Le titre du deuxième album de Tamino, Sahar – qui signifie « juste avant l’aurore » –, évoque ce moment précis entre les embruns doux de la nuit et le crépuscule de l’esprit, entre les rêves et la vie. Dans ces limbes mélancoliques, Tamino nous fait entrer par The Longing et une phrase évocatrice de tout ce que l’on traverse : « The fog you see ahead is where you want to move ». Le timbre léger de sa voix, qu’il maîtrise sur des notes aussi aiguës que graves, flotte sur des vagues de guitare, se glisse dans nos oreilles avec délicatesse. La magie du live provoque souvent plus de chaleur en soi et un sentiment d’intimité que l’enregistrement studio ici n’a pourtant pas supprimé. L’émotion est palpable d’entrée, elle invite à s’enfoncer dans ses limbes, à mesure que Tamino explore, avec le son discret de cuivres embrumés, les échos de sa voix, que les cordes viennent sublimer. Il y a dans ce premier morceau, qui me rappelle un certain Nick Cave et sa pièce The River, la promesse d’une longue promenade.
Les couleurs folks de cet album vont avec la chevelure décoiffée de ce monsieur et son introversion. Mais cela ne fait pas tout. Ce que la musique folk a de bon et que Tamino exploite à merveille, c’est qu’elle peut sans prévenir se ramifier de tous les styles, prenant des origines égyptiennes du chanteur l’oud et le chant oriental ou encore de la pop rock des années 80. Je pense à Cinnamon et ses faux airs d’un morceau de Sade, par exemple. Les influences familiales du musicien semblent bénéfiques, puisqu’elles lui confèrent une certaine sincérité dans ses choix.
L’écriture en anglais n’empêche pas de retenir la sensibilité du personnage et de capter ses envies de parler d’intimité. Aussi, le fait qu’il trouve un équilibre entre la simple guitare-voix et une instrumentation riche, arrondie par les bois, les cuivres et les cordes, notamment avec le musicien Colin Greewood, membre de Radiohead. Cela fait de cet album autre chose, à la fois proche de choses anciennes et de ce que l’on n’a pas encore vraiment entendu. Que l’on y soit sensible ou non, Tamino, du haut de ses 25 ans, provoque quelque chose en soi, ouvre des portes que l’on ne voyait parfois même pas.