et elle a pu démontrer l’impressionnant contrôle de sa voix tout au long de l’après-midi. Les barytons Diego Valdez (Eisenstein) et Brian Alvarado (Dr. Falke) projettent beaucoup en solo, mais s’ajustent lorsqu’ils chantent dans les numéros d’ensemble. Mentionnons également l’assurance de Théo Raffin (le directeur de prison Frank) et de Maëlig Querré dans le rôle du Prince Orlovsky, un rôle qu’elle a déjà campé en 2023 dans la production de l’Université de Montréal. Malheureusement pour Natalia Perez Rodriguez (Adele) – qui possède une très bonne et solide voix claire – sa prononciation du français n’est pas maîtrisée au point que cela détonne avec le reste de la troupe et plombe sa prestation. Derrière, l’Orchestre reste vigoureux et discret, mais il y a parfois des décalages lors des numéros de groupe, malgré la présence d’une cheffe relayeuse en avant-scène.  

« Dans la tradition du grand bal royal, le Prince Orlovsky offre un moment de divertissement. Place au cadeau lyrique du Prince! Place au Four-Note Opera ! » C’est ainsi qu’est présentée l’œuvre de Tom Johnson, dans une mise en scène de Joshua Major. Cet anti-opéra composé d’uniquement quatre notes (lasi et mi) est une caricature de l’art opératique et se moque sans merci de tous les clichés et stéréotypes qui l’entoure. Les paroles décrivent soit le procédé musical en cours (« This duet is a set of variation on a simple melody ») ou encore les émotions que vivent les chanteurs, par exemple le stress de devoir chanter a capella et de terminer sans détonner. C’est absurde et assumé, et plusieurs numéros font mouche. Les quatre chanteurs principaux sont aussi excellents ; Mary Jane Egan (soprano) a l’occasion d’en mettre plein la vue avec des vocalises et Hannah Cole (contralto) se surpasse dans le numéro a capella cité plus haut et projette une belle résonance dans les graves. Quant à Sébastien Comtois, il épate avec un très bon contrôle des notes piano dans l’aigu. Enfin, le baryton Brian Alvarado (encore lui!) démontre des qualités athlétiques dans ses arias qui lui demandent énormément d’énergie. Bref, c’est sympathique et très drôle par moment, mais long pour un interlude, au point où on se dit à la fin : « Ah, c’est vrai, il faut terminer le programme principal. »

Le maillon faible de cette production est sans contredit les surtitres français. Disposés sur quatre écrans installés de chaque côté de la scène, ceux-ci étaient souvent en retard sur l’action et les mots écrits n’étaient pas toujours les mêmes que ceux prononcés par les chanteurs. Le plus gênant, cependant, était les fautes d’orthographe et d’accords des participes passés qui se glissaient ici et là, quand ils ne disparaissent pas totalement à la fin du Four-Note Opera.

crédit photo: Baptiste Jehl

Présence autochtone | IA, soul pop maorie sous la pluie

par Alain Brunet

De Nouvelle-Zélande, les instruments traditionnels maoris sont intégrés à une soul pop incarnée. Les leaders de cette formation ont visiblement réfléchi à leur hybridation, car les profanes ressentent probablement l’esprit pop avant d’en découvrir les parfums maoris.

Le collectif de musique Māori IA mélange le taonga pūoro et la pop électronique pour ainsi générer un son singulier. Le chanteur s’exprime surtout en langue indigène et aussi en anglais, à l’image de la vraie vie dans le pays natal

On a devant nous de vrais pros de la pop mâtinée de soul/R&B , la voix chaude et juste du soliste (Reti Hedley), les harmonies des claviers et le groove de la basse (Moetu Smith) ne mentent pas. Les instruments traditionnels, surtout des flûtes et percussions, deviennent les ornements maoris d’une pop globale dont les référents de base sont connus de quiconque le moindrement connecté sur cette planète. L’enjeu de la réussite de IA repose sur cette question : doit on vraiment rechercher l’équilibre entre culture locale et culture globale? Chez IA cela semble être une préoccupation sincère et légitime pour atteindre cette idendité artistique nommée indigenous soul music. Basé à Waikato, le groupe se consacre à la mise en valeur du taonga puoro et du Te Reo Māori dans sa musique.

Encore une fois, il est dommage que les restes généreux de la tempête Debby aient commencé à s’abattre sur Montréal, car IA aurait pu susciter beaucoup plus d’intérêt auprès des mélomanes curieux de voir où en est la pop autochtone en Océanie.

