afro-house

DJ Karaba aux platines : ambiance assurée !

par Sandra Gasana

Ça y est, j’ai eu ma première expérience au Piknic Électronik. Depuis le temps que j’en entends parler, je suis ravie d’avoir enfin pu élucider ce mystère et d’avoir pu assister au set de la grande DJ Karaba, celle qui est devenue incontournable sur la scène montréalaise et internationale. Elle arrive vêtue d’un top noir et de jeans, lunettes fumées et foulard couvrant une partie de ses tresses.

D’emblée, elle nous balance une version remixée de Water de la sensation Sud-Africaine Tyla, pour nous en mettre plein la vue dès les premières minutes. Elle semble connaître les paroles de toutes les chansons qu’elle revisite, en dansant et en interagissant avec son public, le sourire aux lèvres tout le long. Elle enchaîne justement avec des sons d’Amapiano, alors que ce style musical vient de souffler sa 10ème bougie. Avec ses transitions subtiles entre les morceaux, on ne sait pas toujours quand elle passe de l’un à l’autre. Avec des refrains accrocheurs, elle varie l’intensité au sein même du morceau afin de lui donner du relief, et le tout en vivant sa musique à fond. Elle fait plusieurs pas de danse durant tout son set, même parfois des pas de samba, ce qui rappelle son passé de danseuse pour des stars américaines. Elle mélange des vieux sons tels que Thriller, de Michael Jackson ou encore Gypsy Woman (She’s Homeless) de Crystal Waters, avec de plus récents comme Please don’t stop de music de Rihanna. Cela se fait toujours très graduellement : on détecte une mélodie qui nous rappelle le classique en question, et tout doucement la chanson se dévoile à nous avec la signature de la DJ Karaba. Là, elle fait danser la foule dès qu’elle ajoute la fameuse grosse basse qui nous force à bouger.

« La dernière fois que j’étais ici, c’était lors de la COVID. On était tous séparés mais ça fait plaisir de vous voir tous ensemble aujourd’hui », ajoute-t-elle entre deux morceaux.

Un retour dans le temps s’est fait lorsqu’elle remixe un vieux classique des années 80, Yeke Yeke de Mory Kanté. En fait, elle redonne une nouvelle vie à ce morceau sans toutefois le dénaturer. Durant certains morceaux, elle faisait de longues pauses, faisant croire que la chanson était terminée, pour reprendre de plus belle, en doublant d’intensité. Ces suspenses étaient appréciés du public, qui s’éclataient au fur et à mesure que la soirée avançait. Autre moment plaisant : les chansons en portugais qu’elle intégrait à son répertoire, venant du Brésil mais aussi d’autres pays lusophones, avec la touche Kuduro qu’elle a réussi à mettre en valeur. La nuit tombe, nous arrivons à la fin du spectacle. Elle remet ses lunettes, elle s’est débarrassée du foulard et on a l’impression d’être dans une discothèque à ciel ouvert, avec les lumières qui scintillent autour d’elle. L’ambiance est à son paroxysme et elle en profite pour remixer un morceau de Nelly Furtado, Say It Right, que la foule connaissait par cœur. Le seul hic, le micro qu’elle utilisait pour interagir avec le public par moment ne fonctionnait pas très bien. Elle termine en beauté avec sa propre version de Baianà, de Barbatuques, qui se prêtait bien pour l’occasion.

Avant son set, DJ Karaba a partagé la scène de la Banque nationale avec Mr Touré et le DJ, musicien et producteur Poirier, qui ont chacun offert un set de deux heures. Alors que le premier mélangeait plusieurs rythmes africains sur des instrumentaux dansants, le deuxième nous a fait faire un tour du monde musical. Nous sommes allés en Colombie, avec Agua Oro, une collaboration avec Ramon Chicharron, au Brésil avec Café com leche de Flavia Coelho ou encore en Haïti avec Teke Fren de Waahli, du groupe mythique Nomadic Massive. Nous avons également été transportés au Nigéria de Burna Boy, en Jamaïque avec du bon dancehall comme on les aime, en passant par la Côte d’Ivoire, avec le hit Coup de marteau. Tout le monde en avait pour son goût.

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jazz latin

PAN M 360 au FIJM 2024 | NOÉ LIRA : une bombe latina ! 

par Michel Labrecque

La chanteuse et comédienne mexico-québécoise (on pourrait dire mexicoise) Noé Lira donnait un concert gratuit en plein air, sous un temps un peu pluvieux. Mais la pluie, on ne la sentait pas, parce que la chanteuse musicienne irradiait avec son groupe entièrement féminin.

