Elle vit à Berlin, elle est saxophoniste, cheffe et compositrice. Elle s’appelle Fabia Mantwill et en écoutant sa musique sur l’album In.Sight, vous risquez de vous en rappeler. La jeune dame pratique un écuménisme musical qui fusionne le jazz, le classique et la pop. À certains endroits, elle ouvre une fenêtre sur des paysages à la John Barry pour 007, ailleurs, on est en territoire jazz-pop, ou plutôt dans un panorama orchestral un peu crossover avec les musiques du monde (folk sud-américain, mandingue). De beaux élans de cordes soutiennent des rythmes au trot, parés de couleurs changeantes, ici de la kora, là de l’accordéon, ailleurs de la guitare électrique, etc. Mantwill écrit des mélodies aisées, qui accrochent l’écoute et soutiennent l’intérêt. Des invités comme Kurt Rosenwinkel et Anat Cohen démontrent le tirant artistique que l’artiste d’à peine 32 ans exerce.
En termes de comparaison avec le Québec, je pense un peu à l’ensemble Cordâme qui fait très bien ce genre de fusion. La différence avec Mantwill et son orchestre, c’est la dimension et les traits spécifiques qu’elle apporte aux tableaux qu’elle peint. Son orchestre est plus charnu que pour Cordâme, ce qui nous plonge dans une fresque suggestive beaucoup plus vaste. Par contre, léger bémol, les contrastes entre classique et pop-jazz qu’elle assemble se frottent souvent de façon plus âpre, plus rugueuse que chez l’ensemble québécois. Le produit final, quoique très beau, n’est pas aussi élégant.
Cela dit, In.Sight est une sortie réjouissante, remplie de thèmes et de mélodies agréables qu’on aime relancer, ainsi que d’une sonorité générale veloutée dans laquelle il est plaisant de se lover.