L’Orchestre de la francophonie s’est donné un mandat pédagogique qui le mène à renouveler chaque année son bassin d’interprètes. Tout ce beau monde prend la route des concerts estivaux au terme d’une résidence durant laquelle chaque nouvelle mouture de l’ensemble apprend son répertoire. Qu’en est-il pendant la pandémie?
La situation actuelle bouleverse évidemment les plans de Jean-Philippe Tremblay, fondateur de l’orchestre en 2001, mais à la différence de tous ceux qui ont découvert Zoom ces dernières semaines, on peut dire que l’OF avait une longueur d’avance. Le chef explique :
« Ça fait quatre ans que nous utilisons la plateforme Acceptd, précisément conçue pour permettre de faire des auditions en ligne. Bien sûr, on aime aussi en faire en direct quand c’est possible, mais on a commencé à travailler avec ça quand le nombre d’auditions a dépassé la centaine ; on a eu des années à plus de 400 auditions.”
La seule bonne chose qui soit arrivée avec la COVID-19, souligne en outre Tremblay, c’est qu’elle a laissé le temps à l’Orchestre de la francophonie de se réorganiser.
« Les auditions étaient passées et nous avons invité cette année 37 musicien.ne.s à rejoindre l’orchestre, alors nous voulions quand même leur offrir quelque chose. J’ai consulté Maurizio Ortolani, Directeur principal Expérience numérique au Centre national des Arts. C’est un spécialiste en enseignement à distance et il nous a aidé à configurer nos outils. Nous avons acheté une cinquantaine de caméras avec micro stéréo incorporé, musicien-ne-s et professeur-e-s pourront ainsi interagir. Il y aura des classes de groupe, mais aussi des cours privés, ce qui pour nous est une nouveauté directement liée à la situation. Il y aura aussi des conférences, des classes de maître, etc. Chacun.e des musicien.ne.s devra aussi donner un récital de 30 minutes. »
Pour l’été 2020, le « plan A » de l’OF consistait à sillonner la route des festivals afin d’y donner des interprétations des neuf symphonies de Beethoven, dont l’OF a fait paraître l’intégrale en 2010 chez Analekta.
Le chef explique : « Nous devions le faire avec un orchestre un peu plus petit qu’à notre habitude, parce que nous réservons nos ressources pour donner un grand coup l’année prochaine alors que l’orchestre célébrera ses 20 ans. »
Jean-Philippe Tremblay a bien d’autres occupations que celle de diriger l’OF, aussi a-t-il une assez bonne vue d’ensemble de la situation.
« Depuis un an, précise-t-il, je collabore avec l’Université d’Ottawa et, bien sûr, à l’automne ça se passera en ligne aussi… J’espère qu’on pourra être de retour en juillet 2021 avec l’Orchestre de la francophonie, mais tout en disant ça, je regarde mes engagements de chef invité à l’international et, sur 16 semaines, j’en ai déjà 13 annulées ou reportées… Pour le moment on observe des annulations jusqu’à la fin mai 2021 en Europe… Il y a aura sans doute des restrictions, mais j’espère bien qu’on pourra enfin mettre tous ces gens-là ensemble. Parce que c’est ce qui fait la beauté de notre travail, et de notre art. »