Noé Lira est une bête de scène, son énergie est contagieuse. Sa proposition est certes Latina, mais c’est une musique engagée, intelligente, loin des clichés du genre. La comédienne s’est imposée dans plusieurs séries québécoises, dont L’empereur ou La Candidate. En 2021, la musicienne et chanteuse a fait paraître Latiendo la Tierra. Trois ans et une pandémie plus tard, on peut sentir que la voix et la posture musicale de Noé Lira a maturé et progressé. Noé Lira s’adresse au public en français québécois, mais a choisi de chanter majoritairement dans la langue de son père. Le résultat est très chouette, n’en déplaise à certains nationalistes québécois, qui pourraient l’accuser d’affaiblir le français au profit d’une autre langue. Noé Lira est aussi une artiste engagée, résolument féministe, qui a affirmé hier soir que « les frontières étaient artificielles ». Elle joue de l’accordéon, qui se mélange au violoncelle, aux claviers et aux percussions. Elle est une parfaite illustration du Québec métissé et fier de l’être. Cette artiste plurielle n’a pas fini de nous étonner. Cette femme a un potentiel fabuleux. Elle va tourner un peu partout au Québec cet été. Allez l’entendre !

jazz

PAN M 360 au FIJM 2024 | AMBROSE AKINMUSIRE & DAVE HOLLAND : un dialogue sublime

par Michel Labrecque

Je vous ai raconté samedi mon enthousiasme face au concert solo du trompettiste Ambrose Akinmusire au Gésu, qui a fait sonner son petit instrument de tant de façons étonnantes. J’étais donc très content de pouvoir assister au deuxième spectacle d’Ambrose en compagnie du vétéran contrebassiste britannique Dave Holland. 

Vous vous dites : “Ce sera une sorte de rebelote, avec en plus un accompagnement solide de contrebasse”. Hors, ce ne fut absolument pas rebelote. Nous avons assisté à une authentique communion, un dialogue ouvert, fécond, comme le jazz peut nous l’offrir lorsqu’il est à son meilleur. Le trompettiste noir de 42 ans et le contrebassiste blanc de 77 ans nous ont fait léviter et flotter dans leur échange ou chaque note comptait, du moins j’ai eu cette impression. La trompette d’Ambrose Akinmusire était aussi intéressante que la veille, mais totalement différente, puisqu’elle échangeait avec la contrebasse, de façon complémentaire. Il y a eu autant, sinon davantage, de solos de contrebasse que de trompette. Parfois, Ambrose offrait des nappes de trompette répétitives pendant que David improvisait à plein gaz. Et après, on échangeait. Tout démarrait autour d’un thème de base, puis les deux instrumentistes s’écoutaient et décidaient d’une direction que seuls eux connaissaient. J’ai entendu Dave Holland pour la première fois en 1975 à l’Université Laval de Québec, accompagnant le saxophoniste free Anthony Braxton. Ce fut mon initiation au jazz libre. Puis, la radio communautaire CKRL-FM de Québec a adopté sa jolie balade The Conference of the Birds, comme musique pour un indicatif. Dave Holland a joué avec Miles Davis, Chick Corea, et à peu près tous les grands musiciens dans ses cinquante ans de carrière. Il est aussi un compositeur très doué. Sur son site web personnel, on trouve plus de deux-cents disques auxquels il a pris part. Cette rencontre entre lui et Ambrose Akinmusire était donc une rencontre entre deux grands instrumentistes et compositeurs. Une rencontre de très haut niveau. Était-ce la première rencontre entre les deux ? Je l’ignore. Mais c’était du jazz sérieux, mes ami-e-s !

Crédit photo: @frederiquema pour le FIJM

jazz

PAN M 360 au FIJM 2024 |  Ambrose Akinmusire soliloque

par Michel Labrecque

Vendredi a été mon baptême du 44ᵉ Festival de Jazz de Montréal. S’y replonger est toujours une bénédiction, spécialement quand il fait beau. En coup de vent, j’ai pu regarder des extraits de performances de Sunny War, qui réinvente le blues, en plein air, puis de la poétesse jazz Aja Monet, à l’intérieur. Ces deux concerts étaient gratuits, c’était plus que du bonbon. 

Entre-temps, je pouvais apercevoir des enfants qui se baignaient dans les fontaines du Quartier des Spectacles et des gens de toutes origines qui se dandinaient, discutaient, souriaient. La grande scène extérieure était remplie pour écouter le jazz fusion de Cory Wong. Ce n’est pas ma tasse de thé, mais la foule semblait éprouver du plaisir. L’éclectisme du festival est très fédérateur. 

Ma destination privilégiée de cette soirée était le Gésu, pour y entendre le trompettiste Ambrose Akinmusire performer en solo. Le trompettiste prodige de 42 ans est seul sur scène, presque complètement dans l’ombre. Seule sa trompette parle, parfois accompagnée de bruits de voix.

