FORUM MUTEK JOUR 1 | Nouveaux horizons : création et curation numérique

par Elsa Fortant

Lors de sa création, le Forum MUTEK se tenait 6 mois avant le festival. En 2018, les deux évènements se sont greffés l’un à l’autre, offrant une perspective unique sur la créativité numérique. Programmée par Sarah Mackenzie et animée par Claudine Hubert, la 9e édition s’intitule « Courants d’avenir » et se tiendra toute la semaine aux 7 doigts de la main. MUTEK nous propose de plonger dans des thèmes diversifiés et dans l’air du temps : la relation entre culture, technologie et la crise climatique ; l’accessibilité, l’inclusion au sein des technologies immersives ; le pouvoir de la tech ; l’art, la gouvernance et l’intelligence artificielle et le futur des festivals. Voici un compte rendu de la première journée.

Crédits photo : Maryse Boyce

Conférence d’ouvertureLes festivals comme rituels radicaux

Frankie Decaiza Hutchinson – fondatrice de Dweller et cofondatrice de Discwoman

En tant que programmatrice du Bossa Nova Civic Club à Brooklyn, Frankie Hutchinson était aux premières loges pour observer l’impact de l’industrie des musiques électroniques sur l’expression des artistes et des personnes noires, c’est-à-dire un manque d’espace et de visibilité. Ça l’a particulièrement frappée lorsqu’un artiste l’a approchée pour organiser un événement spécial à l’occasion du Black History Month. Pourquoi se limiter à un événement, une semaine, un mois ? C’est donc naturellement qu’elle a fini par prendre les devants et créer un espace d’expression pour les talents électroniques issus des communautés noires, sous la forme du Dweller, un festival DIY, lancé en 2018.

Rapidement devenu « un rituel » offrant l’espace nécessaire à une forme de catharsis individuelle et collective, Dweller a grandi au point de s’internationaliser avec un événement au fameux Berghain (Berlin) et de programmer des têtes d’affiche comme Jeff Mills. Avec cette expansion, des questions se posent : comment grandir sans sacrifier l’intimité des événements ? Comment développer son public sans perdre son point de vue curatorial ? Et bien sûr, comment assurer sa pérennisation et son financement ? Chez Dweller, le financement repose en grande partie sur le merchandising et la communauté peut se retrouver et connecter autrement sur un blog, Dweller Electronics, qui comporte une dimension politique. Autant de réflexions intéressantes pour penser le développement d’événements indépendants, imaginer le futur des festivals et leur ancrage communautaire.

Panel Future Festivals : Forger de nouveaux horizons

Maurice Jones, modérateur; Jasmin Grimm, NEW NOW Festival ; David Lavoie, FTA; Naomi Johnson, imagineNATIVE Film | Media Arts Festival

Introduite par Maurice Jones de Future Festivals Lab, la discussion avait pour objectif de questionner le pouvoir des festivals. Les échanges ont débuté par un tour de table sur les enjeux rencontrés par les festivals lors de la pandémie et l’après-pandémie.

David Lavoie du Festival TransAmériques a pour sa part été l’un des 16 initiateurs de la lettre ouverte « Attention, festivals fragilisés » publiée en février 2023 dans Le Devoir. Les signataires ont fait front pour souligner leur fragilité et les enjeux qu’ils partagent, principalement la santé mentale des employé-es, le maintien des événements et leurs modalités. La couverture de cette lettre leur a permis de faire entendre leur voix et d’engager des discussions avec le gouvernement.

Pour Naomi Johnson, la priorité était de payer les artistes, ce qui a fait évoluer la mission du festival en l’amenant à devenir producteur de contenu. Par ailleurs, les expérimentations avec la vidéo sur demande leur ont permis de développer leur public. Naomi Johnson déplore par ailleurs la perte de connaissances institutionnelles lorsqu’il y a un départ dans l’équipe, ce qui rend la tâche de se rendre à « là où on était avant » d’autant plus difficile.

Du côté du NEW NOW Festival, le changement a été assez radical puisque l’événement annuel est devenu biennal, seule façon pour Jasmin Grimm et son équipe de rester en santé. Comme les autres festivals, ils ont dû faire face à l’inflation, la pénurie de travailleur-euses mais c’est surtout l’enjeu climatique qui les inquiète. NEW NOW se tient sur l’ancienne plus grosse mine de charbon d’Europe, Zollverein, à Essen (Allemagne). Ce site historique est classé patrimoine de l’unesco depuis 2001. Par son utilisation passée et présente, ce lieu fait inévitablement réfléchir aux conséquences climatiques des activités industrielles d’hier, et événementielles d’aujourd’hui. Pour cette raison, le festival s’est emparé de la thématique des changements climatiques et a offert des ateliers sur l’autosuffisance à des organisateurs de festivals.

Il est intéressant de noter que le degré de maturité des festivals les amène à expérimenter des enjeux qui leur sont propres. En effet, après presque 40 ans d’existence (création en 1985), le FTA se demande comment rester pertinent face à l’évolution rapide de leur public. Les plus jeunes générations portent des valeurs différentes de celles qui les ont précédées et auxquelles le FTA doit s’adapter. Le processus est déjà amorcé grâce à la nouvelle codirection artistique, plus jeune et plus en phase avec le contexte actuel.

Un festival plus jeune comme NEW NOW fait plutôt face à des enjeux bureaucratiques en lien avec le site patrimonial. Cependant, comme pour ses homologues, réussir à faire le pont entre les besoins des artistes et des communautés est un défi.

Quid de la mort des festivals ? Car comme le souligne David Lavoie, les institutions doivent parfois mourir et il faut être capable d’adresser la question pour entrevoir le futur des festivals. C’est d’ailleurs pour cette raison que le New Now Festival s’est donné 10 ans de durée de vie.

On vous laisse méditer là-dessus.

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