Depuis quelques années, la note bleue a de nouveau la cote. Un jeune public s’intéresse enfin au jazz grâce à de jeunes loups qui ont su revivifier le genre. La scène jazz londonienne est particulièrement effervescente et le claviériste Kamaal Williams est un de ses plus solides piliers. L’artiste qui agit également sous le pseudonyme de Henry Wu s’est fait connaître en 2015 grâce au projet Yussef Kamaal dont il tenait les rênes avec le fabuleux batteur Yussef Dayes. Toutefois, l’aventure n’a duré qu’un temps et Williams a ensuite entamé sa carrière en solo avec l’album The Return sur lequel l’absence du percussionniste se faisait sentir.
Avec Wu Hen, le musicien continue de mettre de l’avant un jazz funky assez similaire à ce qu’un Herbie Hancock nous proposait déjà dans les années soixante-dix. Cependant, il le fait tout en élargissant sa palette. Par exemple, alors que l’album démarre avec la soyeuse Street Dreams que bercent les tintements d’une harpe céleste, il change radicalement de teneur dès le deuxième morceau, One More Time, une des pièces les plus percutantes que nous ait offert Williams à ce jour. Il en va ainsi pour le reste du voyage auquel le musicien nous convie.
Les invités convoqués par Williams contribuent beaucoup à cet enrichissement des nuances observé sur Wu Hen. La harpiste Alina Bzhezhinska, la chanteuse soul Lauren Faith, le saxophoniste Quinn Mason (qui est en feu sur l’effrénée Pigalle) apportent tous leur pierre à l’édifice, mais c’est sans contredit l’arrangeur Miguel Atwood-Ferguson (Flying Lotus, Ray Charles, Dr Dre, Thundercat) qui brille avec le plus d’éclat. Les cordes dont il enrobe trois des pièces au programme donnent des ailes à la musique du claviériste. Sans réinventer la roue, Wu Hen nous fait passer de bien bons moments.