Mais quelle trompette mes amis ! Un son plein, qui habite tout l’espace. Où la virtuosité alterne avec des longues notes… et des silences parlants. Nous sommes dans la veine de son album Beauty is enough (2023), performé aussi en solo. Ambrose Akinmusire explore tous les orifices de son instrument. Il arrive à faire sonner la trompette de mille façons : parfois, c’est un long souffle de vent; parfois, le son de sa voix semble harmoniser avec le cuivre. Cette trompette éructe, argumente, berce, crie, miaule, calme, rugit, chante. Elle explore tous les demi-tons et quarts de tons possibles et impossibles. Tous ces glissements de notes qui nous font voyager dans nos têtes. Avec juste un peu de réverbération. 

Je ne suis pas toujours un grand fan de la trompette. Mais celle d’Ambrose est flottante, poétique, savante, émotive, dénudée. Le monsieur est aussi un grand compositeur, comme l’ont démontré ses autres albums en groupe. À la fin du concert, il a fini par nous adresser la parole, nous expliquant que ce récital est, en partie, un dialogue imaginaire avec d’autres trompettistes décédés, notamment Roy Hargrove et Wallace Rooney. Pour ma part, au fil de l’écoute, j’ai imaginé une méditation infinie, une session de thérapie, une guerre atroce, des gens qui déblatèrent dans des manifestations et des moments de tendresse absolue. Mes voisin-e-s de siège ont sans doute entendu tout autre chose. 

On entendait parfois des claquements étranges durant la prestation. Était-ce un problème de sonorisation ou des effets souhaités par le trompettiste ? Le débat entre spectateurs après le concert est resté ouvert. 

Aujourd’hui, Ambrose récidivera au Gésu en compagnie du vétéran contrebassiste britannique David Holland. Plusieurs d’entre nous y retourneront.

crédit photo: David Becker pour Wiki

expérimental / contemporain / free jazz / noise

SUONI PER IL POPOLO : ANTHONY BRAXTON & WOLF EYES  REPORTÉ MAIS IL Y A UN CONCERT CE SOIR !

par Rédaction PAN M 360

En raison d’une urgence familiale, le concert d’Anthony Braxton & Wolf Eyes dimanche à la Sala Rossa est reporté à une date ultérieure. Nous continuerons la soirée et l’entrée sera gratuite avec: Bryan Highbloom (ténor, soprano, mélodie en ut), Raymond Torchinsky (fa-alto, alto, clarinette basse) et le batteur Trevor Ferrier (tambours africains) improvisent ensemble depuis plus de cinquante ans. Rejoints par Mark Nelson (batterie trap), ils forment Horns and Drums, un groupe qui se consacre à l’improvisation libre. Et pour nous accompagner jusqu’au bout de la nuit, Mardi Spaghetti’s Late Sessions présentent une panoplie d’artistes, d’improvisateurs-trices et de musicien-nes locaux et internationaux qui collaborent au sein de combinaisons inusitées pour présenter de courtes performances (improvisées). Qui sait qui viendra faire du bruit !?

Remboursements: [email protected]

  • Ce contenu provient du site web des Suoni Per Il Popolo et adapté par PAN M 360

BILLETS ET INFOS ICI / TICKETS & INFOS HERE

Due to a family emergency, Anthony Braxton & Wolf Eyes Sunday’ show at Sala Rossa is postponed to a later date. The event is still on and free for all with: Ryan Highbloom (tenor, soprano, c-melody) Raymond Torchinsky (f-alto, alto, bass clarinet) and drummer Trevor Ferrier (African drums) have been jamming together for more than fifty years, joined by Mark Nelson (trap drums) they form Horns and Drums, a group dedicated to free improvisation. And to carry us in through the night, Mardi Spaghetti’s Late Sessions presents a wild array of local and international musicians, improvisers and artists who collaborate in unusual combinations for short (improvised) sets. Who knows who will come shred !?

For refunds: [email protected]

  • This content is taken from the Suoni Per Il Popolo website and adapted by PAN M 360

Chanson francophone

Francos | Eddy de Pretto, entre douceur et défoulement

par Sandra Gasana

D’abord, une lumière sur Johan Barnoin, le pianiste. Puis une autre sur Eddy de Pretto qui entre sur scène sous des applaudissements incessants. L’art de la mise en scène est maîtrisé par cet artiste qui parvient à changer de décor pour chacune de ses chansons. Il se promène sur scène, il est parfois assis, parfois debout, parfois assis sur le piano même et danse bien. Et il décide de démarrer ce concert avec son hit Love and Tendresse.