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Présence autochtone | Manawan hip-hop nation

par Alain Brunet

Yann Ottawa alias The RZMN, de la Nation Atikamekw de Manawan, requiert toute notre attention, car il nous en apprend sur la vie de sa nation, privée ou publique. Avec son frère, il rappe et chante en atikamekw, il mise sur des accords dramatiques pour enrober son flow et ses lignes mélodiques, parfois filtrées à l’autotune, et enclines à la mélancolie. Il y avait de la musique dans la famille Ottawa, son père joue de la guitare et son frère aime la percussion.

Visiblement, il plus enclin au hip-hop, au reggaeton, au rap keb puisqu’il s’exprime beaucoup en français – et aussi dans sa langue maternelle. En 2022 Yann Ottawa a lancé avec ses frères sa première mixtape, Bigman Recordz, Vol. 1.

Malheureusement sous la pluie en ce jeudi soir, RZMN et ses collègues se sont produits sur la grande scène de la Place des Festivals devant une plantation de parapluies. Sous les parapluies, cependant, les humains restaient captivés. Devant les parapluies, assurément, il y avait un rap maîtrisé, il y avait des accroches, il y avait des refrains, il y avait de vraies histoires sur la vraie vie en terre Atikamekw, il y avait du vrai beatmaking, il y avait un vrai bon show de rap autochtone qu’on devra revoir et réentendre.

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avant-rock / rock prog

Présence autochtone | Subhira Quinteto, avant-rock contemporain et culture mapuche

par Alain Brunet

On dit de Subhira Quinteto qu’il est un des ensembles les plus innovants du Chili. Le groupe existe depuis plus d’un quart de siècle et jouit d’une belle réputation internationale, et parcourt le circuit des musiques du monde. Visiblement, Montréal ne figurait pas encore dans les villes conquises jusqu’alors, c’était le temps d’un rattrapage sur la Place des Festivals, le mercredi 6 août.

Leurs compositions intègrent des musiques autochtones à une sorte d’avant-rock contemporain, assez savant pour ses choix rythmiques (presque toujours des mesures composées) et son esthétique prog rock ou math rock assortie de musique contemporaine occidentale. Leur leader, claviériste et compositeur, Subhira (Rodrigo Cepeda) est bardé de prix, professeur de composition à l’École de Musique Moderne et dirige le label Mundovivo. La formation paritaire est composée de l’excellente batteure Emai Cepeda, de la violoniste Danka Villanueva et de la flûtiste Ema Morales , sans compter le violoncelliste Juan Angel Muñoz, qui fut violoncelle solo l’Orchestre Philharmonique de Santiago, a joué en tant qu’invité avec d’innombrables artistes et orchestres nationaux et internationaux.Un membre externe de l’équipe chilienne, Khano Llaitul Fernández, interviendra pendant une bonne partie du concert. On dit de cet artiste et activiste autochtone de culture mapuche qu’il a accompli un travail remarquable en tant que conseiller en thématiques indigènes, en éducation, en dramaturgie, en musicologue mapuche, en diffusion de l’art, de la culture et des droits indigènes. On l’entend déclamer,, agiter des cloches et grelots, souffler dans des instruments traditionnels. Voilà une belle exécution de concepts et actualisations culturelles typiques des artistes les plus ouverts au cours des années 70, 80 et 90.

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L’OM, YNS et Alexandra Stréliski au pied du mont Royal: que du bonheur montréalais

par Alain Brunet

Il faudrait être de (très) mauvaise foi, il faudrait bouder niaiseusement son plaisir pour ne pas admettre les bienfaits d’une telle communion urbaine. Montréal est l’une des rares villes de cette taille à bénéficier d’une telle ouverture et d’une telle écoute de sa population. En ce crépuscule du mardi 6 août, au pied du mont Royal comme c’est le cas à chaque été montréalais, l’Orchestre Métropolitain et son chef Yannick Nézet-Séguin ont généré du bonheur pour plus de 60 000 personnes ouvertes à une telle expérience.

Les airs très connus de la suite Carmen, tirée du fameux opéra de Bizet, ont constitué l’introduction et la conclusion de ce ce concert généreux et bien conçu dans un tel contexte. Question de mettre des balises connues afin d’attirer le public sur des pistes qui l’étaient moins, la direction artistique de l’OM a arrêté ce choix parmi de nombreuses évidences du répertoire classique. Le son n’était pas à son meilleur d’entrée de jeu mais les ajustements de la technique n’ont pas tardé à en améliorer considérablement l’intelligibilité. 

