Notre dossier en continu débute avec la programmatrice du FME, Marilyne Lacombe. La 18e édition du Festival de musique émergente d’Abitibi-Témiscamingue a débuté le 3 septembre et se poursuit jusqu’au 5. En tout, une vingtaine de projets musicaux seront présentés à travers la ville de Rouyn.
PAN M 360 : Comment monte-t-on un festival en ces temps de pandémie ? Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez dû faire face et comment vous êtes-vous adaptés à la situation ?
Marilyne Lacombe : Je ne pensais pas qu’on irait de l’avant avec le festival, j’avais perdu tout espoir que ça se passerait. Mais c’est quand ils ont changé les paramètres en autorisant des événements à 250 personnes qu’on a décidé d’aller de l’avant. Cette nouvelle est tombée environ deux semaines avant la date prévue initialement pour l’annonce de la programmation du FME. Donc, on a pas mal monté toute la programmation en deux semaines, ce qui est très rapide. D’habitude, on commence à booker en janvier et on annonce en juillet. On a mis les bouchées doubles pour pouvoir clancher ça le plus vite possible.
Y’a plein de paramètres un peu bizarres avec lesquels on a dû jongler, dont, par exemple, le nombre de musiciens dans un groupe. C’est devenu un facteur auquel il fallait penser car on se retrouve dans une situation où on fait plus de shows pop-up, donc on a toutes sortes de set-up de scène et des fois il s’agit de petites scènes sur lesquelles on ne peut pas accueillir beaucoup de musiciens, compte tenu de la distance entre les musiciens. En plus, on doit héberger ces musiciens chacun dans une chambre à part, ce qui complique pas mal la logistique, surtout si on parle de band à 5, 6, 7 ou 8 musiciens. Donc, il a fallu tenir compte de ça et essayer d’inviter des plus petites formations. Mais du côté des bands, ce fut assez facile car la grande majorité des groupes avaient hâte de jouer. En plus y’a beaucoup de projets dans la programmation qui n’ont pas eu la chance de jouer live leur nouvel album et ils étaient vraiment excités de le faire, donc, cela a aidé pour qu’on monte la programmation vraiment rapidement. Y’a par contre quelques groupes qui n’étaient pas franchement à l’aise de jouer devant public, donc, on a eu quelques refus. Ça, on le comprend, et pour la plupart d’entre eux, on a tout simplement étendu l’invitation à l’année prochaine. Du côté de la production, ce fut un réel défi parce qu’on ne peut pas faire autant de shows à l’intérieur que par le passé, donc, il a fallu que l’on trouve de nouveaux endroits. Si tu prends le Petit Théâtre (Rouyn-Noranda), qui peut contenir jusqu’à 450 personnes, il faut désormais maintenir la capacité à 80 personnes. Et on a des salles plus petites, donc, c’est encore plus difficile. Ce qui fait qu’on a essayé d’investir davantage de lieux extérieurs. Ce qui demande pas mal de préparation, étudier le terrain, comprendre comment l’adapter aux nouveaux règlements…
PAN M 360 : Avez-vous songé à l’option streaming ?
ML : Non, on a choisi de ne pas prendre cette direction. Cette année, le festival est essentiellement destiné à la population locale. Le seul volet streaming qui aura lieu, c’est le volet pros. Donc, la semaine suivant le FME, on a invité toute la délégation de pros étrangers – qui se déplace en général chaque année au festival – à un événement de réseautage en ligne où 4 shows qui auront été filmés au FME seront retransmis lors de cette rencontre.
PAN M 360 : Donc les artistes comme les pros qui seront au FME cette année sont tous québécois ?
ML : Exact. D’habitude, le FME accueille pas mal de gens et d’artistes de l’étranger, mais là, c’était important de se limiter au Québec. Donc, cette année, on a une programmation 100 % québécoise. On aurait pu avoir des artistes canadiens mais on a choisi de garder ça 100 % québécois. On ne voulait pas avoir des gens qui se déplacent de plein d’endroits différents.
PAN M 360 : Avez-vous songé à carrément annuler ?
ML : On avait l’énergie du guerrier pour cette édition. Il aurait été facile de tout simplement annuler puisque ce ne serait pas un FME comme on le connaît. Si on n’était pas trop sûrs au départ, là on est vraiment contents d’avoir été de l’avant quand on voit la réaction des groupes et des gens. Je pense que pour les gens de Rouyn, ce sera une des rares occasions de voir des shows cette année. Ils sont privilégiés car il n’y en a vraiment pas beaucoup ailleurs au pays.
PAN M 360 : Quelles mesures de prévention avez-vous prises ?
ML : On sait pas mal quoi faire à ce sujet : respecter le nombre de personnes selon l’espace dont on dispose, tenir compte du deux mètres de distanciation, fournir du gel pour les mains, des masques… Le port du masque est obligatoire dans la salle lorsqu’on se déplace mais tu peux le retirer à l’endroit qui t’es assigné. On aura beaucoup de bénévoles qui vont s’assurer que toutes ces mesures soient respectées. Il y aura des corridors pour les déplacements histoire d’éviter que tout le monde se mélange et passe trop près les uns des autres… Les mesures recommandées par la Santé publique finalement…
PAN M 360 : La Santé publique laisse entendre que cette situation risque de durer encore un an, voire deux… Comment envisagez-vous le futur au FME ?
ML : On espère vraiment que le festival pourra revenir à sa capacité et son potentiel normal l’année prochaine, mais on n’a absolument aucun contrôle là-dessus. Dans tous les cas, si l’année prochaine, on n’est pas plus avancés qu’on l’est présentement, on aura eu une année pour réfléchir à des façons de présenter des shows différemment et d’offrir une expérience de festival aussi bonne que celle qu’on avait dans le passé, car là, on n’a eu que deux semaines pour tout monter. C’est certain que cette édition 2020 ne sera pas comme avant, que ce sera un peu étrange, mais on espère que tout le monde aura du fun quand même.