Et d’un coup, changement de décor pour Crash Cœur, un écran apparaît. On y voit les musiciens, qu’il présente un après l’autre, mais qui ne sont pas là physiquement. Après Yamê qui est venu en petit comité, voici qu’Eddy de Pretto nous sert la même formule.
Vêtu de son légendaire débardeur blanc, de jeans en patte d’éléphant et des chaussures à semelles, il nous partage une première confidence. « J’ai cherché un costume pour ce soir, vu que je joue dans une grande salle, mais je n’ai rien trouvé. Alors j’ai gardé mon débardeur, j’espère que ça vous va ? » dit-il en rigolant.

Sans transition, il nous sert R+V avec cette fois à l’écran, non pas ses musiciens mais des effets spéciaux pour illuminer la salle et la transformer en véritable piste de danse.

« Ok Montréal, est-ce que ça bouge ? Montrez-moi comment ça bouge à Montréal », demande-t-il avant d’inviter la salle à se mettre debout, ce qu’elle fait sans se faire prier. Il enchaîne avec Mendiant de Love et Papa Sucre, pour rester dans l’ambiance discothèque. Certaines des chansons de son nouvel album restent fidèles à sa marque de commerce, à savoir des sujets parfois durs mais abordés avec intelligence et poésie.

Il passe de rythmes dansants à des chansons plus calmes, où sa voix, qui va dans les graves et dans les aiguës, est mise en évidence. C’est le cas lorsque le pianiste revient sur scène pour Pause, sur laquelle il a collaboré avec la grande Yseult (qui n’était pas présente malheureusement) et Parfaitement, qu’il chante assis sur le piano. Encore une fois, on retourne au décor initial minimaliste, deux lumières, un piano, pas d’écran pour distraire. Ce moment était chargé émotionnellement et l’on pouvait le ressentir dans la salle. On pouvait entendre des murmures comme si les spectateurs voulaient chanter avec lui. 

« Si vous avez des verres, c’est le moment de faire quelque chose ensemble : levons nos verres à la chanson Kid, qui est dans les manuels scolaires en France », nous apprend-il, sous des tonnerres d’applaudissements. « C’est grâce à vous alors un énorme merci ! », ajoute-t-il. Le moment fort lors de cette chanson est sans aucun doute lorsque la salle entière chantait à l’unisson : Vi-ri-li-té a-bu-sive !, à plusieurs reprises.

Autre changement de décor qui nous secoue un peu tellement on ne s’y attend : retour à l’ambiance festive, aux lumières stroboscopiques, aux effets spéciaux et aux musiciens sur l’écran pour Créteil Soleil et Être bien, qu’il introduit en abordant un sujet qui lui est cher. « Je vais parler de santé mentale. Pour moi, c’est aussi important d’avoir une bonne santé mentale que physique. Je vais beaucoup chez mon psy et je lui dis : J’ai qu’un but dans la vie, c’est d’être bien avec moi-même ! », tiré de la chanson. La salle était restée debout durant toutes les chansons dansantes, ce qui n’est pas toujours pratique pour les personnes qui souhaitent rester assises. Ils n’y verraient rien de la scène. « C’est le temps de se lâcher », crie-t-il à la salle. « Est-ce-que vous sentez l’énergie ? », demande-t-il aux spectateurs avant de poursuivre avec Fête de trop, sur laquelle il invite le public à chanter avec lui.
Dernier retour au piano avec Johan qui revient sur scène pour Maison, qu’Eddy de Pretto interprète brillamment en émouvant la salle. Il se promène lentement, avec la même lumière du début qui le suit sur la scène.
Pour finir, on retourne dans l’ambiance discothèque avec Urgences 911, avec un décor aux couleurs de sirènes de polices. Il clôture le spectacle avec la même chanson du début, Love and Tenderness, mais cette fois-ci dans une version plus rythmée avec les paroles qui défilent sur l’écran pour que toute la salle puisse chanter. Cela lui a valu des applaudissements, qui se sont transformés en un long standing ovation. Tellement long, qu’il a dû revenir pour un rappel et nous a partagé Heureux, qui figure aussi dans son nouvel opus Crash Cœur. « Montréal, à très très très bientôt j’espère ! ».

Miro Chino a assuré la première partie du concert d’Eddy Pretto, lors de la 35è édition des Francos de Montréal. Ce rappeur québécois, également guitariste, était accompagné de son bassiste, d’un guitariste et d’un batteur. 

Chanson francophone / folk / pop

Aliocha Schneider aux Francos | Paysage de la Grèce, chaleur de Montréal

par Jacob Langlois-Pelletier

Mardi soir, l’auteur-compositeur-interprète et acteur franco-canadien, Aliocha Schneider, a transformé le Club Soda en une immense plage ensoleillée, où il fait bon vivre et tout est si simple. De retour pour quelques jours d’une série de spectacles en France, l’artiste de 30 ans a eu droit à un accueil des plus chaleureux lors de cette première de deux soirées aux Francos.