L’OM a ensuite exécuté une œuvre courte du pionnier québécois Claude Champagne, que l’on pourrait qualifier de néo-classique avant le temps, car les insertions de musique traditionnelle en dominent la facture. Joli.

Le compositeur québécois Maxime Goulet était présent pour l’exécution de son œuvre, Citius, altius, fortius! , dédiée cette fois aux olympiens qui se démènent à Paris, mais aussi aux instrumentistes dont la tâche est aussi athlétique – nous a rappelé YNS. À la fois chargée et consonante, l’œuvre est justement conçue pour de telles circonstances, et assez substantielle  pour satisfaire tout amateur de musique classique moderne. L’esprit de Leonard Bernstein était dans l’air, d’autant plus que YNS a collaboré de près à la trame sonore du film Maestro de Bradley Cooper lui étant consacré. Fancy Fee est une œuvre de jeunesse de Bernstein, comportant plusieurs caractéristiques de son œuvre éclectique, a été jouée avec rigueur et inspiration. 

La posture progressiste du directeur artistique de l’OM le mène aussi à faire la part belle aux femmes compositrices. Ainsi, les Américaines Florence Price et Amy Beach ont déjà été jouées par l’Orchestre Métropolitain, c’était l’occasion de offrir ce 3e mouvement  (Juba Dance) de sa Symphonie n° 3 en do mineur aux dizaines de milliers de profanes qui  n’en connaissaient pas l’existence.  Dans un esprit de fusion des musiques afro-descendantes et de la musique classique américaine au début du 20e siècle, Florence Price avait fait sa marque de son vivant, mais fut longtemps sous-estimée par l’Histoire de la musique jusqu’à une période récente. 

Dans une moindre mesure parce qu’elle était blanche de peau, Amy Beach n’était pas non plus passée à l’Histoire dans un monde plus misogyne de son vivant qu’il ne l’est aujourd’hui. Et c’est surtout parce que cette Symphonie gaélique, la première composée par une femme américaine (1894), mérite absolument d’être découverte et appréciée pour ses qualités propres. Fin pédagogue, YNS a  d’ailleurs pris soin d’en expliquer chacun des mouvements plutôt que d’insister sur le décorum – normalement, on n’applaudit pas entre les mouvements mais bon, il ne faut pas en faire une maladie. En territoire inconnu, cette immense foule a fait preuve d’une écoute exemplaire pendant que le soleil répandait ses braises dans le firmament avant de disparaître jusqu’aux aurores.

L’animateur de la soirée, Pierre-Yves Lord, a ensuite convié la pianiste et compositrice vedette Alexandra Streliski à exécuter deux œuvres pianistiques avec l’OM et YNS qui lui en ont ajouté un galbe symphonique.  Inutile d’ajouter que le public a très majoritairement savouré ce segment néo-classique prévu par le chaleureux maestro et directeur artistique. Bienveillance et ouverture!  
Quand il n’y en a plus, il y en a encore! Comme ce fut le cas en 2022, A Fifth of Beethoven, fameuse version disco du fameux thème de l’archi-connue 5e symphonie de Ludwig van Beethoven, un mégatube de Walter Murphy à l’époque, fut offerte au dessert avec la participation d’Alexandra Stréliski. On conclura le tout avec des extraits de Carmen, et on se dira que Montréal demeure cette ville si spéciale, si unique pour que de tels manifestations s’y produisent.

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Osheaga Day 2 : Every Dog Has Its (Green) Day

par Lyle Hendriks

First and foremost, let me declare my respect and fealty for Green Day. As one of the all-time greatest bands to walk the Earth, there’s no denying the influence and importance of their early catalogue—a fact that they seem keenly aware of, considering their tour for their new album, Saviors (Reprise Records, 2024) is actually just them playing Dookie (Reprise Records, 1994) and American Idiot (Reprise Records, 2004) in their entirety.

Green Day’s new music is not good. It’s a washed-out imitation, trying to recapture not only the glory days of the band itself, but also anything even remotely popular from the pop-punk and alt-rock world in the last 20 years. And again, it seems that Green Day is completely aware of this fact, playing only a handful of songs off their new release, and then diving into an hour and a half of songs that we’ve all heard a million times.

Is it cool to see “Holiday” and “Basket Case” live? Sure, kind of. They sound exactly like they do on the recordings. Billie Joe Armstrong’s stage banter is well-rehearsed and devoid of surprise (except for when he forgets where he is in the song and asks what verse he’s on). Mike Dirnt keeps it locked down, playing root notes on bass like someone who makes a million dollars per year playing root notes on bass. Drummer Tré Cool, for all of his skill, resembles a Weekend at Bernies-esque meat puppet being controlled by a grip backstage. 