Après une première partie assurée par la talentueuse Rosie Valland, c’est au tour du principal intéressé de monter sur scène. Pour débuter, il s’amène seul, guitare à la main, puis présente Flash in the Pan, morceau provenant de son premier EP Sorry Eyes paru en 2016. Toutes les lumières sont rivées vers lui et la salle est plongée dans l’obscurité; on saisit tout de suite l’ambiance intimiste que souhaite y installer le chanteur.

« Il y a un an, je n’aurais jamais pensé avoir un Club Soda rempli devant moi. J’ai l’impression que c’est le début de quelque chose entre nous, et j’aime ça », dit-il avant de lancer les premières notes de Suspendus, la deuxième de la soirée.

Si Aliocha nous a transportés sur le bord de la mer aux Francos, il s’agit probablement aux abords de la Méditerranée en Grèce, là où il a écrit la plupart des titres de son album homonyme paru en septembre dernier, son troisième en carrière et premier en français. C’est d’ailleurs en majorité du matériel issu de son plus récent projet qu’il a offert à son public, allant de la superbe ballade pop L’Océan des Amoureux à Mexico, un air de bossa nova servant de fermeture à son dernier projet.

Outre les premiers instants de la soirée, Schneider est accompagné d’arrangements simples, mais efficaces de son band formé d’un claviériste, un bassiste et un batteur. Sur scène, le protégé de Jean Leloup est décontracté, authentique et multiplie les interventions avec le public.

La superbe réception de la foule est une énième preuve du lien particulier qu’entretiennent Aliocha et le public québécois. Pour plusieurs, la série télé québécoise Tactik a été leur première rencontre avec l’artiste, lui qui incarnait le personnage du jeune footballeur Carl Bresson. Au fil des années, le Québec l’a vu grandir sous ses yeux, autant en tant qu’acteur que musicien. Ce sentiment de voir un proche s’épanouir et trouver sa voie, c’est ce qui rend cette relation si spécial.

Après l’enfilade de morceaux Julia et Avant Elle, le parolier quitte la scène pour y revenir avec une invitée surprise, son amoureuse Charlotte Cardin. Il n’en fallait pas plus pour que la foule explose et se fasse plus bruyante que jamais. Après une excellente reprise de Rêver Mieux de Daniel Bélanger, les deux tourtereaux ont interprété, Ensemble, chanson abordant les difficultés des relations à distance, plus particulièrement de la leur. Ils s’échangent les regards et leur amour est contagieux; impossible de demander de mieux qu’un tel moment pour clore cette soirée.

Vers la fin mai sur ses réseaux sociaux, Aliocha Schneider annonçait que son spectacle prévu décembre prochain au mythique Olympia à Paris était déjà complet. Pas surprenant que sa pop langoureuse connaisse un tel succès en Europe; sa poésie est bien ficelée et rien n’y est laissé au hasard. Chapeau à lui pour cette transition francophone réussie.

Crédit photo : gracieuseté de Ludovic Rolland-Marcotte, @ludovicphotographie

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hip-hop

Yamê aux Francos de Montréal: un pari réussi !

par Sandra Gasana

Arrive sur scène celui que tout le monde attend, Yamê !!! Vêtu de rouge de la tête au pied, un pull sans manche et un pantalon en cuir, on entend d’abord des chœurs mais sans choristes sur la scène. Ensuite, sa voix résonne seule, puis elle est accompagnée par son clavier, également de couleur rouge.

Il ouvre le bal avec son tube Ayo Mba, que toute la salle connaît par cœur. D’abord juste avec le clavier, puis la batterie de Daryl embarque quelques minutes après. Le public est déjà en feu alors que nous ne sommes qu’au premier morceau. Les applaudissements semblent interminables. 

Il s’éloigne de son clavier le temps de la chanson Lowkey  et se met plus à l’aise pour danser en chantant, avec les influences africaines dans cette chanson.

Avant de jouer un morceau, il fait du storytelling afin d’expliquer le contexte et tente de le faire avec des anecdotes marrantes. 

« Je sais pas à Montréal comment ça se passe, mais à Paris, y a un truc que je kiffe quand même, ce sont les jam sessions », avant de jouer quelques notes au piano pour introduire ses musiciens, Romain et Daryl, et expliquer le concept des jam sessions. Et sans transition, il poursuit avec Business dans lequel il fait chanter l’audience. 
L’énergie monte considérablement lorsqu’il chante les premières notes de Call of Valhalla, que ma voisine dans la soixantaine connaissait par cœur. Il quitte de nouveau son clavier pour sauter sur scène devant un public en feu. « D’habitude on est plus nombreux sur scène mais à cause des billets d’avion et tout, on n’est pas aussi nombreux », confie-t-il, ce qui explique les voix des choristes qui ont été enregistrées pour combler leurs absences.

Il s’amuse avec son batteur en improvisant des sons devant lui, qu’il reprend à la batterie, le tout en s’éclatant et en rigolant.
« Tous les projets d’Elowi ont commencé avec un piano-voix », nous apprend-il, avant de nous feinter avec une reprise de Isn’t she lovely, qu’il abrège tout de suite en avouant qu’il ne connaît pas les paroles. Le public est mort de rire. Et il opte plutôt pour Kodjo, qu’il interrompt en plein milieu pour raconter une blague, et poursuivre comme si de rien était. On voit bien dans son show l’influence de l’improvisation, rien n’est coulé dans le béton, tout est malléable.

Autre moment fort du spectacle, sa reprise inégalable de La Bohème, de Charles Aznavour, que tout le monde chante, sans exception. 

Il poursuit avec La Maille, seul au piano, puis avec ses musiciens qui prennent le relai pour Carré d’as, sur lequel il s’éclate sur scène. Cela lui a valu de longs applaudissements. « Je crois qu’ils sont très chauds là », dit-il au batteur.

L’apothéose du show était bien entendu durant Bécane, et encore une fois, on avait l’impression que la salle s’était transformée en grosse chorale, malgré l’absence des choristes. Il a profité de ce moment pour enchainer avec Bahwai pour garder le momentum, avec quelques pauses de batterie par moments. « Il m’a dit que le solo était trop long. Bon, c’était la dernière, ça va, fallait bien qu’on s’amuse un peu ! », ajoute-t-il en parlant de son musicien.

Belle façon de clôturer que d’avoir choisi Quête, qui ramène la touche afro à son concert et sur lequel le public s’est lâché. Bien sûr, on a eu droit à un petit rappel, Bécane, dans une version quelque peu différente de la première. « Merci Montréal d’être venu ce soir », conclut-il.
Avant de partir, j’ai dû demander à ma voisine dans la soixantaine comment elle avait entendu parler de Yamê. « C’est mon fils qui m’a fait découvrir cet artiste, et comme j’ai une moto, à chaque fois que je suis dessus, je mets la musique de Yamê à fond, surtout Bécane », me confie-t-elle. C’est ça Yamê, du plus jeune enfant aux grands-parents, tout le monde y trouve son compte.

C’est la chanteuse française Anaïs Mva qui a assuré la première partie du concert de Yamê aux Francos de Montréal, accompagnée uniquement de son guitariste. Très timide, elle interagissait furtivement avec le public, valsant entre des morceaux mélancoliques, comme Corps inerte et de la pop à la française. « Je suis contente d’être avec vous. On m’avait dit que vous étiez sympas mais là, je le vois en vrai », constate-t-elle.

Elle fait une reprise originale de Hey Ya!, d’Outkast, et invite le public à chanter avec elle. Elle termine avec la chanson XS, qui fait référence aux standards de beauté et les pressions que ça engendre sur les filles.

Photo gracieuseté des Francos

folk-pop / pop / rap

Un 16 juin aux Francos | Pomme, Marco Ema et KNLO

par Jacob Langlois-Pelletier

L’équipe de PAN M 360 se fait un plaisir de fourmiller un peu partout aux Francos, dans les recoins évidents et moins évidents, pour le public francophile. Suivez notre couverture!

Pomme, tout en douceur à sa « deuxième maison »

Alternant entre la France et le Québec depuis déjà huit ans, Claire Pommat alias Pomme a sans aucun doute réussi au cours des dernières années à se tailler une place de choix au sein du folklore québécois. Dimanche soir aux Francos, l’auteure-compositrice-interprète et musicienne française a offert ce qu’elle qualifie de « consolation collective », une soirée de balades douces et assumées, toutes plus intimes les unes que les autres.

C’est vêtu d’un costume de fée que la Française fait son entrée sur scène, au grand plaisir de la marée d’admirateurs et d’admiratrices amassées sur la Place des Festivals. Parlant d’admiration, c’est dans cet état d’esprit que la foule restera plongée tout au long de sa prestation, une ambiance qui détonne après le passage du rappeur Souldia et de Québec Redneck Bluegrass Project lors des deux soirées précédentes. En ouverture, Pomme propose Nelly, titre hommage à l’écrivaine québécoise Nelly Arcan provenant de son album Consolation. « Cette chanson signifie encore plus lorsqu’elle est chantée au Québec. Ici, c’est ma deuxième maison », a-t-elle lancé, sourire aux lèvres.