So what’s my problem? Green Day has atrophied around these ancient songs like a brittle old muscle, becoming aging, Botox-bloated men in denial who refuse to let any new life into their performance, only bothering to release a new album in order to have an excuse to play their old ones. For a band who made their mark as rebels, outlaws, and societal outcasts, I can’t pick out a single thing that’s now punk about Green Day. Between songs, I thought Armstrong might finally come out and say something that meant something. Perhaps he’d use his bulletproof status and inconceivably massive platform to speak out on the injustice that they claim to be against. 

But what do we get instead? Lame platitudes about ignoring the « propaganda » and « focusing on the music and being together. » Spineless, empty rhetoric like this is insulting, and he would have been better off telling the truth: “I don’t give a fuck about anything except making money off of you suckers.”

After being treated to the incredible Mannequin Pussy (who spent much of their precious set time ferociously attacking the church, rich white men, and the Palestinian genocide) the day prior, I couldn’t have been less impressed with the substance behind Green Day’s performance. With all due respect to the incredible achievements of Green Day over the past 37 years, it’s time for these old men to step aside.

Photos by Tim Snow

Osheaga, jour 2 : No Waves s’impose

par Lyle Hendriks

Si vous voulez mon avis, Osheaga devrait être rempli à ras bord de groupes locaux. Et bien que j’aie des problèmes avec la programmation de cette année, il y a un groupe qui a bien fait les choses : Le trio montréalais de surf punk No Waves.

Rapide, thrashy, mais amusant, No Waves a une énergie incroyable sur scène, remplissant plus que l’espace de la scène caverneuse d’Osheaga. Je ne suis pas certain d’avoir déjà vu un groupe aussi enthousiaste à l’idée de jouer, et l’énergie est rapidement devenue contagieuse alors qu’on voyait le guitariste/chanteur Angel Parra Vela sprinter à travers la scène, grimper sur les moniteurs et s’arrêter pour embrasser le bassiste Cyril Harvin Musgni sur la joue. Pendant ce temps, les percussions du batteur Sam Sussman, à la fois tonitruantes et étrangement éloquentes, nous maintenaient sur la bonne voie.

Depuis sept ans, il n’y a que ces trois-là, un groupe formé à l’adolescence et forgé au fil d’innombrables concerts dans des sous-sols et de concerts illégaux de bricolage. C’est cette exubérance brute qui rend No Waves si captivant à regarder. Il y a une aisance et une familiarité dans chaque mouvement, une complicité indéniable entre cet ensemble serré qui donne l’impression que c’est facile.


Alors quand Sam hurle dans le micro tout en jouant un beat tourbillonnant, quand Cyril se tient debout et délivre une bassline méchante comme s’il était câblé pour le faire, quand Angel bondit sur la scène comme une chauve-souris sortie de l’enfer – on n’a pas l’impression qu’ils font un show, ou qu’ils se concentrent sur le fait d’atteindre les bonnes notes. Ils ont maîtrisé leur son au point de pouvoir livrer une expression brute, sans filtre, utilisant leurs instruments, leurs voix et leurs corps comme des conduits pour livrer une démonstration de feu en direct dont vous ne pouvez pas détourner le regard.

C’est un privilège de voir des groupes établis et mondialement connus sur la scène d’Osheaga. Mais pour moi, c’est encore mieux de voir l’un des groupes montréalais les plus travaillants prendre les devants et tout casser, en apportant toute l’énergie de leurs concerts infâmes de sueur et de fumée à l’institution du plus grand festival du pays. Il aura fallu attendre longtemps, mais ce n’est que le début pour No Waves.

Photos By Benoit Rousseau

Osheaga Day 3: Bladee Leaves Us Drained

par Lyle Hendriks

Everyone has a favourite artist who’s a little hard to explain to the uninitiated. But I don’t know if any fanbase experiences this problem quite like Drainers, the utterly feral fanbase of Swedish multi-hyphenated creator Bladee.

The show got off on a weird foot, to say the least. Following a truly bizarre shitshow of a set from Mariah the Scientist, Bladee opened the set with tracks from their newest album, Cold Visions (Trash Island, 2024), which leans more on the abstract side with its glitchy, early Youtube-esque instrumentals and Bladee’s signature off-kilter rapping style. They stayed this course for the first few numbers as scores of people left the crowd, shaking their heads and grimacing as though they’d just stepped in something. But simultaneously, the core group of Drainers near the front were being whipped into a frenzy, smashing together as though they weren’t all fighting for their lives in apocalyptic heat.