Entourée de champignons géants sur scène, énième preuve de la singularité de son univers, Pomme enchaine les morceaux, allant de chansons plus récentes comme Jardin à Pourquoi la mort te fait peur ? et Soleil, soleil. Elle a interprété cette dernière en compagnie des sœurs Boulay, elles qui avaient foulé la scène tout juste avant son arrivée. La présence des deux Québécoises était loin d’être la seule surprise qu’elle réservait à son chaleureux public; Safia Nolin et Ariel Angel se sont joints à elle autour d’un seul micro pour une version acoustique de Lesbian Break-up Song puis Klô Pelgag est venu pour sorcières.

En cette douce soirée de juin, l’artiste de 27 ans aura fait voyager les Montréalais et Montréalaises à travers toute une gamme d’émotions, frissons garantis. Mention honorable aux quatre musiciens et musiciennes — Paulien Denize au violon et mandoline, Zoé Hochberg à la batterie et guitare, Michelle Blades à la basse et guitare ainsi que Olivier Corentin aux claviers et guitare — qui l’ont accompagné avec brio, contribuant à l’atmosphère détendue et mélancolique à souhait. Pomme l’a mentionné hier, assurer un tel spectacle avec le style musical qu’elle propose n’est pas une mince tâche. Vu l’intensité de la soirée et l’accueil des festivaliers, force est d’admettre qu’elle a réussi le défi haut la main.

Crédit photo: Benoit Rousseau

Marco Ema, musique pop sympathique et personnage charismatique

À pareille date l’an dernier, Marco Ema foulait les planches des Francos au sein de sa formation Vendôme. Dimanche, c’est en solo que le natif de Thetford Mines a monté sur scène pour présenter plusieurs morceaux de Anyway, Mommy Love, son deuxième album en carrière. « Merci d’être là à la place de checker l’émission Survivor! », lance-t-il avec charisme avant de s’élancer.

Passant de l’indie pop au folk tout en prenant un détour vers le rock, Marco Ema fait danser la foule présente devant lui, elle qui est surprenamment imposante pour une prestation en début de soirée. De prime abord, le jeune artiste propose une pop bienveillante et lumineuse qui donne envie de danser. Et pourtant lorsqu’on écoute attentivement, ses textes sont poignants et y abordent des thèmes tels que le deuil de son père ainsi que les ruptures amoureuses.

Sur scène, il multiplie les interactions cocasses avec le foule; Marco Ema est définitivement une des belles « bibittes » de la relève québécoise. Son plaisir sur scène et sa chimie avec ses différents musiciens sont contagieux. Sa musique solo est davantage linéaire que ce qu’on retrouve avec son band Vendôme. Le Québécois brille dans cette avenue, ce qui est prometteur pour l’avenir.

Crédit photo: Jacob Langlois-Pelletier

KNLO, jamais sans la famille

Cette année, les Francos présente « Les soirées urbaines », une série de spectacles à saveur rap. Après Raccoon et Yes* lors des deux premières journées du festival, c’était au tour du rappeur KNLO de fouler la scène Desjardins. Accompagné de son DJ, l’artiste de Sainte-Foy a fait son entrée débordant d’énergie, prêt à faire danser les festivaliers.

Dimanche, KNLO a offert une prestation honnête en rappant l’intégralité de ses morceaux, faits d’armes dorénavant devenus une denrée rare chez les artisans du hip-hop. Tout au long de son set, le protagoniste était accompagné à la voix par Caro Dupont, chanteuse qui a su ajouter son grain de sel aux différents projets solos du rappeur au cours des dernières années.

Première surprise de la soirée, KNLO invite Le Youngin à se joindre à lui pour GLACE, leur titre collaboratif tiré de l’album 438. Au grand plaisir du public, KenLo Craqnuques avait plus d’un tour dans son sac; Eman, Robert Nelson et Claude Bégin arrivent sur le plateau. Alaclair Ensemble, réuni aux Francos en plein mois de juin, n’en fallait pas plus pour réveiller la foule. « Tout ce qui compte, yeah. La famille, la famille, la famille, la famille », chantaient bruyamment les gens amassés autour de la scène pendant leur interprétation du titre La Famille. KNLO a toujours eu ce côté rassembleur et sa prestation nous a une fois de plus donné l’impression que nous faisons partie de la famille!