A few songs in, Bladee hit their stride, throwing it back to some of their older songs from previous albums with disgusting beats and scream-worthy hooks, yet never losing the sensitive, almost meek side that makes Bladee such a fascinating artist.  As I took it all in, I realized that this show was not meant to be for everyone—Bladee’s entire performance was for the 60 or so Drainers in the front and no one else. It was for the people who love this weird brand of socially awkward, introverted, Scandinavian drug-dealing music—something that Bladee has a complete and total monopoly on. 


Despite being a lone figure on the expansive void of the Osheaga stage, Bladee had no trouble taking up space, skulking about the space and conjuring a fever pitch in the crowd from thin air. Having now seen them live for the first time, I believe that Bladee may be a witch from the future, sent back to deliver us from the tired, macho bullshit that plagues rap as an art form today.

Photos by Benoit Rousseau

indie rock / pop / soul

Osheaga, jour 3 | Briston Maroney, quand briller semble si facile

par Jacob Langlois-Pelletier

Si la chanteuse britannique Olivia Dean a été mon coup de cœur de la journée de samedi, il n’y a pas de doute à mes yeux que l’américain Briston Maroney a été celui du dimanche.

Natif de Knoxville dans le Tennessee, l’auteur-compositeur-interprète a su charmer les curieux et curieuses amassés près des deux plus grandes scènes, foule qui se faisait de plus en plus imposante au fil de sa prestation. Il n’y a pas de meilleur indicatif pour juger de la qualité du spectacle offert.

Quand on découvre la proposition de Maroney, on entend du Arctic Monkeys, Bob Dylan, The 1975 et un brin de Neil Young. C’est assez éclectique et pourtant, c’est cohérent et ça déchire. Ajoutez à ce son indie-rock/pop/soul une attitude de rockstar et vous avez Briston Maroney.

Vêtu d’une jupe et guitare à la main, le chanteur a débuté en force avec ses morceaux les plus énergiques et ses riffs endiablés se faisaient bien sentir. « J’ai pris l’avion à 4h du matin après mon passage à Lollapalooza. J’ai l’impression qu’un hamster roule dans sa boule d’exercice et qu’en plus, il est sur la cocaïne », a-t-il lancé. Cette folie, les festivaliers l’ont accueillie à bras ouvert, et ce, du début à la fin.

À mi-chemin, Maroney a retiré le pied de l’accélérateur pour servir de ses titres les plus calmes comme la superbe ballade Fool’s Gold. À mon humble avis, c’est dans ces moments que le compositeur y est à son meilleur et se montre le plus vulnérable. Sa voix transmet l’émotion avec sensibilité et authenticité.

Vers la fin de son passage à Osheaga, Briston Maroney a fait monter avec lui une jeune amatrice qui brandissait une pancarte sur laquelle y était écrit « Puis-je venir chanter June avec toi? ». À la grande surprise de tous, l’artiste de 26 ans et cette jeune femme ont réalisé un excellent duo. Quel moment!

Les premières sorties de BM remontent à 2017 et il a déjà deux albums derrière la cravate; force est d’admettre que je suis en retard à la fête. Mieux vaut tard que jamais. Je suivrai avec attention les prochains projets de la jeune vedette.

Crédit photo: Tim Snow

amapiano / soul/R&B

Osheaga, jour 3 | Tyla, tigresse en liberté

par Jacob Langlois-Pelletier

À en juger par l’ampleur de la foule impatiente de voir son arrivée en début de soirée, la présence de la sensation sud-africaine Tyla était l’un des rendez-vous les plus attendus du week-end. La nouvelle princesse (attendons avant de la proclamer reine) de l’amapiano et de la R&B n’a certainement pas déçu avec une prestation enflammée où danse et sensualité étaient de mise. Et dire qu’elle n’a que 22 ans…

C’est sur un tigre géant que la jeune chanteuse a fait son entrée, sous les cris de ses admirateurs et admiratrices. À ce jour, Tyla ne compte qu’un seul projet dans sa discographie, soit son album homonyme. Nul besoin de le préciser, c’est en grande majorité du matériel tiré de son projet paru en mars dernier qu’elle a offert aux festivaliers.