Crédit photo: Frédérique Ménard-Aubin

Afrique / rap

Une soirée de clôture riche en émotions

par Sandra Gasana

De retour à la barre de l’animation après la soirée « Du Groove et des Mots » à la Place des arts, Fidjil Aby était accompagné cette fois-ci par nulle autre que Louise Abomba, activiste culturelle et panéliste lors du volet professionnel du Festival Afropolitain nomade. (Lire: Pour son 10ème, le Festival afropolitain nomade est de retour à Montréal – PAN M 360)

Après le dévoilement des deux toiles réalisées par Kando, artiste visuel montréalais d’origine congolaise et Guy Kouekam, originaire du Cameroun, les arts visuels ont mis la table pour faire place aux arts de la scène.

C’est un Abel Maxwell en pleine forme qui est apparu sur scène lors de la dernière soirée du Festival Afropolitain nomade. On remarque tout de suite le style vestimentaire impeccable chez cet artiste originaire du Togo, avant de le voir déployer tout son art. Devant quelques enfants qui dansaient en face de la scène, il interagissait avec un public quelque peu timide, alors que son énergie était débordante. Il nous livre une reprise du classique Georgia on My Mind, de Ray Charles suivie de Dancing in September, de Overwings, avant de retourner à ses compositions originales, comme Djin kélélé. Ce titre rythmé a fait bouger le public, qui se décoinçait peu à peu.

C’était ensuite au tour de la chanteuse camerounaise Isis Kingue de monter sur scène. La femme aux locks rouges et bottes à talons hauts nous charme tout de suite par sa  puissante voix et sa présence scénique. Elle parvient à suivre la chorégraphie de ses trois danseurs tout en leur laissant l’espace pour briller. « Toutes mes chansons parlent d’amour », confie-t-elle, devant un public de plus en plus séduit. Elle était accompagnée par Teddy, son chef d’orchestre, qui maniait si bien son clavier qu’on avait l’impression qu’ils étaient plusieurs sur scène.

« Le prochain artiste nous vient du Cameroun et c’est l’un des rappeurs les plus prolifiques », nous annonce Fidjil. Accompagné par un full band composé de LA Révélation 2024-25 de Radio-Canada, l’Ivoirien Donald Dogbo à la batterie, Poppy Duverné d’Haïti, récemment installé à Montréal, au piano, Elijah Mansevani, à la guitare et Romuald N’Guessan à la basse, Leggo ouvre le bal avec son morceau Bombardé, qui met déjà la barre haute. Il poursuit avec Don’t Believe the Hype, où il mêle anglais et français, sur une musique qui rappelle les sons de D’Angelo de l’époque. Son rap à l’ancienne est parsemé de quelques solos de guitare d’Elijah, qui sont à couper le souffle.

Surprise de la soirée : Leggo fait monter Magdala, l’artiste montréalaise d’origine haïtienne avec laquelle il a collaboré sur Rendez-vous, en français et en créole. « C’est ma première fois à Montréal, mais ma musique est arrivée avant moi grâce à cette artiste », confie-t-il en parlant de Magdala.
Autre surprise de la soirée : le talent de chanteur du pianiste Poppy, qu’il a démontré en chantant « Di sè so ngando » qui signifie Allons-y, dansons ! dans la langue douala, maîtrisant parfaitement sa voix. Dans ce morceau, Leggo invite les jeunes, les vieux, les femmes, les hommes, les politiques, les citoyens à danser en faveur de la paix, de l’harmonie au lieu de toujours prôner un discours qui pousserait à la violence.
« Est-ce que vous connaissez la rue de la joie ? », demande-t-il à la foule, invitant les Camerounais dans la salle à approcher la scène. « On va transformer l’Afromusée en Rue de la joie », déclare-t-il devant un public en feu.

Retour de Louise sur la scène et, toujours avec sa touche d’humour, elle présente celle qui clôturera le festival : la grande Tyrane. D’emblée, la “Fille du soleil” débarque sous une mise en scène qui lui ressemble, et commence en tapant sur un tambour. Sa voix résonne ensuite dans l’Afromusée, accompagnée de ses musiciens pour nous servir sa Soul Mandingo, unique à elle. 

« Je suis championne d’Afrique. Je viens de la Côte d’Ivoire », affirme-t-elle fièrement en guise d’introduction. Tout comme ses consoeurs slameuses de la veille, elle aborde les violences faites aux femmes dans la chanson Fitinan, mais rend également hommage à sa maman avec Mvela, moment émouvant de son spectacle. Véritable boule d’énergie sur scène, elle invite le guitariste Elijah à plusieurs reprises pour des solos, au grand plaisir des mélomanes. Elle choisit la chanson Génération capable, pour clôturer ce beau rendez-vous musical sur une bonne note, avant d’inviter tous les artistes du festival pour la photo de famille. Et c’est exactement ce qui ressort de ce festival qui fête sa première décennie: il a créé une famille à travers les artistes qui y ont participé au fil des ans.

Crédit photo: Christian Tang – Festival afropolitain nomade

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