Sur scène, Tyla et sa troupe ont multiplié les moments de danse, comme s’il ne faisait déjà pas assez chaud en cette journée de canicule. Les gens présents dans la foule scrutaient ses moindres faits et gestes puis applaudissaient à chacun de ses déhanchements.

« Il s’agit de ma première fois ici. Je vais m’en rappeler toute ma vie », a-t-elle glissé entre deux morceaux, agréablement surprise de l’accueil chaleureux.

Son interprétation de No.1, excellente collaboration avec la Nigériance Tems, était vocalement brillante, tout comme pour l’ensemble de son set. Tyla surfe depuis plusieurs mois sur le succès de Water, morceau qui l’a propulsé à l’international, et c’est ce titre qu’elle aura réservé pour la toute fin. Une finale de feu pour une performance R&B de grande qualité.

Crédit photo: Benoit Rousseau

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EDM / Moyen-Orient / Levant / Maghreb / pop / reggaeton / soul/R&B

Osheaga, jour 3 | Elyanna, pop arabo-latine très prisée dans les circonstances

par Alain Brunet

Transplantée à San Diego depuis l’adolescence, Elyanna est née à Nazareth comme celui que vous connaissez. Ses origines sont néanmoins distinctes: palestinienne (de confession chrétienne) et aussi chilienne, d’où ces hybridations latino-orientales adaptées à la pop culture de 2024. Inutile de souligner que le noyau dur de ses fans partage ces racines culturelles, drapeaux nationaux à l’appui.

Sa dégaine et son faciès ne sont pas sans rappeler Shakira, superstar colombienne aux racines libanaises du côté paternel. Mais l’approche est ici beaucoup plus prononcée côté oriental:  Elyanna exhibe sa culture arabe sans complexe, elle en évoque directement  les tenues traditionnelles, danses traditionnelles, rythmes traditionnels, mélodies traditionnelles, instrumentation traditionnelle (oud, derbouka, etc.). Elle adapte le tout à une pop semi électro et semi instrumentale des plus efficaces. 

Elle enrichit le tout de reggaeton, EDM et soul/R&B ce qui lui permet de rayonner en Orient comme en Occident, chanter en arabe dialectal à Coachella ou partager la scène avec des stars du Levant et du Maghreb. 

Rompues à la culture arabe, des danseuses contribuent à l’effet wow généré par Elyanna, évoquant comme il se doit les joies et (surtout) les souffrances palestiniennes vécues à l’heure où se déroule son spectacle montréalais. Et magnifiant le personnage fort qu’incarne leur employeure de plus en plus populaire sur la planète pop.

crédit photo: Benoît Rousseau pour Osheaga

hip-hop alternatif / rock

Osheaga, jour 3 | Kevin Abstract a trouvé sa voie

par Jacob Langlois-Pelletier

« C’est le meilleur concert que j’ai fait de ma vie! », a crié Kevin Abstract, quelques secondes après s’être lancé dans la foule. Cet état de joie et d’extase, le rappeur américain l’a conservé du début à la fin, offrant une prestation haute en couleur aux nombreux amoureux de sa musique entassés près de la Scène Verte, dimanche.

Formé en 2014, le défunt collectif BROCKHAMPTON dont Abstract était le fondateur a marqué tout une génération avec leur hip-hop alternatif qui ne cessait de se réinventer à chaque sortie.

Pour plusieurs Montréalais, dont l’auteur de ces lignes, le boys band a cessé ses activités avant d’avoir la chance de les voir sur scène. Ainsi, la venue du natif du Texas représentait l’occasion rêvée de goûter à ce qu’il reste du groupe, mais pas que. La carrière solo de Clifford Ian Simpson n’est pas du tout à négliger; son album ARIZONA BABY est une offrande pop-rap inspirée et que dire de Blanket paru il y a un peu plus d’un an, projet dans lequel il explore le rock comme jamais.

Revenons-en à nos moutons. Kevin Abstract a tout donné l’instant d’un set; il sautait et dansait puis est descendu à de nombreuses reprises pour s’approcher de son public. L’artiste américain a offert autant des titres solos que des couplets issus des différents projets de son ancienne formation, passant de Madonna tiré de Blanket à RZA de The Family. Peu importe le morceau, une seule chose était certaine : la basse allait être à fond la caisse.

Avec une offrande aussi assumée à Osheaga, Kevin Abstract semble enfin s’être affranchi de l’étiquette d’ancien membre de BROCKHAMPTON. Reste à voir quelle sera la prochaine étape de son aventure solo.

Crédit photo: Benoit Rousseau

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